Highest 2 Lowest : des hauts et beaucoup de bas

par | 17 septembre 2025

Highest 2 Lowest : des hauts et beaucoup de bas

Fraîchement reçu à Cannes, ce remake d’un classique de Kurosawa est un retour raté pour le duo magique Spike Lee – Denzel Washington.

Après Sergio Leone et John Sturges, entre autres, c’est au tour de Spike Lee, dont la dernière fiction remonte à Da 5 Bloods en 2020, de se frotter à la figure d’Akira Kurosawa en proposant une relecture de High and Low (Entre le ciel et l’enfer en version française). Highest 2 Lowest transpose son modèle dans le monde de la musique et la communauté afro-américaine. Intriguant, surtout lorsqu’il retrouve pour la cinquième fois son acteur fétiche Denzel Washington, avec qui il n’avait pas collaboré depuis Inside Man. Produit par A24, après une projection à Cannes ayant refroidi pas mal de ses spectateurs, qu’en est-il aujourd’hui alors que Highest 2 Lowest vient de sortir sur AppleTV+ : est-ce que ce nouveau Spike Lee Joint possède un son qui tue ?

David King (Washington), grand mogul new-yorkais de la musique sur le point de racheter les parts de son label, Stackin’ Hits Records, se retrouve piégé. Kyle, confondu comme étant le fils de David (Elijah Wright) alors qu’il est celui de son chauffeur Paul (Jeffrey Wright), est pris en otage, et les kidnappeurs demandent une rançon de 17 millions de dollars pour sa libération. Au pied du mur, David va-t-il se plier à cette demande et mettre en péril la suite de sa carrière ?

Do the right script

Highest 2 Lowest : des hauts et beaucoup de bas

Enfant de Brooklyn, ayant décrit et arpenté la ville de long en large au fil de sa carrière, il semblait évident que Spike Lee allait choisir comme environnement New York, étant d’ailleurs le décor du roman original, Rançon sur un thème mineur d’Ed McBain. Ville de la verticalité, dont les nombreux gratte-ciels s’avèrent en parfaite adéquation avec la logique thématique et cinématographique de son histoire, tout était là. Alors pourquoi n’en fait-il donc rien ? À l’image de tout ce qu’il propose dans ce Highest 2 Lowest, Spike Lee n’exploite jamais vraiment ses idées et passe complètement à côté de son sujet. La faute à un script catastrophique, multipliant les incohérences et les personnages caricaturaux pas très finauds. Entre les détectives qui font passer la Pat Patrouille pour Columbo, la confusion entre Kyle et Trey alors que le kidnappeur admet le suivre sur les réseaux sociaux, ou la manière dont David découvre l’identité du ravisseur : rien ne fonctionne.

« Spike Lee porte une part non négligeable de la responsabilité de cet échec, si l’on se réfère à sa mise en scène molle et sans inspiration. »

Si le scénariste Alan Fox reprend la structure du film d’Akira Kurosawa, il semble n’avoir rien compris au dilemme moral de celui-ci. Dans High and Low, le personnage de Mifune mettait en jeu sa fortune personnelle, mais également sa place dans son entreprise, apportant de la complexité quant à son indécision. Excepté la perte de sa maison de disque, rachetée par un conglomérat international, on doute fortement d’un véritable impact sur le compte en banque de David, empêchant de comprendre les raisons de son hésitation. Surtout qu’après le sauvetage de Kyle, de nombreux tubes du label se retrouvent dans les tops des charts, rendant probablement dérisoire la somme dépensée par King. Et si l’éveil d’humanité de Mifune venait de sa femme et de son fils, King lui n’est motivé que par une seule chose : son image et la perspective d’un bad buzz. Personnage profondément antipathique et vieux con donneur de leçons, David ne sera jamais remis en question, et l’on ne critiquera jamais vraiment les motivations de son action.

EHPAD Connection

Highest 2 Lowest : des hauts et beaucoup de bas

Mais Spike Lee porte également une part non négligeable de la responsabilité de cet échec, si l’on se réfère à sa mise en scène à la fois molle et sans inspiration. Comme dévitalisée de l’énergie typique de son auteur, qui recycle vainement ses effets de style emblématiques, tout sonne faux et mécanique. Le comble de l’embarras revenant à cette séquence de course-poursuite inspirée de French Connection, provoquant à la fois la consternation quant à la bêtise du plan des ravisseurs (le timing parfait de l’arrêt du métro et les pirouettes des motards), et l’agacement, face à l’absence d’adrénaline et de rythme, dont la scène manque cruellement. On se raccroche comme on peut devant la seule belle idée du film : cette confrontation dans un studio de musique, reprenant une scène emblématique du Kurosawa, où Spike Lee retrouve pendant un instant son savoir-faire.

Mais cela ne sauve pas ce Highest 2 Lowest, qui contient quantité de scènes ratées, au montage parfois bancal et dont la musique, constamment hors propos, rajoute un degré d’absurdité à l’ensemble de l’entreprise. Si David King a la meilleure oreille dans l’industrie de la musique, Spike Lee, lui, semble avoir perdu son œil de cinéaste.