Come to Daddy : Elijah Wood et le père mystère
Signée par le producteur de Turbo Kid, Come To Daddy confronte Elijah Wood à un paternel hostile… Une série B inclassable, brutale et plutôt réjouissante !
Les relations entre un père et son fils, particulièrement lorsque leur histoire implique un abandon familial, peuvent se révéler extrêmement dramatiques et complexes. Elles fournissent quoiqu’il arrive des matériaux de premier choix pour la fiction, mais Come to Daddy se penche sur ce thème de manière, disons, inattendue et drôlement déroutante. Loin d’être un simple drame sur l’incommunicabilité patriarcale, le premier long-métrage du Néo-Zélandais Ant Timpson, principalement connu pour être l’instigateur de l’anthologie ABC’s of Death et le producteur de délicieux films de genre comme Turbo Kid, Deathgasm ou Housebound, se révèle être un sacré mash-up d’ambiances contrastées, où il fait lentement mais sûrement basculer son histoire dans la série B horrifique et criminelle. Un film en forme de poupées russes qui peut s’appuyer, pour faire passer la pilule de ses passages les plus gore, sur un Elijah Wood de compétition.
Come to Daddy ne tarde pas à planter le décor. S’ouvrant sur deux citations induisant déjà un décalage humoristique (l’une est de Shakespeare, l’autre… de Beyoncé), le film nous propulse dans les pas de Norval (Wood, absolument parfait), trentenaire californien affublé des signes caractéristiques du hipster fragile. Moustache impromptue, coupe de cheveux impossible, smartphone « édition limitée » à la main et ligne de vêtements au diapason, Norval est comme un poisson hors de l’eau dans cette jolie côte forestière de l’Oregon où il débarque avec sa valise. Il répond à l’invitation de son père, qu’il n’a pas vu depuis 30 ans et qui vit dans un pavillon en forme d’OVNI avec vue circulaire sur l’océan. À son arrivée, Norval est confronté à un paternel (Stephen McHattie, l’œil toujours aussi torve depuis Pontypool), aussi étonné qu’agacé de voir cet auto-proclamé DJ craintif sonner à sa porte. Alcoolique, colérique et sarcastique, le padre va faire regretter Norval d’avoir fait le voyage, jusqu’à ce qu’un événement inattendu fasse tout basculer…
Paternelles Affaires
Comme il le mentionne de manière provocatrice dans le générique de fin, l’idée de Come to Daddy est venue à Ant Timpson après le décès de son père. Et il y a, c’est vrai, une forme de tristesse sous-jacente et un message d’espoir pour les réconciliations impossibles dans cette exploration bisseuse des sombres secrets d’une famille déchirée en son cœur. Ce n’est pas la moindre des qualités du film que de parvenir à dévoiler progressivement ses cartes mélodramatiques tandis que le scénario s’enfonce dans une forme de folie furieuse teintée d’un humour noir salvateur, empilant des rebondissements absurdes et brutaux qui évoquent autant les frères Coen que Bong Joon-ho ou un jeune Peter Jackson.
« Le scénario s’enfonce dans une forme de folie furieuse, empilant des rebondissements qui évoquent autant les frères Coen que Bong Joon-ho. »
Tantôt angoissant, tantôt hilarant (la meilleure scène du film tourne autour d’une relation avec Elton John dont nous tairons l’enjeu), tantôt mélancolique, lorsque Norval, alcoolique repenti, retombe dans ses travers après avoir rencontré une policière compatissante (Madeleine Sami, vue dans Slow West), Come to Daddy fait feu de tout bois jusqu’à un dernier acte excentré qui convainc un peu moins. Trop de nouveaux personnages, trop de flagrantes incohérences et de circonvolutions tombant à plat, le film prend le risque de finir exsangue, avant qu’une conclusion nous ramenant à l’ambiance douce-amère de la première demi-heure boucle joliment le voyage. Une note finale convaincante pour une première œuvre globalement réjouissante, dotée d’une belle photo signée Daniel Katz, et portée par un casting aussi expérimenté que surmotivé.