Role Play : un jeu de rôles familier
La tueuse Kaley Cuoco cache sa vraie nature à son mari dans le thriller pseudo-comique Role Play. Le résultat est générique au possible.
Les histoires d’espions ou d’assassins qui cachent tout de leur vraie occupation à leur famille sont presque devenues un sous-genre depuis la sortie en 1991 de la comédie franchouillarde La Totale – réadapté trois ans plus tard par un certain James Cameron avec True Lies. Et encore, il existe sûrement des exemples antérieurs de ce type de postulat, idéal pour broder des comédies inoffensives comme Mon voisin le tueur comme des polars sérieux comme The Iceman. Role Play, qui réactualise ce pitch pour 2024 sur Prime Video, n’est même pas le seul exemple de tueur à double identité ces dernières semaines : Mark Wahlberg faisait la même chose en décembre dans Family Plan sur AppleTV+ ! Logique après tout, qu’un assassin ne crie pas sur tous les toits, comment il paie ses factures. Ce qui l’est moins, et c’est ce qui fait tout l’intérêt de Role Play, c’est que le tueur en question ait le visage de la gentille Penny de The Big Bang Theory, l’actrice Kaley Cuoco.
Double identité et manque de personnalité
La star américaine, également coproductrice, s’est offert un rôle à mille lieues de la sitcom qui l’a rendue célèbre : celui d’Emma Brackett, mère de famille débordée dont les déplacements professionnels servent d’alibi depuis des années à des missions d’assassinat aux quatre coins du globe. Son mari David (David Oleyowo, loin de sa zone de confort) ignore tout de ses activités, mais les choses se compliquent quand le couple décide de pimenter un peu sa vie intime en organisant une soirée « jeu de rôle » (non, non, pas du JDR) dans un grand hôtel de New York. Emma est abordée par « Bob » (Bill Nighy), qui s’avère être lui aussi un assassin : la tête de la tueuse est en effet mise à prix et cette fois, David est pris entre deux feux et va devoir être mis dans la confidence…
« Role Play est destiné, cela se voit, au streaming plutôt qu’au cinéma. »
La réalisation anonyme du français Thomas Vincent et la familiarité extrême de ce scénario révèlent bien vite la vraie nature de ce Role Play destiné, et ça se voit, au streaming plutôt qu’au cinéma. Hormis le fait que le film inverse les places traditionnellement allouées à l’homme et la femme dans ce genre d’histoire (Oleyowo et Kuoco auraient très bien pu inverser leurs rôles), il ne se dégage aucune espèce d’originalité du script de Seth Owen (Morgane), aucune scène saillante – à part la confrontation entre Emma et Bob, Bill Nighy se chargeant de manger l’écran en quelques minutes mémorables. Changeant d’apparence et d’attitude toute les deux scènes, Cuoco est plutôt convaincante en héroïne « jasonbournesque » décidée. Son implication dessert presque un film vendu comme une comédie d’action légère alors qu’il se prend très au sérieux, compliquant son script avec des histoires confuses d’organisation secrète et offrant un dernier acte invraisemblable avec l’erreur de casting qu’est Connie Nielsen, censée incarner une éleveuse de femmes assassins dans un coin de forêt allemand. Role Play donne au final l’impression d’avoir découvert le pilote d’une série télé destinée à être annulée au bout d’une saison. Un programme correct, regardable, mais tellement générique que ses propres auteurs l’ont peut-être déjà oublié.