Great White : les dents de l’Océan
Les requins blancs sèment à nouveau la terreur dans Great White, survival australien qui ne s’embarrasse guère d’originalité.
C’est un fait, en Australie, plus qu’ailleurs, les cinéastes sont friands de films de grosses bébêtes, sans doute parce qu’il y en a aussi plus qu’ailleurs aux antipodes. Difficile du coup d’être étonné de voir les producteurs du très efficace The Reef et du plus oubliable Black Water revenir cette année avec un projet à l’ambiance et au pitch assez similaire, nommé Great White. Grand blanc, en français, car comme le promet l’affiche, il s’agit en effet d’un nouveau (d’un énième ?) film de requins tueurs, fidèle à la tradition du sous-genre né sur les plages d’Amity Island au mi-temps des années 70. Une réplique pas convaincue (« peut-être que le réchauffement climatique a modifié leur comportement ») sert à peine à justifier que les requins blancs s’attaquent une nouvelle fois de manière obsessionnelle à des personnages pas très chanceux, naufragés au milieu de l’océan après un enchaînement de péripéties imprévisibles.
Un voyage qui tombe à l’eau
Rembobinons un instant : Great White, passé un prologue rudimentaire sur un couple qui barbote ensemble dans une baie pour la dernière fois, s’intéresse à un autre duo de tourtereaux à croquer, Charlie (Aaron Jakubenko, Les Chroniques de Shannara) et Kaz (Katrina Bowden, Tucker & Dale vs Evil), qui gagnent tant bien que mal leur vie en jouant les pilotes de loisirs pour les touristes. Accompagnés de leur assistant Benny (le charismatique Te Kohe Tuhaka, vu dans The Dead Lands et récemment Love & Monsters), ils emmènent un couple asiatique vers une petite île perdue dans le Pacifique. Un lieu de naufrage chargé d’histoire, mais où est également échoué le cadavre d’une victime de requin. Un mauvais souvenir pour Charlie et un mauvais présage pour le voyage retour, puisqu’après avoir été forcé de se poser, son hydravion est littéralement attaqué par un requin blanc, qui laisse les cinq passagers isolés sur un canot à la dérive, à la merci de poissons voraces…
« Great White ne nage pas dans les mêmes eaux qu’une production hollywoodienne comme Instinct de Survie. »
Une fois expédiées les premières séquences aussi baignées de soleil que d’ennui, simples mises en chauffe pour rassembler cinq personnages archétypaux (nous prédisons d’emblée qui va y passer, voire même dans quel ordre) et l’improbable – et hideuse – séquence d’attaque de l’avion, qui ramène au douloureux souvenir des Dents de la mer 4, Great White trouve pour ainsi dire son rythme de croisière. Tels les naufragés du Radeau de la Méduse, nos héros se retrouvent à la merci des éléments et d’une menace indomptable, dans un canot apportant une illusoire protection. C’est un terrain de jeu limité pour le réalisateur Martin Wilson, et le remplissage narratif est inévitablement au rendez-vous, mais il sait en tirer quelques séquences stressantes de nage forcée ou d’attaques éclair, souvent teintées d’une cruauté inattendue. Si l’interprétation est inégale (Bowden fait une héroïne athlétique convaincante, mais Jakubenko est transparent et peu engageant), les vraies stars du show sont bien mises en valeur. Le budget ne permet pas d’éviter les sorties de routes numériques, certains plans flirtant avec le navet façon Asylum, mais les prises de vues sous-marines et les moments-choc à la surface se révèlent plus d’une fois convaincants. Great White ne brille toutefois pas par son scénario et ne nage pas dans les mêmes eaux qu’une production hollywoodienne autrement mieux dotée comme Instinct de Survie. Dans un genre aussi rincé et embouteillé, il en faut plus pour devenir un petit classique.