Nacho Vigalondo fait partie de ces cinéastes espagnols dont on attendait le deuxième film avec impatience. Pour confirmer ce talent, indéniable, de conteur pas comme les autres, découvert dans son pays avec ses nombreux court-métrages, et dans le monde avec l’étonnant Cronocrimenes, alias Timecrimes. Un exercice de détournement atypique des codes de la science-fiction, sur un thème rebattu (le voyage dans le temps) sur lequel beaucoup de réalisateurs se cassent les dents, faute de pouvoir résoudre ses paradoxes inévitables – même les Terminator de James Cameron, dans une certaine mesure, ne résistent pas à une remise en cause scientifique de leur timeline. Trois ou quatre protagonistes, un décor modeste mais très bien exploité, des surprises toutes les cinq minutes, et un cynisme jamais accusateur – Vigalondo ne juge pas ses personnages, laissant leurs actes parler pour eux – caractérisaient cette vraie réussite, transformant instantanément le cinéaste en auteur à suivre.
Quatre ans plus tard, Vigalondo prend une fois de plus les clichés d’un genre (l’invasion extraterrestre) à rebours, en y plaquant les ingrédients qui ont fait son succès. Comme son nom l’indique, Extraterrestre parle donc de soucoupes volantes, qui un beau matin viennent stationner façon District 9 au-dessus des grande villes d’Espagne. De leurs intentions, on ne saura rien, car Vigalondo restreint l’action à un pâté de maison déserté, plus précisément d’un appartement, où quatre personnages (la femme, le mari, l’amant et le loser jaloux), voient leur quotidien chamboulé non pas par ce silencieux débarquement, mais par leurs affaires de cœur.
Ménage à quatre… plus la soucoupe
Le héros, Julio, découvre en effet que son aventure d’un soir, Julia, est déjà casée avec Angel, qui revient sans prévenir à la maison malgré les quarantaines mises en place par l’armée. S’y ajoute le voisin, Carlos, rondouillard et inquiétant, qui brûle d’un amour non partagé pour Julia. Le vaudeville est en place pour une série de quiproquos à la fois absurdes et irrésistibles, qui reposent non pas cette fois sur des claquements de porte, l’arrivée du facteur ou la perspective d’un héritage, mais sur ces fameux ET, dont Angel pense qu’ils prennent la forme d’être humains. Aveuglé par sa paranoïa, il ne voit pas que Julio et Julia, coincés dans cet appartement, tombent peu à peu amoureux.
Vigalondo signe donc contre toute attente une véritable comédie romantique de science-fiction. Peut-être trop maniériste, trop malin pour son propre bien, le réalisateur fait malgré tout preuve d’un talent certain pour peaufiner un scénario aux petits oignons, tout en résonances et jeux sur la perception. L’histoire menace toujours de tomber dans le gag facile, notamment à travers le personnage de Carlos, mais choisit toujours l’option de l’intelligence, de la réplique qui fait mouche. On aimerait voir nos chers auteurs français, qui ne rechignent jamais à investir des T5 dans Paris pour y tourner leurs mélodrames, s’essayer à ce type de récit de genre minimaliste mais tellement original, fusionnant des archétypes opposés pour donner naissance à un univers aussi unique et original.
Que le couple soit plus préoccupé par son coup de foudre que par l’astronef aperçu à leur balcon n’est certes pas très réaliste. Et pourtant, le parti-pris théâtral du film fonctionne à chaque instant, chacune des révélations typiques du genre (la zone de quarantaine interdite, le coup du body snatcher, la mise en place d’un réseau de résistance) étant utilisée à des fins intimistes, comme un moyen grandiloquent de contourner le côté gnangnan de la romance. In fine, Extraterrestre choisit un ton doux-amer pour clore son aventure, affirmant avec un sourire qu’il faut parfois l’intervention d’un événement intergalactique pour que les hommes expriment enfin leurs sentiments.
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Extraterrestre (Extraterrestrial)
De Nacho Vigalondo
2011 / Espagne / 90 minutes
Avec Julian Villagran, Michelle Jenner, Carlos Areces
Sortie prochainement
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Je n’ai malheureusement eu le temps de ne voir qu’un film au PIFFF, et c’était Extraterrestre. Je suis vraiment bien tombé ^_^
Effectivement, c’est un des meilleurs films de la sélection, mais il y avait d’autres perles à découvrir. La suite des critiques arrive…