Land of Bad : du sang et des armes

par | 14 août 2024 | À LA UNE, Critiques, VOD/SVOD

Land of Bad : du sang et des armes

Des barbouzes piégés dans la jungle doivent survivre avec l’aide d’un Russell Crowe débonnaire dans cet explosif Land of Bad.

Pensez-en ce que vous voulez, mais le moins que l’on puisse dire sur les choix récents de carrière de Russell Crowe, c’est qu’ils savent nous surprendre. Entre deux concerts de blues à travers le monde, l’éternel Gladiator s’amuse à endosser des rôles incongrus avec le relâchement de la star qui a déjà tout vu et tout vécu. De Zeus dans le dernier Thor à L’Exorciste du Vatican (qui aura une suite !) en passant par le chauffard meurtrier d’Enragé, Crowe s’amuse sans pression puisqu’il n’a plus rien à prouver. Autant dire que le film de guerre Land of Bad, qui pimente un récit classique de commando empêtré dans une mission qui tourne mal avec un surplus technologique, ne met pas à son jeu d’acteur à rude épreuve. C’est d’ailleurs le cas pour tout le casting de cette production américaine, composé en grande partie d’Australiens, puisque Land of Bad brille surtout par sa débauche de pyrotechnie et d’action brutale et volontiers sanglante.

Jamais sans mon drone

Land of Bad : du sang et des armes

L’action de Land of Bad se déplace dans un coin assez flou du Sud-est asiatique, quelque part entre les Philippines et la Malaisie, dans la mer de Sulu. Une équipe des Opérations spéciales y est envoyée pour récupérer un mystérieux informateur, secondée par un opérateur radio de l’Air Force, Kinney (Liam Hemsworth, éternel frère de Chris, mais aussi de Luke – qui joue ici l’un de ses frères d’armes) et le pilote de drone Eddie « Reaper » Grimm (Russell Crowe), qui opère par radio depuis la base de Las Vegas. Après un largage en altitude et une balade en pleine jungle, le commando parvient à la base recherchée, mais se retrouve prise en étau par des factions de terroristes bien évidemment islamistes. Séparé du groupe et considéré comme seul survivant, Kinney doit fuir ses poursuivants dans un territoire hostile, avec l’appui satellite et les armes destructrices de Reaper pour seul allié.

« Crowe construit un drôle de personnage secondaire, qui donne par sa bizarrerie assumée un surplus de personnalité bienvenu au film. »

Au croisement de titres aussi datés qu’Air Force Bat 21 et En territoire ennemi, et d’autres plus récents comme Good Kill et (surtout) Du Sang et des larmes, Land of Bad déroule un scénario qui n’a, dès le départ, aucune intention de réinventer la poudre – même le prologue semble directement emprunté à Predator. Réalisateur plutôt orienté SF et fantastique (on lui doit The Signal, Underwater et l’un des Paranormal Activity), William Eubank déploie une mise en scène ample et clinquante (le gars est aussi fan de ralentis extrêmes que Zack Snyder), mais sans chichi, pour nous embringuer dans une histoire familière et extrêmement linéaire. Les fans d’action « tactique » seront aux anges, car Land of Bad fait partie de ces divertissements militaristes où la politique, les détails de la mission ou les états d’âme des adversaires passent illico par la fenêtre. Seuls comptent le professionnalisme de ses virils héros, les discours sur la camaraderie et le sens du devoir, la démonstration de force chronométrée de leur arsenal militaire, qui une fois lâché sur de vils ennemis, autorise un déchaînement d’explosions filmées avec l’application d’un pyromane. De ce côté-là, le film se situe dans la moyenne haute du genre, grâce à une topographie précisément explorée et la conviction de ses acteurs à gros bras. Oui, même Russell Crowe, qui a pourtant lâché depuis un bail les haltères.

Car si Land of Bad nous maintient engagé dans l’action sans se révéler mémorable, il réserve un traitement de choix à sa vedette principale, pourtant cantonnée dans un décor lointain et anonyme. Vieille baderne rétive à l’autorité et moquée par des supérieurs plus jeunes, Reaper est un pro obstiné qui fait à la fois office de deus ex machina (il fait littéralement tomber des bombes salvatrices du ciel) et… de ressort comique. Avec ses histoires de mariages ratés, ses blagues sur les vegan et ses tics obsessionnels, Crowe construit un drôle de personnage secondaire, qui donne par sa bizarrerie assumée un surplus de personnalité bienvenu au film. Preuve s’il en est que même dans des projets mineurs éloignés des chefs d’œuvre qui ont fait sa renommée, l’acteur continue de remplir avec gourmandise sa mission première.