Mary : piège nanardesque en haute mer
Gary Oldman et Emily Mortimer tentent de surnager comme ils peuvent dans ce médiocre Mary, histoire de bateau hanté prévisible et sans inspiration.
Celle-là, on ne nous l’avait jamais encore faite. Oubliez les manoirs aux murs qui craquent, les maisons de banlieue aux fenêtres négligemment ouvertes, ou même les hôtels un peu trop isolés pour être honnêtes. Dans Mary (à ne pas confondre avec le film de Marc Evans), ce ne sont pas ces lieux communs qui sont hantés par un esprit maléfique, mais un voilier de plaisance ! Des fantômes en haute mer, voilà la bonne, mais mince idée qui justifie l’existence de ce film de Michael Goi, vieux routier de la photo à la télévision, qui s’était fait connaître d’une poignée de connaisseurs avec l’éprouvant film d’horreur Megan is missing. C’était il y a bientôt dix ans, et on aimerait bien savoir ce qu’il l’a amené à embarquer sur ce bateau branlant, qui plus est accompagné d’un casting aussi prestigieux, visiblement à bord pour prendre du bon temps et un gros chèque.
La croisière amorphe
Spécialiste des croisières de pêche au large de la Georgie, David (Gary Oldman !) veut devenir le capitaine de son propre bateau. Pariant sur sa bonne fortune, il fait l’acquisition, tel l’imprudent Arnie dans Christine, d’un voilier quasi centenaire en ruine lors d’une vente aux enchères. Cela ne fait pas la joie de sa femme Sarah (Emily Mortimer !), inquiète de les voir dépenser une fortune pour une telle épave, mais après quelques semaines de travail, le « Mary » est prêt à partir en mer, avec un équipage composé du second de David, Mike, de leurs deux filles Lindsey et, oh oh, Mary, et d’un petit copain chelou… Direction ? Le triangle des Bermudes ! C’est une idée d’autant plus mauvaise qu’il suffit de fouiller le bateau pour retrouver des journaux relatant tous (c’est pratique) la même histoire : aucun propriétaire du « Mary » n’est revenu vivant de son voyage en mer…
« Mary est une escale horrifique à oublier. »
Lorsqu’on manipule, comme Mary, des éléments de scénario aussi basiques et usés jusqu’à la corde, il faut une bonne dose de savoir-faire et de style pour faire passer la pilule. Dès l’entame en forme de flash-forward, voyant Sarah se remémorer les détails de son éprouvant voyage, il est clair que Mary n’a pas les armes pour nous offrir une croisière grand luxe. Dénué de surprise ou de logique, puisque son fantôme en titre passe son temps à posséder l’équipage ou à se manifester bruyamment dans le dos de tout le monde, le film échoue ne serait-ce qu’à exploiter correctement la géographie de son unique décor (Michael Goi aurait dû revoir Calme blanc pour la peine). Mary est le genre de petit mauvais film où la musique gronde pendant un gros plan sur un acteur impavide, pour bien montrer que celui-ci est en train de virer psychopathe. Hébété la plupart du temps, mais conservant tant bien que mal sa dignité, l’oscarisé Gary Oldman se fourvoie dans une production indigne de son talent, et l’adorable Emily Mortimer a bien du mal à défendre des répliques aussi tarte que « Le mal a besoin d’un corps pour exister. Le corps, c’était ce bateau ». Pas sauvé par une fin médiocre, Mary est une escale horrifique à oublier, où l’inspiration a coulé aussi profond que les victimes de son peu terrifiant esprit frappeur.