Skincare : beauté empoisonnée

par | 21 mai 2025 | À LA UNE, Critiques, VOD/SVOD

Skincare : beauté empoisonnée

Une guerre entre salons de beauté dégénère de manière criminelle dans Skincare, thriller satirique porté par une excellente Elizabeth Banks.

Auteur de clips musicaux pour l’essentiel, Austin Peters n’a pas été gâté pour la sortie française de son film Skincare, relégué à une discrète distribution en VOD sous le titre. Skincare : l’ambition dans la peau. Ce solide thriller autour du culte de l’apparence et de l’industrie des produits cosmétiques, tiré de faits réels, est porté par Elizabeth Banks, actrice et réalisatrice (dernièrement Cocaine Bear !) qui ne connaît que peu d’échecs dans sa carrière où se croisent, entre autres, les sagas à succès Hunger Games et Pitch Perfect, et des personnages secondaires connus du public.

Peters rassure et surprend en dévoilant dans les premières minutes Hope Goldman (Elizabeth Banks) au naturel, sans maquillage. On sent l’effet positif du film The substance, auquel il n’est pas interdit de penser, dans cette entame qui relance le débat sur les complexes liés à l’apparence extérieure des femmes passé un certain âge. Hope, professionnelle de la beauté, passe pour la première fois à la télévision locale pour promouvoir la sortie de sa gamme de produits : masques de beauté, soins du visage et autres procédures incontournables pour paraître plus jeune et ralentir les signes du temps. Entre deux gros plans sur son visage, les présentateurs Brett Wright (Nathan Fillion) et Kylie Curson (Julie Chang) évoquent son passé et le rêve américain que cette fille de province incarne. De retour dans son institut de beauté Hope Goldman Skin Care, le film s’attarde sur le monde des salons esthétiques, et met en avant la méprisante attitude des hommes face aux femmes – comme l’offensant Brett. Hope est une femme intelligente, avec de l’ambition et qui doit tout à elle-même et au travail qu’elle fournit quotidiennement.

Ambition à fleur de peau

Skincare : beauté empoisonnée

Mais la vie d’Hope commence à se fissurer quand un autre institut tenu par Angel (Luis Gerardo Méndez) ouvre en face du sien. Elle essaie tant bien que mal de garder la face malgré une première rencontre houleuse, qui va déboucher sur une rancœur et une jalousie tenaces. Hope compte sur la publicité que lui apportent certaines clientes fidèles, comme l’influenceuse Jessica (Ella Balinska) mais lors de ses échanges la conversation a tendance à basculer vers l’institut d’Angel. Un e-mail aux termes assez crus envoyé depuis la boîte mail d’Hope fait scandale et les réactions ne se font pas attendre : des clients annulent leurs rendez-vous. Comble de l’horreur : quand elle visionne son passage dans l’émission précédemment annoncée, c’est une interview d’Angel qui est diffusée à la place !

« Skincare tire à boulets rouges sur le culte du buzz, le mirage des apparences trop parfaites qui caractérise la société américaine. » 

Skincare ajoute alors au registre de la satire sociétale celui du thriller paranoïaque et obsessif, quand Hope voit son monde partir en chute libre tandis qu’Angel devient la star montante locale du skincare. La guerre est officiellement déclarée et le scénario, qui pourrait être poussif s’il n’était pas tiré d’une histoire vraie, s’emballe dangereusement. L’ambitieuse esthéticienne voit ses pneus être crevés et un inconnu usurper son identité pour la faire passer pour une nymphomane dans une petite annonce numérique. Aveuglée par sa haine pour Angel, Hope ne voit pas que Jordan (Lewis Pullman, qui incarnait Bob dans Top Gun Maverick… et Thunderbolts*), coach de vie compatissant dont elle se rapproche petit à petit, est celui qui parvient à la manipuler… Tout comme The Substance, Skincare tire à boulets rouges sur le culte du buzz, le mirage des apparences trop parfaites qui caractérise la société américaine. Dans cette histoire sordide, toute publicité est bonne à prendre, y compris pour son héroïne, outsider en quête de reconnaissance autant que de célébrité, quitte à faire quelques arrangements avec la réalité dans un dénouement cynique à souhait.