Samaritan : super Sly, petits moyens
Sylvester Stallone s’essaie avec Samaritan au film de superhéros familial. Pour un résultat assez anecdotique.
Pour ceux qui ont suivi son parcours avec un intérêt jamais démenti, tandis qu’une bonne partie du public gardait en mémoire les détournements « ramboesques » ou « rockyesques » et sa marionnette des Guignols, la deuxième partie de carrière de Sylvester Stallone a eu des airs de revanche après une bonne décennie de vaches maigres. Une franchise en mode fan service (les Expendables), une nomination aux Oscars pour l’increvable Rocky dans Creed, un adoubement tacite par la nouvelle génération biberonnée au MCU avec Les gardiens de la galaxie 2… À défaut de prendre beaucoup de risques, Sly a su rester dans le coup, éviter de sombrer comme beaucoup de ses congénères dans la prison du DTV de fin de soirée torché par des aveugles, où il a failli un temps s’abîmer avec les suites d’Escape Plan. Stallone est encore bien là et pour le prouver, quoi de mieux que de s’essayer au film de superhéros ? Avec Samaritan, le vétéran de l’action se le joue néanmoins modeste, le résultat se situant clairement en dessous des références qu’il convoque.
Rencontre avec Joe Smith
S’il y a un domaine dans lequel Samaritan excelle, c’est la peinture de sa mégapole fictive, Granite City (en réalité Atlanta, qui accueille de nombreux tournages tout au long de l’année). Une cité grisâtre en plein délabrement et livrée au banditisme, dans lequel grandit Sam (Javon Walton, sympathique, mais limité), un jeune garçon des cités en passe de tomber dans la petite délinquance. Comme beaucoup d’adolescents à l’imagination débridée, Sam vénère le Samaritain, un héros doté d’une force herculéenne qui fit régner la justice il y a 25 ans avant de disparaître en même temps que sa némésis, son frère jumeau surnommé, hum, Nemesis. Sam reconnaît suite à un passage à tabac le superhéros disparu, en la personne de son voisin Joe Smith (oui, le nom est un indice), un éboueur solitaire et grincheux (Stallone, bien sûr). Taiseux, mais toujours coriace, Joe va sortir de l’ombre alors qu’un chef de gang local, Cyrus (Pilou Asbaek, qui fait ce qu’il peut avec un personnage peu passionnant) entreprend de poursuivre l’œuvre de Nemesis en jetant une bonne fois pour toutes Granite City dans le chaos…
« L’acteur et producteur a depuis longtemps l’âge de jouer les mentors fatigués, au dos usé par les épreuves physiques, mais dont l’œil brille toujours d’une rage de corriger. »
Vous pourrez reconnaître, dans cette histoire, ce décor, ces personnages, les bribes des scénarios d’Incassable, The dark knight rises et même d’À la rencontre de Forrester (influence déclarée du réalisateur Julius Avery) ou d’anciens films de Stallone lui-même, comme Rocky V. L’acteur et producteur a depuis longtemps l’âge de jouer les mentors fatigués, au dos usé par les épreuves physiques, mais dont l’œil brille toujours d’une rage de corriger les tyrans et protéger les faibles. Les héros positifs et contrariés, c’est le superpouvoir originel de l’acteur, qui n’a pas besoin d’en dire et d’en faire beaucoup (c’est qu’il n’est plus tout jeune) pour imposer sa présence mythologique et physique à l’écran. Plus second rôle que tête d’affiche, Sly est bien l’atout maître de Samaritan, celui autour duquel tous les dialogues gravitent, à la faveur d’un twist visible à des kilomètres (et d’un rajeunissement numérique pas dégueu). Seulement, le film doit composer avec des moyens visiblement serrés, même s’il s’agit d’une production MGM. La « menace » représentée par Cyrus et son marteau magique (sic) est réduite à sa plus simple expression, les décors semblent interchangeables, les scènes d’action restent rares et sans éclat. Avec son fil narratif simpliste (à hauteur d’enfant, finalement) et ses dialogues bêtement explicatifs surlignant au marqueur rouge chaque émotion, Samaritan vise clairement un public jeune et familial. Ce qui n’a rien de honteux en soi, mais il y avait moyen d’attendre plus d’une incursion de la star dans ce genre populaire.