Alternant documentaires (Mon meilleur ennemi, Marley) et longs-métrages de fiction (Le dernier roi d’Écosse, L’aigle de la neuvième légion) à un rythme effréné, l’Ecossais Kevin MacDonald a choisi, pour son film le plus récent, d’adapter un des gros best-sellers de la littérature pour ados, How I live now de Meg Rosoff, sorti en 2003. Mal-être de la jeunesse, passage difficile à l’âge adulte, société occidentale sombrant dans la barbarie : il est facile de comprendre pourquoi ces thèmes ont intéressé un réalisateur qui a souvent voulu éviter les sentiers battus, mais qui paradoxalement n’arrive pas à traiter avec concision ses sujets, et laisse souvent en plan ses comédiens et le public avec.
De la romance au survival
[quote_right] »Ce récit finit bien vite par s’enliser dans le convenu et parfois l’anti-spectaculaire. »[/quote_right]En choisissant de scinder son récit en deux, avec une première partie dévolue à la romance amoureuse sous l’égide de la nature retrouvée, et une seconde décrivant le chaos d’une 3° Guerre mondiale et l’avènement d’un ordre néo-fasciste qui vient rompre cette harmonie, Kevin MacDonald tente aussi d’adapter sa mise en scène à ce basculement central, mettant en péril la famille de Daisy (incarnée par l’intense Saoirse Ronan). Mais le procédé du tournage en numérique, pour peu qu’il soit approprié pour tout ce qui se rapporte à la vie heureuse en campagne et aux premiers émois amoureux, montre vite ses limites quand il s’agit d’aborder la partie survival du récit. Collant de près à sa vulnérable héroïne, pur produit du milieu urbain américain et rebelle à tout dictat, le réalisateur reste à la hauteur de cette ado rebelle et par trop urbaine qui finira par s’ouvrir à ses hôtes anglais et plus encore à son cousin, aiguillonnée par un amour naissant au plus mauvais moment.
Mais ce dispositif ne tient plus du tout la route lorsqu’il s’agit de suivre l’odyssée cauchemardesque de Daisy et des survivants accrochés à ses basques, face au danger post-apocalyptique. Le côté intime réduit l’impact de ce qui devrait être une prise de conscience : la liberté est devenue un don bien fragile par les temps qui courent. Si quelques moments violents, bien choquants dans leur soudaineté arrivent à toucher juste et rappellent que le réalisateur du Dernier roi d’Ecosse est aux manettes, le choix du « non-épique » et la volonté de laisser quelques éléments de l’intrigue dans l’ombre annulent mécaniquement l’impact de certains rebondissements, Kevin McDonald préférant plutôt cultiver le malaise. Pire encore, on se désintéresse bien vite du sort des protagonistes secondaires de l’histoire, dont certains infortunés compagnons de voyage de Daisy, la faute à un manque de caractérisation et à des motivations bien définies.
Pour Saoirse
Dans ce récit qui finit bien vite par s’enliser dans le convenu et parfois l’anti-spectaculaire, alors que l’on s’attendait à plus de nerf, seule l’interprétation sans esbroufe, mais prenante de Saoirse Ronan permet d’éviter l’assoupissement. Celle qui fut la fille-ninja d’Eric Bana dans le formidable Hanna ou la partenaire vampirique de Gemma Arterton dans Byzantium démontre qu’elle est, à 20 ans à peine, de loin l’une des comédiennes à suivre avec le plus attention, avec son identité bien marquée loin des canons hollywoodiens traditionnel. De son parcours la faisant passer de l’état de gothique mal embouchée à celui de combattante téméraire, nous aurions tendance à garder en mémoire ces moments de grâce du début, où sa communion avec la nature l’amène à se transcender, plutôt que ceux mal maîtrises où elle joue aux émules de Jennifer Lawrence tendance Hunger Games. How I live now, ou Maintenant c’est ma vie comme le précise la VF, est donc un quasi-ratage à mettre au crédit de Kevin McDonald et de ses choix malheureux, mais qui aura, espérons-le, l’occasion de se refaire rapidement avec son prochain film déjà dans les tuyaux, le thriller sous-marin Black Sea.
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How I live now (Maintenant, c’est ma vie)
De Kevin Macdonald
2014 / Angleterre / 101 minutes
Avec Saoirse Ronan, George Mackay, Tom Holland (II)
Sortie le 12 mars
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