On avait dressé, à l’occasion de la sortie d’Oblivion, l’inventaire de ce qui attendait les spectateurs en matière de science-fiction cette année : un véritable festin de projets originaux, comme si le triomphe d’Avatar ou l’annonce d’un Star Wars épisode VII signifiaient tout d’un coup le début d’un nouvel âge d’or du genre. Alors que les titres les plus proches de nous se sont déjà révélés via de multiples posters, spots, affiches et featurettes spoilerisantes au possible, quelques longs-métrages jouaient encore la carte du mystère. Si le voile est loin d’être complètement levé sur, entre autres, le nouveau Riddick, trois films ont lâché d’intrigantes premières images ces derniers jours.
Perdus dans l’espace
Parmi eux, le plus intéressant s’avère être Gravity le nouveau film d’Alfonso Cuaron. Cela fait maintenant sept ans que le réalisateur mexicain a livré l’époustouflant Les fils de l’homme, film d’anticipation techniquement, artistiquement et thématiquement impressionnant, qui n’avait malheureusement pas rencontré son public sur l’instant. Le culte a toutefois grandi au fil des années, et l’annonce d’un nouveau film de SF, cette fois centré sur un angoissant voyage dans l’espace, a rapidement entraîné une certaine impatience. Pendant longtemps, la Warner et le cinéaste ont choisi la méthode du black out médiatique pour faire monter la pression autour de Gravity, laissant le pitch (deux astronautes, un homme et un femme, se retrouvent littéralement perdus dans l’espace lorsque leur station explose suite à une collision avec un astéroïde) et les ambitions démesurées de l’artiste parler pour lui. C’est que Cuaron place la barre à une hauteur stratosphérique avec ce projet dont les premières séquences montrées dans des salons professionnels ont fait baver d’envie des pointures comme James Cameron et Guillermo del Toro. Composé en majeure partie de très longs plans-séquences (le premier plan durerait à lui seul 17 minutes, sans les astuces de montage qu’on pouvait par exemple trouver dans Snake Eyes), entièrement tourné en images de synthèse, immédiatement converties en 3D, Gravity vise l’immersion pure et dure, à tel point qu’on peut s’attendre à une expérience aussi angoissante que fascinante techniquement (à ce titre, l’article paru sur Capture Mag résume bien l’ampleur du défi que s’est lancée l’équipe du film).
Le tout premier teaser mis en ligne jeudi dernier se concentre donc sur cette fameuse scène de la catastrophe et la panique qui s’ensuit parmi les astronautes, soudainement propulsés dans le vide intersidéral, sans chance visible de pouvoir survivre. On reconnaît sous les casques les visages des deux stars du film, George Clooney et Sandra Bullock, qui seront les seuls protagonistes durant deux heures. Les premières images rappellent forcément Mission to Mars, qui contenait une scène similaire, mais l’approche résolument inédite de Cuaron, qui multiplie les cadrages en vue subjective et les plans d’ensemble photoréalistes, nous emmène visiblement sur un autre territoire. Gravity a l’ambition de nous téléporter dans l’espace, en apesanteur (la 3D se justifie pour une fois pleinement sur ce point), harnachés aux côtés de héros passant par divers stades d’émotions universelles : émerveillement, angoisse, peur, envie de survivre… Le décollage est prévu le 23 octobre prochain.
