Dans quelques semaines débutera sur la Côte d’Azur le 69e Festival de Cannes. L’alpha et l’oméga du 7e art français, autour duquel tourne une bonne partie de la saison cinématographique, et qui sert de curseur médiatique pour pratiquement toute l’année à venir (il n’y a qu’à voir les palmarès des Césars, où tous les films primés ont été révélés sur la Croisette). C’est notre mastodonte à nous. Mais il s’agit de la partie hébergée d’un iceberg à la densité réjouissante : car derrière les tapis rouges et les interviews sur la plage, il y a aujourd’hui près de 500 manifestations recensées dans l’hexagone, dédiées au film sous toutes ses formes (longs et courts-métrages, documentaires, film d’animation et même films de famille – si si, ça se passe à Saint-Ouen).

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Au-delà du prestige évident qu’un festival culturel apporte à une ville (car c’est un signe de dynamisme, et c’est un moyen de transformer la commune en marque déposée, quand le succès est là), la multiplication de ces événements reste une bonne nouvelle pour les défenseurs les plus ardents de l’expérience cinéma. À l’heure où l’on parle, outre-Atlantique, de séances « Screening Room » qui permettraient de mater chez soi le jour de sa sortie un Avengers 7 en haute qualité pour 50 dollars, histoire d’éviter la plèbe et de se la jouer nouveau riche, découvrir un festival permet de remettre les pendules à l’heure. Qu’il s’agisse du cinéma espagnol à Nantes, du polar à Beaune, des films fantastiques, rares ou inédits, à Hallucinations Collectives (Lyon) et Mauvais Genre (Tours), de l’animation à Annecy, du court-métrage à Clermont-Ferrand, le festival, tel qu’il est pensé et défendu par ses créateurs – souvent avec les moyens du bord et une sacrée dose de persistance – s’expérimente. En. Salle. C’est leur point commun, leur condition sine qua non pour exister. Et ça marche : quiconque a fréquenté ces manifestations sait qu’il est rare de tomber sur des rangées vides.

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Tout comme il est prouvé que les expositions temporaires des grands musées sont indispensables à leur bonne santé, du fait du regain d’attention médiatique qu’elles leur apportent, les festivals nous rappellent qu’il n’y a pas plus adapté pour découvrir un film qu’un grand écran, une foule nombreuse ET attentive ET impliquée, ainsi qu’une équipe de programmation mettant celui-ci en valeur. Combien de cinématographies alternatives, mal explorées ou représentées, parviennent jusqu’à nous grâce au travail de défrichement de ces organisateurs le plus souvent bénévoles ? Combien de classiques ou bijoux mésestimés de grands auteurs peut-on découvrir en version restaurée grâce à eux, surtout lorsqu’on n’habite pas Paris ? En faisant d’une simple séance un événement, un rendez-vous incontournable (où tout le monde ne peut parfois pas rentrer, ce qui renforce paradoxalement son attrait), le festival sanctuarise en quelque sorte le grand écran et la cinéphilie en tant qu’objet d’importance, en tant que passion essentielle, même. Et cette passion, si l’on a la chance d’habiter là où ces manifestations ont lieu, n’a, au contraire de certaines, rien d’exclusif. Après tout, qui n’aime pas se faire une toile en bonne compagnie, au milieu d’un public partageant les mêmes envies que nous ?

Pour plus de renseignements sur les centaines de festivals organisés à travers la France, consultez cet indispensable site, régulièrement mis à jour : Festivals Ciné.