The Hunt : les bons et les mauvais chasseurs…

par | 22 avril 2020

Relégué en VOD, The Hunt propose un peu plus qu’une simple série B, avec ses relents politiques et satiriques.

Certains inédits vidéos ne méritent pas leur sort. Prenons The Hunt par exemple. Cette satire de la société américaine ultra violente, réalisée par Craig Zobel (Compliance) et écrite par le duo Nick Cuse et Damon Lindelof (qui s’est récemment à nouveau distingué avec la série Watchmen), présentait pourtant un intérêt non négligeable. Manque de bol, Universal Pictures a repoussé sa sortie pour des raisons morales après des tueries de masse survenues aux États-Unis, il y a quelques mois, et un tweet agacé de Donald Trump. Ajoutez à cela la crise du coronavirus qui accable le monde et le long-métrage se retrouve directement catapulté en VOD. Et si tous ces malheurs nous offraient l’occasion de le découvrir depuis notre canapé, faute de salles et d’expérimenter en même temps une plateforme de VOD méconnue, Rakuten TV ? Pourquoi pas, si vous savez où vous mettez les pieds.

Tirez sur les pro-armes !

Le concept de départ de cette chasse originale est de transformer des soutiens actifs du parti Républicain, présentés de façon caricaturale et bovine comme des victimes lâchées dans une campagne inconnue, en ersatz de sangliers lors d’une chasse à courre sanglante. Les chasseurs, nous le comprenons rapidement, se placent en opposition idéologique et politique à leur proie et incarnent, d’une façon tout aussi caricaturale, les sympathisants démocrates d’une condescendance sans bornes. Ainsi, les électeurs de Trump toujours enclins à soutenir le port des armes se retrouvent ainsi massacrés par ceux qu’ils considéraient comme faibles. Dès son postulat de départ, The Hunt laisse présager un joli défouloir, pas aussi fin que Get Out, certes, mais dans un esprit tout aussi jouissif. Il rappelle également, et inévitablement, Les Chasses du comte Zaroff (1934), mais il s’agit d’une fausse piste.

« The Hunt laisse présager un défouloir, pas aussi fin que Get Out, certes, mais dans un esprit tout aussi jouissif. »

Nick Cuse et Damon Lindelof ont imaginé une tournure inattendue pour leur scénario. Ils renvoient ainsi dos à dos les deux camps dans leurs pires retranchements et balance de douloureuses attaques. Très vite évidemment, les chasseurs deviennent les chassés. La morale misanthrope du film se place dans un entre-deux énervé, mais qui n’offre aucun compromis, comme un gigantesque doigt d’honneur lancé à la société américaine, sclérosée et irréconciliable. Avec sa confrontation entre deux styles de vie, sa lutte des classes avec des riches qui dépensent leur argent en s’attaquant aux plus pauvres pour le sport, et émergences des contradictions de notre époque, symbolisée par la propagation des théories du complot, The Hunt force le trait et pique les organes vitaux.

Est-ce que c’est ma guerre ?

L’héroïne malgré elle, kidnappée depuis chez elle dans le Mississippi et chassée sur un territoire inconnu, tente de savoir ce qu’elle fait dans cette galère. Elle tente de se sortir, par tous les moyens et surtout les plus sanglants, avec une détermination froide de ce mauvais pas et retourner chez elle vivante. La prestation de Betty Gilpin (Glow), sorte de Rambo au féminin (ou un mix entre Sarah Palin et un GI), pas dépourvue de rictus inquiétants et de mimiques malaisantes, est un atout indéniable tant elle nous laisse pantois.

Comme souvent dans une série B, l’histoire peine à atterrir et à retomber avec grâce sur ses pieds. The Hunt ne soigne pas sa résolution avec une confrontation brutale mais clichée et sans saveur. Chers messieurs, sachez que toutes les dames de gauche ne sont pas brunes et que toutes les femmes de droite ne sont pas blondes comme les blés. Malgré sa conclusion à revoir, cette diatribe divertissante et peu banale en surprendra plus d’un.