Fenómenas : chasseuses de fantômes au rapport
Un trio de quinquas madrilènes enquête sur des phénomènes paranormaux dans ce film Netflix honnête, mais confus.
Il n’y a pas d’âge pour bouter les spectres malveillants hors de notre dimension. Parlez-en donc aux à la famille Warren immortalisée par les Conjuring. Parlez-en aussi au groupe Hepta ! Peu (voir pas) connue dans nos contrées, cette micro-société fondée en 1987 par un homme d’Église, le père Pilón, s’est donné pour objectif d’enquêter gracieusement sur les phénomènes paranormaux, gagnant au fil de ses investigations une certaine renommée en Espagne. Leurs membres n’avaient rien de jeunes ghostbusters à lunettes, mais rassemblait plutôt de sémillantes quinquas spécialisées dans la psychologie ou la médiumnité. Une telle histoire méritait depuis longtemps un passage par la fiction et c’est chose faite en 2023 avec Fenómenas, pure production de genre qui romance (évidemment) l’une de leurs « aventures » dans une boutique d’antiquaires de la capitale. Avec à la clé quelques possessions au coin du feu et des jump scares qui n’impressionneront pas un Balaguero.
Pauses clopes et possessions
Le film prend donc pour héroïnes trois membres du groupe Hepta, que l’on découvre en difficulté après de longues années de chasse au surnaturel. Sagrario (la blonde Belén Rueda, Les Yeux de Julia), Gloria (la brune Toni Acosta) et Paz (la rousse Gracia Olayo) ne sont plus aussi motivées qu’avant par leurs points hebdomadaires avec le père Pilón. Celui-ci se rend donc seul dans une boutique de vieilleries que ses nouveaux propriétaires disent hantée. Et de fait, quelque chose de sinistre y couve puisqu’il est agressé pendant sa visite. Le trio des quinquas met donc ses talents à l’œuvre pour résoudre le mystère derrière ce drame, qui ne va pas, malgré le fait qu’elles en aient vu d’autres, les laisser indemnes…
« Dans sa seconde moitié, le film prend des allures de film d’angoisse exploitant la topographie de son beau décor et sa photo classieuse. »
Outre ses dix premières minutes d’exposition où la confusion règne à chaque séquence (si vous n’avez pas lu le synopsis, bonne chance pour comprendre qui est qui et de quoi le film parle), Fenómenas nous fait pendant longtemps hésiter sur sa véritable nature : ce pourrait aussi bien être une comédie fantastique qu’un film d’horreur sombre et dérangeant. Le réalisateur Carlos Theron semble hésiter dans sa direction d’acteurs, son montage ou le ton du long-métrage dans son ensemble. Enquêtrices pas comme les autres, ses héroïnes se chamaillent gentiment et fument constamment, rencontrent des personnages inquiétants et saugrenus à la fois, semblent en même détachées et effrayées quand lesdits phénomènes se multiplient… C’est ce qui s’appelle naviguer entre deux eaux, la faute aussi à un faux rythme décourageant. Dans sa seconde moitié, le film prend plus clairement des allures de film d’angoisse exploitant enfin la topographie de son (très beau) décor et la photo classieuse d’Ángel Amorós — collaborateur régulier d’Alex de la Iglesia.
Quelques bonnes séquences de suspense n’effacent pas cette impression de paresse narrative générale, les lieux communs du genre s’enchaînant sans hâte jusqu’à un climax plus tapageur qu’original. Bien que la star Rueda soit le personnage principal (avec un trauma irrésolu soporifique), nous regrettons enfin que sa copine Toni Acosta, en médium surdoué et cœur solitaire, ne prenne pas sa place au cœur de l’intrigue. Après tout, c’est elle qui par son pouvoir est véritablement un phénomène dans cette histoire….