Rencontre avec Luis Tosar : « Je ne dessine pas de limite entre citoyen engagé et acteur »

par | 30 mars 2023

Rencontre avec Luis Tosar : « Je ne dessine pas de limite entre citoyen engagé et acteur »

Star ibérique passionnante et charismatique, Luis Tosar était invité en mars au Festival du cinéma espagnol de Nantes. Rencontre !

Véritable institution de la vie culturelle nantaise, le Festival du cinéma espagnol fête cette année sa 32e édition. Outre les 70 longs et courts-métrages projetés entre le 23 mars et le 2 avril, la manifestation a conservé la bonne habitude d’inviter les plus grands artistes espagnols. En 2023, la tête d’affiche est Luis López Tosar, qui promène son jeu intense et son charisme bourru sur les écrans de la péninsule depuis bientôt 25 ans. Lauréat de 3 Goyas entre 2003 et 2010, l’acteur et producteur de 51 ans a joué dans plus d’une centaine de films et séries, après avoir explosé aux côtés de son ami Javier Bardem dans le drame Les Lundis au soleil. De Miami Vice – Deux flics à Miami (son seul grand rôle aux USA) au récent Code Emperor, Tosar est devenu une figure récurrente du film de genre, avec des titres aussi remarqués que Cellule 211, Malveillance, Gun City, Appel inconnu, Insiders, El Nino, Musaranas, Toro, Braquage Final, Sky High ou Eye for an eye – des films majoritairement exploités en vidéo chez nous.

Itinéraire d’un enfant de Galice

Rencontre avec Luis Tosar : « Je ne dessine pas de limite entre citoyen engagé et acteur »

L’un des visages les plus populaires de son pays, Luis Tosar ne se résume pas à ses rôles musclés ou inquiétants, comme le prouvent ses incartades dans la comédie, son rôle à venir dans l’excellent drame social À contre-temps (En los margenes) aux côtés de Penelope Cruz, ou son travail avec la réalisatrice Iciar Bollain, qui l’a fait débuter en 1998 et l’a dirigé récemment dans Les Repentis, où il joue un ancien terroriste de l’ETA en prison pour assassinat. « Elle m’a toujours offert des défis d’interprétation, des personnages complexes. Mais le cinéma, c’est aussi ça, ne pas se reposer sur ses lauriers ! », explique-t-il.

Invité par l’équipe du festival à analyser son travail lors d’une rencontre avec le public, Luis Tosar s’est prêté au jeu avec une bonne humeur et une simplicité déconcertante. Le comédien est revenu sur ses débuts, lui l’enfant de Galice que rien ne prédestinait à une carrière dans le monde artistique. « C’est un de mes professeurs qui m’a conseillé de faire du théâtre, et ça a été déterminant », a-t-il raconté. « Après le bac, je suis allé à Saint-Jacques de Compostelle parce qu’il y avait plus d’opportunités sur place pour faire du théâtre, c’est là que j’ai eu mes premières opportunités de travail. J’ai fait littéralement le clown dans des mariages ou des anniversaires. » 

Une personnalité engagée

Rencontre avec Luis Tosar : « Je ne dessine pas de limite entre citoyen engagé et acteur »

D’autres auraient pu renoncer, mais l’apprenti acteur, accro aux planches et au jeu, a au contraire pris le temps de maîtriser son art. « Comme n’importe quel métier, il faut sacrifier beaucoup d’heures, car c’est le travail qui permet de rentrer dans un rôle, pas une quelconque inspiration divine. » Avec le temps et les rôles qui s’accumulaient, Luis Tosar a engrangé de la confiance et joué plus facilement les têtes d’affiche. « J’ai eu l’opportunité, parce que j’ai eu la chance de travailler régulièrement, d’épurer mon jeu de comédien, pour pouvoir arriver à l’objectif émotionnel que je cherche », convient-il. « Je sais juste comment y arriver. »

« Les plateaux de tournage sont des endroits magiques
et c’est un privilège de pouvoir vivre ça. »

Reconnu par la critique et le public, Luis Tosar est aussi réputé pour son engagement culturel (en faveur de la langue et des coutumes de Galice) et social – quand le cinéma peut être porteur de messages forts, l’acteur est d’autant plus motivé. « Je ne dessine pas de limite entre citoyen engagé et acteur. Quand je suis sur un plateau, j’amène tous les Luis avec moi ! », a-t-il lancé avec un large sourire. « Je me sens plus confortable avec des films qui peuvent changer les choses, changer notre manière de penser. À contre-temps, par exemple, remet au premier plan le thème des expulsions – il y en a aujourd’hui 100 par jour en Espagne – qui avait disparu de l’actualité. Les Lundis au soleil est également un film toujours pertinent. »

L’accro des plateaux

Rencontre avec Luis Tosar : « Je ne dessine pas de limite entre citoyen engagé et acteur »

Depuis ses débuts en 1998, Luis Tosar a connu peu de périodes creuses dans sa carrière cinématographique. Pourtant, la lassitude n’est toujours pas à l’ordre du jour : « Cela pourrait devenir routinier, mais il y a trop de différences entre chaque tournage pour que je me lasse. J’adore cet esprit de communauté sur un plateau, où l’on rencontre et vit intensément avec des gens passionnants, pour un temps limité. Je garde plus en moi les souvenirs de tournage, comme celui des Lundis au Soleil, que les personnages eux-mêmes, car je déconnecte facilement quand la caméra ne tourne plus. Ce sont des endroits magiques et c’est un privilège de pouvoir vivre ça. » Le comédien s’avoue en revanche peu adepte des bains de foule, et préfère garder du temps pour sa famille (il est marié avec l’actrice chilienne Maria Luisa Mayol).

Son emploi du temps chargé (il a depuis À contre-temps joué dans deux autres longs-métrages, dont Todos los nombres de Dios – photo ci-dessus) ne l’empêche pourtant pas de confesser, en réponse à une question du public, avoir un intérêt naissant pour d’autres disciplines. « Jusqu’à aujourd’hui je n’ai pas ressenti la nécessité de passer derrière la caméra », a-t-il commencé. « Mais cette envie m’a titillé récemment, je dois être honnête. Mais bon… c’est un travail de titan, réalisateur ! » Avec une personnalité aussi forte et éclectique dans ses choix que la sienne, on serait effectivement très curieux de voir à quoi ressemblerait un film réalisé par Luis López Tosar !

Plus d’infos : www.cinespagnol-nantes.com