Le soleil tape, les moustiques menacent, l’ennui se profile ? Accordez-vous donc quelques minutes de répit : le nouvel épisode de My trailer is rich déroule une fois le tapis rouge aux bandes-annonces les plus alléchantes et bien montées du Web. Il n’y a pas de règle dans le domaine : un trailer bien foutu se cache toujours quelque part, généralement intercalé entre une comédie francophone bien nécrosée et le dernier film de Taylor Lautner (allez, un peu de référencement estival ne fait jamais de mal). Vous pouvez tout aussi bien vous prendre d’affection pour une pauvre caissière du fin fond des Etats-Unis, une bande d’Irlandais fin bourrés, un ingé son enfermé en Italie ou un livreur à vélo sous le cagnard new-yorkais. Eh oui, on a beau être au cœur de l’été, y en a qui bossent pendant ce temps-là (enfin… peut-être pas les Irlandais, quand on y pense). Vous avez du mal à suivre ? Normal. N’essayez pas de comprendre et regardez.

Le maître est de retour

 En 2007, en l’espace d’un film estomaquant, There will be blood, Paul Thomas Anderson est passé du statut de petit malin – enfin, surtout traumatisé par les films de Martin Scorsese et Robert Altman – à celui d’artiste surdoué, sans que personne ne trouve à y redire. Car, franchement, comment pouvait-on rester autrement que bouche bée devant l’épopée pétrolière de Daniel Plainview, ce Charles Foster Kane pétrolifère et anti-clérical ? Cinq ans plus tard, Anderson remet enfin son titre en jeu, avec un projet tout aussi intriguant et prometteur, The Master. Cette fois, c’est de secte qu’il s’agit, et la scientologie n’est pas loin d’être visée directement dans cette histoire de leader religieux charismatique embrigadant un ancien marin dans les années 50 pour être son bras droit. Le décor est planté pour un nouveau duel questionnant la foi et l’American way of life de la façon la plus lyrique possible. Tous les signaux semblent être au vert pour accueillir un nouveau choc sensitif.

Boire ou mourir, faut choisir

Dans le domaine du high concept, Grabbers est en passe d’obtenir le titre de pitch le plus excitant de l’année. C’est une arme à double tranchant : le film de Jon Wright (le slasher surnaturel Tormented) se doit d’être à la hauteur de cette divine idée pour rester dans les mémoires. Jugez donc : un petit village côtier d’Irlande se réveille un beau matin pour s’apercevoir que des aliens tentaculaires du type Lovecraft s’apprêtent à les envahir. Heureusement pour eux, les monstres ne sont non pas allergiques à l’eau… mais à l’alcool. Tout comme Cherry Falls préconisait le dépucelage pour survivre à un serial-killer (mais le film s’avérait raté), Grabbers soutient le principe de la biture généralisée pour déjouer l’invasion extraterrestre. Avouez-le, maintenant : qui n’a pas envie de voir ça ?

Menu canular XXL

C’est désormais une habitude, Sundance charrie, au même niveau de Cannes, son lot de découvertes à chaque édition, et Compliance fait partie du dernier lot à s’être distingué en festival. Comme souvent dans le cinéma américain indépendant, le film de Craig Zobel joue la carte de l’argument provocateur pour éveiller l’intérêt. Il s’appuie ici sur un fait divers réel de très mauvais goût, impliquant les employés d’un fast-food et leur patronne atteinte d’une généreuse paranoïa, ainsi qu’un loser ayant l’idée d’un canular téléphonique qui va mettre en lumière le rapport de chacun à l’autorité, à l’influence d’autrui et aux complexes de supériorité. Montage serré, ambiance tendue, horreur psychologique frontale, pas de doutes, Compliance est parti pour faire des remous partout où il sortira.

Stuck in the sound studio

 D’ores et déjà sélectionné au Frighfest festival de Londres, Berberian Sound Studio fait partie de cette vagues de productions faisant revivre, le plus souvent sous forme d’hommage, le spectre du giallo italien, Amer ayant été le précurseur en la matière. Ici, l’éternel second couteau Toby Jones personnifie une profession trop peu vue au cinéma, le chargé des effets sonores. À lui d’inventer, enfermé dans le studio du titre, les bruitages d’un film d’horreur qui va chambouler sa vie et brouiller la frontière entre cinéma et réalité. Un tel sujet demande du style : bonne nouvelle, le film semble en avoir à revendre, d’autant que le cinéaste, Peter Strickland, n’est en aucun cas un habitué du genre.

Gros coup de pédale

De la série B bourrine à l’ancienne, ça vous dit ? Premium Rush réactive le concept d’un thriller explosif en temps réel, un genre typiquement hollywoodien dont Speed est reste le mètre-étalon aux côtés de Die Hard, en simplifiant l’intrigue au maximum. Joseph Gordon-Levitt est le pro de la livraison à vélo se retrouvant en possession d’un pli compromettant que cherche à récupérer par tous les moyens un flic pourri (Michael Shannon !!). Un argument prétexte à 90 minutes de course-poursuite dans New-York, et à des scènes d’action d’autant plus surprenantes et spectaculaires qu’on a rarement l’occasion de voir des VTT en action sur grand écran. Appuie sur les pédales, Joe, déchire tout !

Pipi et ronron sont dans un bateau

Depuis la sortie du roman en 2001, il a souvent été question d’adapter L’histoire de Pi au cinéma. Plusieurs cinéastes dont Jean-Pierre Jeunet s’y sont cassés les dents, et c’est finalement le versatile Ang Lee qui est parvenu à concilier, en 3D en plus, les trois défis que comporte l’histoire : diriger des animaux, diriger des enfants, tourner sur l’eau. Le résultat (qui sortira en décembre) est plus que prometteur : ce voyage existentiel à fort contenu métaphorique est ici retranscrit avec faste et inspiration, du spectaculaire naufrage auquel échappe le jeune Pi, à la « réalisation » du tigre de Bengale (surnommé « Richard Parker ») avec lequel il va devoir partager son canot de sauvetage. On a hâte d’embarquer.