Les 7 de Chicago : Aaron Sorkin dresse des barricades

par | 15 septembre 2020 | Cinéphagie, My trailer is rich

Le nouveau film d’Aaron Sorkin aborde la question des répressions violentes des contestations sociales. Un récit historique qui tombe à pic. Bande-annonce !

Chez Born to Watch, la seule évocation du nom d’Aaron Sorkin provoque immédiatement un sentiment d’impatience mêlée d’excitation. Car ce scénariste, producteur et réalisateur oscarisé a su se forger une place à part dans le paysage cinématographique américain et performe dans l’art du verbe, du bon mot et de la maîtrise de la structure dramaturgique. Aaron Sorkin, c’est avant tout l’inventeur du « walk and talk », cette forme de diatribe azimutée inimitable, constamment en mouvement et savamment documentée, qui confère au spectateur un plaisir intellectuel rare et précieux. Il a affiné son style avec la série À la Maison Blanche, véritable bible d’une utopique démocratie moderne, précédée par sa grande sœur Le Président et Miss Wade. Ses deux « tragédies grecques », car il a choisi d’en adopter la structure, The Social Network et Steve Jobs sont des portraits touffus et sans concession de deux figures clé de notre époque. Il écrit ensuite et réalise pour la première fois, le jouissif Le Grand Jeu, qui suit la chute brutale de Jessica Chastain, en arnaqueuse surdouée.

Aaron et Steven parvinrent à leurs fins

Aaron Sorkin dresse des barricades

Deux autres scénarii de son cru nous attendent encore. Lucy et Desi, un biopic de l’actrice Lucille Ball avec Cate Blanchett, dort dans les cartons depuis 2018. Les Sept de Chicago, qu’il réalise également, ne peut pas sortir en salles à cause de la crise sanitaire et vient d’être acheté par Netflix pour une sortie le 16 octobre. Un événement !

Le film revient de très loin. En 2007, Aaron Sorkin écrit son scénario à l’intention de Steven Speilberg qui veut le porter à l’écran avec un casting de nouveaux talents. Seulement voilà, souvenez-vous cette année-là, Hollywood entre dans une période de disette : la grève des scénaristes a laissé la plupart des productions sur la paille. Faute de budget, le maître cède son fauteuil de réalisateur. Le projet a été enterré de longues années jusqu’à ce que Steven Spielberg lui-même relance son développement et Aaron Sorkin est désigné pour le remplacer en 2018. Un an plus tard, il a tourné le film à Chicago et dans le New Jersey. Il s’entoure d’une sacrée distribution quasi exclusivement masculine : Yahya Abdul-Mateen II (Docteur Manhattan, dans la série Watchmen), Sacha Baron Cohen, initialement prévu à l’époque de Spielberg, Joseph Gordon-Levitt ou bien encore Michael Keaton pour ne citer qu’eux. En 2020, un ultime rebondissement, une pandémie mondiale, privera le long-métrage de sortie en salle, au profit de la plateforme Netflix.  

Une histoire qui en rappelle d’autres

Aaron Sorkin dresse des barricades

Les 7 de Chicago s’annonce comme un film de procès doublé d’un film historique. 1968, Chicago, Illinois. Au cours de sa Convention nationale, le parti démocrate doit se choisit un nouveau candidat pour l’élection présidentielle. Mais dans la rue, les manifestations font rage contre la guerre du Viêtnam. Les leaders de ce mouvement de contre-culture, un groupe, appelé Chicago Seven, sont arrêtés pour incitation à l’émeute et complot par le gouvernement fédéral. L’histoire suit ces révoltés au tribunal.

« Le film est diffusé au plus grand nombre avant les élections prévues en novembre outre-Atlantique. »

Les 7 de Chicago sort dans un climat plus que tendu aux États-Unis. Il semble important que ce film soit diffusé au plus grand nombre avant les élections prévues en novembre outre-Atlantique. Au moment où les violences policières atteignent un niveau sans précédent, que les inégalités montent encore d’un cran, sur fond de Covid-19, la communauté culturelle lève la charge à l’encontre de Donald Trump. Autre exemple frappant, l’auteur/réalisateur a réuni le casting de The West Wing au grand complet, 18 ans après le clap de fin de sa série, pour un épisode électoral qui s’annonce mémorable. Aaron Sorkin et Steven Speilberg ont visiblement beaucoup de choses à dire, espérons que leurs voix porteront jusqu’aux urnes.