Terry Gilliam est décidément plein de surprises. Tout comme il répétait à l’envie en interview, il y a à peine deux ans, qu’il ne retravaillerait sans doute jamais avec le gang des Monty Python, le réalisateur de L’armée des douze singes rongeait son frein en attendant de pouvoir réunir des fonds pour un nouveau long-métrage, qui succéderait à L’imaginarium du Dr. Parnassius, endeuillé par la disparition de Heath Ledger. Tout en gardant la main en signant deux courts-métrages plus ou moins publicitaires (The legend of Hallowdega et le très intéressant The Wholly Family), Gilliam semblait préparer à nouveau une adaptation de Don Quichotte. Pourtant, même si ce projet chimérique n’est pas encore aujourd’hui au point mort, c’est avec une autre histoire, et un autre film, que le trublion reviendra sur le grand écran en 2014.
Tombé « amoureux » du comédien Christoph Waltz, star oscarisée chez Tarantino devenue une vedette sur le tard, Gilliam rescucite pour lui un projet de longue date nommé The Zero Theorem, qu’il devait monter avec Billy Bob Thornton dans le rôle principal en 2009. Comme il est malheureusement de coutume avec Gilliam, le financement aura capoté avant le premier clap, avant de retrouver vie en 2012. Autour de Waltz, casté dans le rôle de Qohen, un génie de l’informatique à la recherche du sens de la vie (sic), Gilliam construit un casting aussi bigarré que classieux, Ben Wishaw, Tilda Swinton et David Thewlis se joignant au projet, tandis que Melanie Thierry assure le quota « frenchy sexy » dans un personnage de femme fatale mystérieuse. Déjà passé devant la caméra du Britannique (c’était dans Les Frères Grimm), Matt Damon se fend également d’un long caméo dans le rôle très « orwellien » de Management, équivalent de Big Brother. Le film se tourne finalement avec un budget serré (« le plus ridiculement bas de ma carrière », selon le réalisateur) en moins de 40 jours, en Roumanie, avant d’être présenté en grandes pompes à Venise, en septembre dernier.
Le Brazil du XXIe siècle ?
[quote_left] »L’esthétique rappelle forcément son cultissime Brazil. »[/quote_left]Alors que la sortie du film est annoncée pour le 27 août prochain, le premier trailer du Théorème Zéro, révélé cette semaine, permet de découvrir avec forces détails l’univers créé par Terry Gilliam : un monde à la fois futuriste et artisanal, dont l’esthétique (Gilliam s’est adjoint les services du très bon production designer David Warren, qui a notamment travaillé sur Hugo Cabret et Blanche-Neige et le chasseur) rappelle forcément son cultissime Brazil. Ordinateurs faits de bric et de broc, costumes colorés évoquant du Jean-Paul Gaultier sous acide, hommes-caméras, chapelle transformée en temple technoïde, protagonistes barrés avec de curieux accents, hallucinations cosmiques, satire des médias et de l’omnipotence des technologies… Le film s’annonce joyeusement chaotique, ce qui est généralement une qualité avec Gilliam. Le scénario serait, au vu des premiers échos, particulièrement nébuleux, le personnage incarné par Waltz (qui s’est fait une tête de Néo dépressif) louvoyant entre la réalité et son imagination, tout en se posant des questions avec un grand Q et en tentant de résoudre le fameux théorème. Quoiqu’il en soit, et si l’on en croit les promesses de son créateur, Le Théorème Zéro ne devrait ressembler à rien de connu. Tiendra-t-il celle-là ?
