Host : la visio du démon
Oubliez les apéros Teams : Host imagine une séance de spiritisme sur Zoom qui tourne à l’invasion d’esprits frappeurs. Modeste, mais efficace.
Popularisé au milieu des années 2010 par le film d’horreur Unfriended (puis sa fausse suite Dark Web et le thriller Searching, tous produits par Timur Bekmambetov, réalisateur de Wanted), le sous-sous-genre du « screen life movie » a contribué à ringardiser pour de bon le found footage. Alors qu’une bonne partie de notre vie sociale passe désormais par les discussions en chat vidéo, il paraît logique de voir fleurir des films de genre tirant partie de cet outil informatique dans l’air du temps, même si le concept reste peu sexy sur le papier – oui, c’est un split-screen dans l’idée, mais un split-screen constitué de caméras d’ordinateur portable ! Tourné, comme le Français Confinés, pendant le confinement par le cinéaste Rob Savage, depuis signé chez Blumhouse, et prenant en compte le Covid à l’intérieur même de son scénario, Host est le dernier-né de cette lignée numérique, un moyen-métrage à petit budget qui a trouvé refuge (et a fait son effet) sur Shudder en 2020, avant d’avoir les honneurs de l’édition 100 % en ligne, ça tombe bien, de Gérardmer.
Connexion fatale
Même s’il atteint à peine les 60 minutes, Host parvient à mettre sur pied une histoire de séance de spiritisme, que six amis décident de mener collectivement en visioconférence sur Zoom, avec l’aide d’une medium. Histoire de se faire peur, comme tous les jeunes de films d’horreur, mais aussi de tromper l’ennui lié au confinement et pour certains d’entre eux à la solitude. Comme on peut s’y attendre, la réunion tourne rapidement à l’apéro général, jusqu’à ce que les choses sérieuses commencent et que chacun allume sa bougie et invoque les esprits de proches disparus. Bien évidemment, l’un des participants va faire une grosse bourde et inviter par erreur à la table, pardon, dans le salon virtuel, un intrus surnaturel, qui a lui aussi envie de tuer le temps… et de tuer tout le monde.
« Host finit par convaincre qu’il est possible de créer du cinéma même lorsque tous les éléments sont réunis pour en empêcher les artistes. »
Avec son scénario mal dégrossi, ses personnages tellement grossièrement décrits que chaque acteur et actrice porte le même nom dans la réalité, Host a parfois des airs de récréation collective sans conséquence, le produit d’une période étrange de notre histoire collective où le 7e art se devait d’être créatif sous une autre forme. Bien qu’il faille saluer l’efficacité de ses trucages réalisés, à distance, chez chaque comédien avec les moyens du bord ou en post-production, Host finit surtout par nous convaincre qu’il est possible de créer du cinéma, de raconter une histoire, si simple (voir bête) qu’elle soit, même lorsque tous les éléments sont réunis pour en empêcher les artistes. Modeste et artisanal au meilleur sens du terme (les acteurs sont tous à fond, quel que soit leur talent respectif, le tournage a dû s’étaler sur 12 semaines avec un réalisateur lui aussi confiné), Host n’invente rien de nouveau, mais regardé dans le noir sur l’écran adéquat – un ordinateur, bien sûr ! -, il procurera quelques frissons qui remettront en perspective sous un angle bien sinistre votre propre confinement.