Deuxième sélection Qualité France seulement cette année ! Mais que se passe-t-il ? Malgré nos recherches effrénées, la quantité infernale de bande-annonces visionnées au péril de notre santé mentale, il a été difficile de dénicher beaucoup de perles improbables ou de grosses productions déplorables. Bon, certes, certaines ont échappé à notre vigilance au début de l’été (Une mère avec notre cible de tir à l’arc favorite, Mathilde Seigner ; Les bêtises, Isabelle Carré qui joue – encore – les écervelées au cœur tendre), et nous avions déjà prévu – sans trop prendre de risque – le désastre mental des Profs 2, l’un des plus gros succès récents du cinéma français, on vous le rappelle.

Peut-être aussi sommes-nous devenus plus tendres avec notre industrie hexagonale. Après tout, pour 30 raisons de se prendre la tête sur l’état du cinéma français, il y a aussi des bonnes nouvelles notables : Audiard a eu sa Palme (méritée, sans doute plus pour l’ensemble de sa carrière que pour le film lui-même), les films de genre, même s’ils se montent difficilement, existent (La dame dans l’auto, Antigang, et les futurs Night Fare et Made in France). On a même eu droit à un film de guerre (La peur, balancé en plein mois d’août) et à un film d’animation ambitieux produit chez nous (non pas Les Minions, bande de cinglés : Le petit prince). Le gros chantier, maintenant, ça reste tout de même de parvenir à faire des comédies frenchy qui nous fassent un peu rire, comme le rappelait récemment un édito du Daily Mars. Parce que ça marche, beaucoup, il y en aura toujours autant. Mais il n’y a pas de raison qu’on ne parvienne pas à sortir des Neuf mois ferme ou des OSS 117, des films drôles, potaches mais sophistiqués et (vraiment) pensés pour le cinéma, tous les ans, voire tous les mois. On y croit, chers amis, on y croit !

Rappelons-le à toutes fins utiles : la sélection ci-dessous consiste en un choix tout à fait subjectif des pires films français à venir. Tout ici n’est que mauvaise foi bien informée. Nous n’avons pas vu ces films. Et d’ailleurs, jusqu’à présent dans Qualité France, nous n’en avons vu aucun ! Pas même Doutes ! Mais nous ne sommes pas parfaits : une bonne surprise se cache peut-être derrière ces navrants extraits. À vous de tenter l’aventure ! Vous pourrez même nous taxer de rabat-joie si vous le voulez.


Deux amis, une paire de claques

Qualité France : les recalés de la rentrée

Tout comme Whoopi Goldberg et un T-Rex en costume cravate, l’association à l’écran entre Louis Garrel et Vincent Macaigne ne pouvait émerger que dans nos délires éthyliques les plus fiévreux. Le boudeur préféré du cinéma français et le canard enrhumé (et déplumé) sont tous les deux spécialistes du « débit détaché », cette manière de déclamer de la manière la plus amorphe possible des dialogues surréalistes, que le monde entier nous envie. Alors forcément, quand un film intitulé, avec beaucoup de verve, Les deux amis, rassemble ces Tango et Cash du 7e art parisien à l’écran, et qu’en plus, le fils Garrel se dit que tiens, il passerait bien aussi derrière la caméra pour faire comme papa, ça crée un choc filmique inégalable, taillé pour plaire aux Inrocks, avec ses réminiscences pas du tout inconscientes de Jules et Jim et sa poésie à vau-l’eau imbitable. C’est tellement beau et improbable de branchitude qu’on a décidé de vous passer la bande-annonce ET un extrait tellement différents dans leur ton, qu’on se demande si le monteur du trailer ne devrait pas être payé plus que celui du film lui-même. Régalez-vous !

La punchline qui vend du rêve : « – Tu t’ennuies ? – Non, je m’ennuie jamais »

La bande-annonce

Extrait


Génie en berne

Kev Adams au cinéma, c’est un peu comme les patrouilles du Plan Vigipirate : ce n’est pas parce que vous n’aimez pas l’idée qu’elle va disparaître. En attendant une salutaire prise de conscience collective (enfin, on parle surtout de la conscience des 12-17 ans, qui se sentiront aussi honteux dans 15 ans que les anciens fans des 2Be3 le sont maintenant), le comique préféré de ta petite sœur se la joue Michael Youn avec une réadaptation « osée » des aventures d’Aladin. Le déploiement de moyens à l’écran rappelle à la fois Astérix aux Jeux Olympiques et Iznogoud, c’est dire si les références nous rassurent. Mais ces adaptations de BD-là sont bénies des dieux en comparaison de ce que semble offrir ce terrible spectacle jeuniste, où des blagues et anachronismes à peine dignes d’un stand-up gratuit dans le XXe font office d’humour, et où l’ami Kev se retrouve, encore, à se la jouer chanteur de cour de récré, un peu comme si Black M devenait tout d’un coup star de cinéma. Pour vous dire l’altitude où l’on plane (en tapis), le Vizir joué par Jean-Paul Rouve est drôle… parce qu’il pue du bec. Bref, ça craint, comme ne disent plus les jeunes, parce qu’après le carton des Profs 2, cette pantalonnade risque de drainer à nouveau des millions de fans esseulés dans les salles. Un certain génie doit se retourner dans sa lampe…

