Pelé, naissance d’une légende : chroniques d’un faux outsider
Alors que le Brésil pleure la disparition de l’icône Pelé, revenons sur le biopic qui, en 2016, tentait de retracer le parcours de ce footballeur d’exception.
Il était considéré par tous les spécialistes comme l’un des meilleurs joueurs de football de l’histoire du sport, si ce n’est le meilleur. Déclaré « Trésor national » de son vivant au Brésil, Edson Arantes do Nascimento, plus connu sous le nom de Pelé, a eu le droit en 2016 à un film consacré à son incroyable destin (sans compter le documentaire Netflix qui suivit quelques années plus tard). Prodige du ballon rond, l’attaquant a donc eu droit à son biopic appelé Pelé : naissance d’une légende, qui s’attarde plus particulièrement sur son adolescence et son ascension fulgurante dans la « Seleçao », qui le mènera au premier de ses trois titres mondiaux. Produit par Brian Grazer (Rush, 24 heures chrono) et réalisé par les frères Jeff et Michael Zimbalist (The Two Escobars, Favela Rising), spécialistes multiprimés du documentaire, Pelé a été entièrement tourné au Brésil, avec un générique rassemblant entre autres le chanteur Seu Jorge (La cité de Dieu), Vincent d’Onofrio (Jurassic World) et Colm Meaney (The Damned United). Choisis au terme d’une recherche internationale qui a vu défiler des milliers de candidats, les jeunes Leonardo Lima Carvalho et Kevin de Paula ont relevé le défi d’incarner à l’écran « le roi du beau jeu ».
Slumdog footballeur
Même s’il est sportivement et culturellement aussi important que Muhammad Ali dans l’Histoire du XXe siècle, Pelé n’a pas le calibre d’une œuvre de Michael Mann. Centré sur l’enfance de la star du foot brésilien, une graine de génie qui s’extirpe de son quartier pauvre par la seule force de son « style samba », Naissance d’une légende singe l’hyperactivité du Danny Boyle de Slumdog Millionnaire, bien aidé par la photo contrastée de Matthew Libatique. Les deux acteurs (ou plutôt les deux élus, vu l’épreuve de force que représentait le casting) incarnant Pelé sont crédibles et attachants, et les séquences de match s’avèrent tantôt réalistes, tantôt spectaculaires, malgré leur surdécoupage.
« Le résultat manque donc de surprises et de force, même s’il compense ces lacunes par une vraie énergie. »
Ce qui déçoit, c’est le manque de nuances et d’enjeux du scénario, qui se réduit à un affrontement entre le monde du ballon rond et le jeu brimé d’un prodige qui ne demande qu’à laisser parler son talent. Tout est simplifié pour faire de Pelé l’outsider ultime, de ses origines sociales à sa petite taille en passant par son jeune âge (à 17 ans, il était le plus jeune joueur de la Coupe du Monde 1958), alors que l’Histoire s’est chargée de nous apprendre qu’il n’avait laissé aucune de ces barrières l’arrêter. Le résultat manque donc de surprises et de force, même s’il compense ces lacunes par une vraie énergie. À voir donc si vous aimez le football vintage, les biopics sportifs qui finissent et si, en cette période de deuil national au Brésil, vous avez déjà revu l’impayable et pourtant culte À nous la victoire de John Huston.