Tu seras un sauveur, mon fils
Plus classique, mais sans doute tout aussi spectaculaire, l’adaptation du roman d’Orson Scott Card, La stratégie Ender, promet d’être un blockbuster « dans la tradition », avec ce que cela comporte de certitudes et de craintes (généralement toujours confirmées dans une certaine mesure). D’un côté, le matériau de base est d’une richesse telle – six romans sont parus faisant partie du Cycle d’Ender, sans compter les six autres formant la parallèle Saga des ombres – qu’on peut au moins espérer un film riche en rebondissements et personnages mémorables, à l’image du héros en titre, Ender, jeune garçon entrainé dès son plus jeune âge à devenir rien de moins que le sauveur de l’humanité. Orson Scott Card a créé avec son œuvre un univers très original, complexe et à la morale ambiguë, qui tourne autour de la guerre que se livrent les forces terrestres et une espace alien projetant de les envahir. De l’autre, le trailer laisse penser que les producteurs ont surtout retenu de cet univers l’aspect initiatique du récit, laissant un peu de côté les jeux de pouvoir et la cosmogonie très détaillée des romans, qui abordaient entre autres les thématiques de l’eugénisme ou de l’enfance sacrifiée de manière très pointue. On s’attend à vrai dire à une sorte de Hunger Games dans les étoiles, taillé pour le public adolescent, avec un ton « tragique mais pas trop » dupliquant la prélogie Star Wars (très populaire auprès des kids rappelons-le) et faisant d’Ender un duplicata positif d’Anakin Skywalker. À titre de comparaison, l’enfant du livre a 6 ans, alors qu’Ender est ici déjà un ado.
Peut-être se trompe-t-on. L’ « academy award » casting est après tout assez solide, d’Asa Butterfield (Hugo Cabret) dans le rôle-titre à un Ben Kingsley couvert de tatouages en passant par Hailee Steinfeld (la révélation de True Grit) et Harrison Ford dans le rôle-clé du colonel Graff. Le directeur artistique, Sean Haworth est un vétéran éclairé du genre, puisqu’il a notamment travaillé sur Tron – l’héritage, Avatar et Thor. Mais on ne misera quand même pas une main tout de suite sur une production Summit Entertainment, les génie derrière la franchise Twilight ou Sublimes créatures, réalisée par cet ex-prodige-nouveau-mercenaire de Gavin Hood (X-Men origins : Wolverine). Ce space opéra, prélude à une possible saga, sortira en tout cas le 6 novembre chez nous.
Objectif quatrième lune
On termine ce tour d’horizon spatial avec la petite inconnue du lot, Europa Report. À la manière de Prometheus, les producteurs de ce film de SF tourné sous le radar du côté de Brooklyn s’appuient sur le marketing viral pour en révéler un peu plus sur l’histoire et le contexte du film, via le site www.europaventuresllc.com qui présente les activités d’une société fictive, dont le slogan latin « Post tenebras lux » est en soi assez révélateur. Il est question dans ce film de Sebastian Cordero (Investigations) d’un voyage spatial en direction de la quatrième lune de Jupiter, Europa, sur laquelle des traces de vie pourraient être trouvées sous des océans glacés. Sur place, les six astronautes formant l’équipage international du vaisseau vont bien sûr passer de l’excitation de la découverte à la terreur, et tomber sur une forme de vie qui s’avère tout sauf amicale…
Le moins que l’on puisse dire en découvrant les premières images du film, c’est qu’Europa Report ne joue pas la carte de l’originalité, avec un pitch qui évoque beaucoup le sympathique mais très bancal Apollo 18, ainsi que le très Z Red Planet. La parenté avec le film de Gonzalo Lopez-Gallego est d’autant plus criante que Cordero a adopté pour l’occasion l’esthétique du found footage, qui permet à ce genre de production d’économiser plein de sous en comblant les trous avec des plans secoués qui ne servent à rien (on peut déjà supposer qu’une bonne partie de l’action se déroulera dans la navette et pas sur Europa). Explorer des planètes lointaines du point de vue d’une caméra-casque ou d’un moniteur de surveillance est une perspective assez peu excitante… Mais bon, ne soyons pas mauvaises langues. Personne n’est à l’abri d’une surprise (personne !), et en plus le casting s’avère plutôt classe, puisque Sharlto Copley (District 9 et bientôt Elysium) et Michael Nyqvist (la trilogie originale Millenium) font partie du voyage.
On devrait en savoir plus sur cette mystérieuse expédition le 27 juin, date de sortie américaine prévue pour le film. Aucune date de sortie n’a pour l’instant été annoncée côté français.