Duplicity : du Tyler Perry dans ses œuvres

Hyperactif, mais pas toujours inspiré, Tyler Perry se fourvoie avec ce Duplicity mêlant racisme dans les forces de l’ordre et machination invraisemblable.
Même si son nom n’est toujours pas très connu de ce côté-ci de l’Atlantique, Tyler Perry est l’un des plus gros bosseurs de l’industrie hollywoodienne. L’acteur, réalisateur, producteur et scénariste s’est fait une place depuis 2002 dans le paysage audiovisuel, en partie avec la série des Madea, et enchaîne les projets, principalement destinés au public afro-américain, à une vitesse hallucinante : 15 films réalisés sur les 10 dernières années et d’innombrables séries TV, souvent méprisées par la critique. Quelques mois après Messagères de Guerre sur Netflix arrive Duplicity sur Prime Vidéo. Un film qui tente, comme d’autres avant lui, de faire passer un message politique. Le pitch se veut simple : dans un quartier où des agressions se produisent régulièrement, le choc est total quand Rodney Blackburn, un homme noir, est tué par un policier blanc.
Duplicity nous donne l’occasion de retrouver Kat Graham (Vampire diaries, qui essaie de ne pas tomber dans l’oubli depuis l’arrêt de la série), dans le rôle de Marley, une avocate. Son petit ami Tony (Tyler Lepley), un détective privé et ancien flic a bénéficié de ses services suite à son licenciement. Ils retrouvent Rodney (Josh Adeyeye) et Fela (Meagan Tandy), animatrice télé, pour un petit déjeuner. Suite à cette rencontre, Fela va annoncer et apprendre en direct le décès de son mari tué pendant une séance de jogging. Il se trouvait près d’une maison ayant appelé la police et avait un casque, qui l’empêchait d’entendre les agents. En voulant sortir les mains de ses proches et prendre son téléphone pour l’éteindre, il est abattu par l’officier blanc Caleb. Marley en fait une histoire personnelle, et va mener l’enquête avec son petit ami pour connaître la vérité, et que justice soit faite…
De la bavure polémique au soap opéra

Comme on peut s’en douter, Duplicity tourne beaucoup autour de la question du racisme : le drame déclenche une série de manifestations et d’émeutes, les policiers responsables sont mis sous le feu des projecteurs et tentent de s’excuser de leur geste. Mais Tyler Perry étant un adepte des scripts dignes digne de la série Les feux de l’amour, les zones d’ombres et relations secrètes dans cette histoire vont se déployer tout au long du film – mais pas assez rapidement pour que l’intérêt décolle. Le spectateur apprend que Rodney avait des dettes et une liaison avec une autre femme, que Tony était au courant et que sa femme lui en veut donc énormément. L’enquête avance en parallèle et dévoile que Caleb a tenu des propos racistes et s’est montré violent – ce qui n’empêche pas, comble du cynisme, la Ville de chercher un accord avec Fela pour clore l’affaire. Tout ceci reste peu convaincant, mais ce n’est rien en comparaison des twists que prépare Perry.
« Tyler Perry utilise la violence systémique des forces de l’ordre envers la population afro-américaine pour broder un thriller du samedi soir. »
Après un saut dans le temps de quatre mois, Marley se fait kidnapper sur un parking d’une salle de sport par Caleb, à bout de nerfs, et il devient clair que l’amante de Rodney avait aussi une relation avec l’un des policiers ayant tiré sur lui ! La « simple » bavure raciste n’est pas aussi limpide qu’il n’y paraissait au premier abord, et Duplicity s’enfonce alors dans une machination à base de divorce, d’alliances improbables et de justice expéditive, qui fait peine à voir tant elle enchaîne les facilités et les invraisemblances. Utiliser la violence systémique des forces de l’ordre envers la population afro-américaine pour broder un thriller du samedi soir aussi peu inspiré n’est pas la meilleure idée qu’ait eue sur ce coup l’hyperactif Tyler Perry.