The Devil’s Hour : souriez, vous êtes possédés !
Parfait pour une soirée sanguinolente, The Devil’s Hour s’essaie au film de possession au moyen d’une satire des réseaux sociaux, sans génie, mais avec malice.
Le film de possédés, et plus précisément L’Exorciste, charrie depuis bientôt 45 ans avec lui un imaginaire visuel et un sacré lot de clichés, qui transpirent désormais dans l’inconscient collectif. Même Friedkin, qui voulait récemment se réapproprier le mythe qu’il a contribué à créer avec The Devil and Father Amorth, ne pouvait s’empêcher de parioder inconsciemment son propre chef d’œuvre. Pour innover dans ce sous-genre condamné à l’imitation, il faut ruser, emprunter quelques contournements et s’échiner à surprendre. Bref, il faut apporter un peu d’eau (bénite) au moulin pour justifier une nouvelle intervention démoniaque fictive. Dans The Divine Fury, c’est l’intervention d’un champion de MMA qui bouleverse un peu la donne. Le bancal Le dernier exorcisme partait lui sur l’idée d’un révérend pratiquant des exorcismes truqués et tombant sur un cas bien véritable par accident. Un argument que The Devil’s Hour, présenté dans plusieurs festivals spécialisés, reprend à son compte, avec un ajout notable : les canulars religieux en question sont désormais streamés dans une émission en direct à succès !
Démons à très haut débit
Le show « The Cleansing hour » (l’heure de la purification) est dans The Devil’s hour le bébé de deux amis d’enfance, Max et Drew. Passés par une éducation catholique, mais pas du tout ordonnés, les deux potes diffusent sur Internet cette émission de faux exorcismes joués par des acteurs, rehaussés par des effets spéciaux vieux comme le monde et par le côté beau gosse en soutane de Max. Un bon petit business qui prend une mauvaise tournure le jour où Lane, la fiancée de Drew, accepte de jouer la « Regan de service » et se retrouve possédée, en direct, pas un véritable démon. Une créature malveillante qui se régale de cette audience inespérée, et entreprend de mettre Max et Drew à nu, face à leurs mensonges et leurs secrets…
« L’apparition d’un diable cornu de toute beauté… »
Basé sur un court-métrage qu’il avait lui-même réalisé, entre deux boulots de monteur, The Devil’s Hour est le premier long-métrage de Damien LeVeck. Calibré pour une bonne séance de minuit rouge sang, ce petit film tournant quasi-exclusivement autour d’un décor unique (même s’il s’étend à d’autres « contrées » dans des scènes indépendantes visiblement tournées un peu partout en Californie), balance tout du long entre comédie satirique et parfois ridicule – peut-on prendre au sérieux ce démon au sourire sardonique qui demande des sondages aux Internautes, ou ce flash-back à base de mère supérieure éborgnée ? – et horreur pure, via des séquences gore réalisées à l’ancienne par Alec Gillis et Tom Woodruff Jr. Le boulot abattu par ces légendes du maquillage prosthétique et le côté petit théâtre de la cruauté ordinaire de l’histoire compensent en grande partie les limites d’un script essentiellement écrit et filmé comme un slasher de seconde zone, incarnée par un casting au charisme limité. Le twist final, qui n’a rien de révolutionnaire, s’accompagne ainsi de l’apparition d’un diable cornu de toute beauté. Une créature de cauchemar splendide au milieu d’une série B correcte, mais trop conventionnelle pour être inoubliable.