Ce n’est pas une nouveauté : les années 80 sont à la mode au cinéma. Pas tant pour leur coiffures (Dieu merci) que pour une certaine innocence dans leur approche du divertissement au second degré, leur amour de la punchline et des scènes d’action destructrices. Une génération entière a grandi avec Piège de Cristal, L’arme fatale et Spielberg. Certains d’entre eux, comme James Mather et Stephen StLéger, ont la chance de faire du cinéma avec la bénédiction de tonton Besson. Le patron d’Europa Corp a un jour eu une brillante idée sous la douche : remaker New York 1997 dans l’espace. Oubliant sans problème qu’un autre film avait déjà eu cette illumination (Fortress 2, avec totof Lambert), Besson refile son pitch à deux cinéastes débutants, ainsi que 30 millions de dollars pour attirer une ou deux stars en haut de l’affiche.

Blague fatale

Snow (Guy Pearce) et sa pét… pardon, l’héroïne, Emilie (Maggie Grace). Yippi kayee ?

Le résultat est Lockout, production française qu’on jurerait sortie de Hollywood. Cela tient sans doute à la présence de Guy Pearce dans le rôle principal, celui d’un mercenaire nommé Snow, à la langue bien pendue, et qu’on envoie dans un pénitencier spatial pour y sauver la fille du président, retenue par les prisonniers ayant déclenché une révolte. Dès les premières secondes du film, les influences du duo et de leur parrain sont très claires : le style verbal effronté et fleuri de Shane Black, l’homme derrière les dialogues du Dernier samaritain et de L’arme fatale est l’influence principale des réalisateurs/scénaristes. Ce n’est pas tant un hommage qu’un pillage éhonté, celui de New York 1997 étant tellement visible qu’on l’oublie plus facilement.

Si l’on fait fi de son manque d’originalité, Lockout laisse tout de même apparaître quelques qualités plaisantes : Guy Pearce en premier lieu, s’amuse comme il n’a sans doute jamais eu l’occasion de le faire, jouant les Bruce Willis de l’espace avec un entrain et une joie communicatives. Signe que Besson est un auteur constant, Maggie Grace hérite elle du rôle de la blonde complètement stupide, cible de tous les sarcasmes du héros, giflée, travestie, blessée par balles avant d’être à nouveau frappée. Une belle leçon de mysoginie qui laisse véritablement songeur puisque tout ce cirque machiste continue quand même pour l’ex de Milla depuis au moins quinze ans. Le film possède aussi une bonne galerie de « tronches » de purs seconds rôles, qui n’ont pas grand chose à défendre sinon quelques répliques parfois bien senties. A défaut d’être révolutionnaire, le découpage du film est également assez kinétique, donnant une énergie interne et une certaine production value à un film de SF qui a parfois les yeux plus gros que le ventre (voir le crash de la station Mir, expédié en un plan, ou la poursuite à moto, qui devait sans doute avoir de la gueule dans l’imagination des programmeurs), tout en ménageant quelques batailles spatiales spectaculaires.

Crédibilité en chute libre

Les prisonniers menés par Alex et Heydell (Joseph Gilgun) prennent les armes. Dans l’espace ?

Il faut bien cela pour racheter l’insondable bêtise du scénario, qui nous promet cinq cents détenus en colère alors qu’ils ne sont finalement qu’une dizaine à bouger leur derrière, invente la chute libre dans l’espace (moment WTF de l’année), redonne un nouveau sens à l’expression « McGuffin inutile » en plus de télégraphier ses rebondissements un quart d’heure à l’avance. Bref, on est loin, si loin d’un chef d’œuvre qu’on aperçoit même pas un filament de McTiernan dans le ciel, mais Lockout n’est après tout qu’un produit inoffensif, qui n’a jamais été mis en branle avec l’intention de révolutionner le 7e art. Non, ça, Besson veut le faire avec sa Cité du Cinéma à Saint-Denis. On a hâte (nan, vraiment) de voir le résultat.


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Deuxsurcinq
Lockout
De James Mather et Stephen StLeger
2012 / France / 96 minutes
Avec Guy Pearce, Maggie Grace, Vincent Regan
Sortie le 18 avril 2012
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