La punchline qui vend du rêve : « – Rejoins-moi du côté obscur ! – C’est où ? »

La bande-annonce


Boon again

On a essayé, vraiment, de moins en vouloir à Dany Boon. C’est vrai quoi, c’est pas de sa faute si le roi des Ch’tis est un des comiques préférés des Français, si ses films (qu’il les réalise ou pas) écrasent le paysage médiatique à chacune de leurs sorties, ou si l’Académie des Césars n’arrive à rien lui refuser. Dany est une star, et pourtant ses comédies sont de plus en plus pourries, et ça, c’est difficile à supporter. Dans Lolo, dont le pitch est entièrement pompé sur celui de la comédie américaine Cyrus, Dany joue Jean-René (rires), qui rencontre une quadra pimpante (normal, c’est Julie Delpy et en plus c’est elle qui réalise), et voudrait bien s’installer chez elle. Le problème vient de son beau-fils, Lolo (Vincent Macaigne, qui devient un peu trop vieux pour ces conneries), une tête à claques qui veut garder sa maman juste pour lui. Si l’on met de côté la vulgarité assez impressionnante du film considérant sa cible première (la fameuse ménagère vautrée le dimanche devant TF1), Lolo choque moins qu’il peine, parce que les acteurs réunis autour de Boon sont généralement bons, et qu’ils méritent un peu mieux que ce téléfilm amélioré et dénué visuellement – et surtout scénaristiquement – de toute imagination.

La punchline qui vend du rêve : « Les mecs, plus ils sont cons, mieux ils baisent »

La bande-annonce


Ça sent la vinasse

Vous la sentez venir, la nouvelle mode ? Ces derniers temps, le cinéma français s’était pris de passion pour l’équitation. De Guillaume Canet à Cécile de France en passant par Mathilde Seigner et les bourrins de Turf, tout le monde s’était mis à la viande de cheval. Maintenant, les producteurs commencent, pour leurs projets estampillés « Qu’elle est belle ma France », à loucher sur l’univers des viticulteurs et des vendanges. Preuve en est Premiers crus, qui après Tu seras mon fils, part en Bourgogne pour raconter à peu près la même histoire. Gérard Lanvin remplace Niels Arestrup et Jali Lespert Lorant Deutsch, dans les rôles d’un père et de son fils qui se déchirent autour des traditions ancestrales de leur vignoble. Lespert junior peut-il faire du bon vin sans écouter le père Lanvin ? Peut-on faire un bon film sur des gens qui boivent du vin ? Le lobby viticole a-t-il prévu une cuvée « Lanvin » pour remercier la production de la pub gratuite ? Est-il possible de faire plus concon – ou plus crucru, pour vous amis du LOL – que cette bande-annonce à la bonne vieille morale « c’était mieux avant », à laquelle il ne manque que le logo Herta ?

La punchline qui vend du rêve : « Y faisait du vin Ghandi ? »

La bande-annonce


La banlieue, c’est pas rose, la banlieue c’est bien chiant

Celui-là, il fait mal. Le dernier film en date de Samuel Benchetrit, Un voyage, nous avait séduit par son intensité brute, et la façon pudique dont le réalisateur de J’ai toujours rêvé d’être un gangster traitait un thème difficile. Et c’est avec un budget que l’on devine à nouveau réduit que l’écrivain s’est attaqué à Asphalte, une adaptation partielle de ses Chroniques de l’asphalte. Le résultat, filmé dans un 1 :33 qui sent le dénuement, est, comment dire… En fait, c’est un film choral sur des personnages délaissés qui habitent la banlieue : il y a Gustave Kervern qui prend des photos, Isabelle Huppert qui anone ses dialogues face à Jules Benchetrit (oui oui, c’est le fiston), et ô surprise, Michael Pitt (Funny Games, Hannibal) qui vient tâter du cinéma estampillé « qualité française » en cosmonaute venant manger du couscous chez une grand-mère. Ah oui, et pour bien nous faire croire que nous sommes en banlieue, il y a aussi Valérie Bruni-Tedeschi dans les parages, et elle minaude en regardant ses pieds (pléonasme). Il y a peut-être pas mal de poésie là-dessous, mais la bande-annonce donne surtout envie de rejoindre fissa des prairies un peu plus vertes et excitantes.

La punchline qui vend du rêve : « – Y vont comment tes parents ? – Ils sont morts – Ah merde. – Mais non, j’déconne ! »

La bande-annonce