The Divine Fury : l’exorciste en furie (FFCP 2019)
Pour un film promettant un mélange de combats de MMA et d’exorcismes, The Divine Fury se révèle très sage. Mais le cocktail a le mérite de l’originalité.
Il est parfois difficile pour certains de garder la foi face aux épreuves que la vie leur envoie. Ça peut les mettre en colère, mais sans doute pas autant que Yong-hu (Park Seo-joon), le héros de The Divine Fury. Après avoir perdu sa mère dès la naissance, puis son père policier après une tragédie, Yong-hu transforme son sentiment d’abandon en haine immense contre l’institution religieuse. Et quoi de mieux pour évacuer la pression, que de devenir champion du monde de MMA, ou Arts martiaux mixtes ? Tout irait bien dans l’octogone si Yong-hu n’était pas assailli par une voix intérieure, et qu’un stigmate sanglant n’apparaissait pas dans le creux de sa main. Sans le savoir ni le vouloir, l’athlète est devenu un instrument du Divin, cette marque étant un pouvoir lui permettant de combattre le Mal qui assaille Séoul. Inévitablement, son chemin croise la route d’un exorciste fatigué à la Max Von Sydow, le père Ahn (le vétéran du cinéma coréen Ahn Sung-ki), qui s’est mis en tête de débusquer un Évêque Noir (Woo Do-hwan) vénérant un démon-serpent et sacrifiant des innocents à travers la ville…
Les high-kicks du Seigneur
Avec son pitch inénarrable excitant immédiatement notre imagination (qui n’a pas rêvé, dans un accès de fièvre délirant, de voir le père Karras dérouiller Satan grâce à un coup de pied sauté retourné ?), The Divine Fury s’est imposé comme l’une des grandes curiosités de l’été 2019 dans son pays. Le long-métrage marque le retour d’un jeune cinéaste, Jason Kim, remarqué avec l’excellente comédie policière Midnight Runners – inédite en France. Retrouvant pour l’occasion son acteur principal Park Seo-joon, il change son braquet d’épaule en concoctant un ambitieux mash-up travaillant des thèmes chrétiens et un univers, le film d’exorcisme, plutôt exotiques pour la Corée du Sud. Même si les références aux classiques du genre sont inévitables, transposées dans un paysage nocturne urbanisé et déliquescent, The Divine Fury possède aussi plusieurs ingrédients de mélodrame, de récit super-héroïque et bien sûr de film d’action, qui forment un tout étonnamment cohérent – et visuellement très aguicheur – quoique pas toujours convaincant.
« Jason Kim fait le choix regrettable de mettre au second plan les aptitudes martiales de son héros. »
Handicapé par une longueur excessive, The Divine Fury est, contre toute attente, un film qui se prend très au sérieux. Personnage taiseux et renfrogné, tout comme le héros de la série Outcast (au principe très similaire), Yong-hu n’est pas le plus charismatique des héros imaginables. Jason Kim fait le choix regrettable de mettre au second plan ses aptitudes martiales pendant une partie du métrage, préférant s’appesantir sur sa relation avec un exorciste truculent, qui va lui ouvrir les yeux sur sa vraie nature, et les origines de sa colère. En bon esthète, le cinéaste emballe avec savoir-faire des séquences de possession, dont le côté répétitif finit par lasser. Yong-hu et sa main providentielle arrivent à chaque fois pour sauver la mise à Ahn, et le film enchaîne sur la victime suivante de l’Evêque, tête à claques caricatural qui ô surprise, règne sur un night-club rempli de néons donnant sur une cave ténébreuse. Il faudra patienter une heure et demi avant que The Divine Fury n’accomplisse enfin la prophétie de son titre, et fasse basculer un honnête mais pesant film fantastique en mode pulp décomplexé, plans-séquences compétents et iconographie de jeu vidéo à l’appui. Un « niveau final » qui réveille le chaland, et semble justifier, si l’on en croit une séquence d’après-générique, le lancement d’une véritable franchise holistique. À moins qu’il ne s’agisse d’une touche d’humour inopiné, dans un divertissement qui en manquait cruellement ?