The Old Guard : le Highlander du pauvre

par | 9 juillet 2020 | À LA UNE, Critiques, NETFLIX

The Old Guard : le Highlander du pauvre

Malgré une Charlize Theron badass à souhait, The Old Guard rate sa cible et ressemble surtout à un pilote de série TV terne et générique.

L’histoire de la transformation de Charlize Theron en héroïne ultra-charismatique de films d’action s’est faite par infusion lente. Oscarisée en 2003 pour Monster, l’actrice sud-africaine a voulu mettre une première fois un pied dans le genre de l’adaptation de comic-book vitaminée en 2005 avec Aeon Flux de Karyn Kusama. Ce sera un échec cuisant et il faudra attendre près d’une décennie, et la concrétisation du rêve fou d’un vétéran australien, pour que Theron obtienne le rôle de Furiosa. Avec Mad Max : Fury Road, Charlize Theron a changé de dimension, au point que certains s’étonnent encore de ne pas la revoir dans la préquelle annoncée du chef d’œuvre de George Miller, consacré aux jeunes années de la guerrière iconique. La voir starifiée cet été dans une nouvelle adaptation de BD comme The Old Guard n’a désormais plus rien d’étonnant. Productrice du film, réalisé comme Aeon Flux par une femme, Gina Prince-Bythewood, Charlize Theron en est l’attraction principale… Et sans doute aussi le seul atout, tant ce mix annoncé entre Highlander et X-Men risque de prendre rapidement la poussière.

Vivre et faire beaucoup mourir

The Old Guard : le Highlander du pauvre

Le postulat de The Old Guard est proche en tous points de celui des aventures de Connor McLeod. Le film met en scène une poignée d’immortels, « La vieille garde », qui s’est rassemblée au fil des siècles pour améliorer, une mission après l’autre, l’avenir de la planète, en débarrassant l’humanité de ses pires représentants. Ils ne savent pas quand leurs blessures arrêteront de guérir, mais en attendant, les décennies passent. La patronne du groupe, Andromaque de Scythe, ou « Andy » (Charlize, avec une coupe courte des plus seyantes – similaire, tiens donc, à celle d’Aeon Flux) est aussi la plus ancienne. Elle peut compter sur l’appui de Sebastian (Matthias Schoenaerts), Nicky (Luca Marinelli) et Joe (Marwan Kenzari) alors que l’escouade est pourchassée par un groupe pharmaceutique avide de percer le secret de leur invulnérabilité. L’étau se resserre, tandis qu’Andy apprend l’existence d’une nouvelle immortelle partageant leur pouvoir, Nile (Kiki Layne), qui va s’avérer d’une grande aide dans leur combat…

« Tout l’héritage d’Highlander est ici repris pour bâtir une mythologie branlante et minimaliste. »

Plus que les mutants de Marvel, auxquels cette caste de loups solitaires persécutée à travers l’Histoire peut faire penser, c’est bien le classique de Russel Mulcahy avec Christophe Lambert qui est invoqué sans gêne dans The Old Guard : des scènes en costume (ridicules) revenant sur le passé de guerrière d’Andromaque à un monologue de Sebastian reprenant à la lettre les dialogues de Connor McLeod, en passant par l’utilisation anachronique d’énormes épées et haches dans les scènes de combat, tout l’héritage d’Highlander est ici repris pour bâtir une mythologie branlante et minimaliste – à tel point que les images de l’escouade prise en photo incognito lors de grands évènements historiques suscitent plus de mystère et d’excitation que l’action elle-même. Grâce à son matériau graphique, le film de Gina Prince-Bythewood possède sa propre identité, mais cela ne veut pas dire que le résultat ait quoi que ce soit d’inédit. Seul le principe repris de la BD de l’avenir incertain – aucun immortel ne sait quand son pouvoir s’en ira et quand sa mort viendra – vient apporter une once de nouveauté à ce qui s’apparente à une resucée paresseuse de multiples mythes fantastiques.

Un spectacle timide et sans surprises

The Old Guard : le Highlander du pauvre

Ce qui semble plus étonnant en découvrant ce qui s’apparente tout au plus, en terme de rythme, de présentation sommaire des personnages et d’écriture, à un pilote de luxe pour une hypothétique franchise / série télévisée, reste le manque d’énergie de l’ensemble. Jamais excitant, rarement spectaculaire, The Old Guard multiplie lors de ses (rares) scènes d’action les chorégraphies supposément virtuoses à la John Wick, censées montrer la complémentarité de ce commando littéralement vieux comme le monde. Mais le découpage quelconque, l’abondance de décors anonymes, les figurants hébétés qui servent de punching-balls pour les héros, le charisme tout relatif qui caractérise le casting (seuls Theron et Schoenaerts parviennent à donner du poids à leurs personnages, et on ne parle même pas du bad guy ridicule jusqu’à son dernier râle) font que les bâillements polis remplacent vite les décrochages de mâchoire espérés. Gina Prince-Bythewood peut bien ajouter quelques gerbes de sang dans l’équation ou une sous-intrigue sur une ancienne sœur d’armes d’Andromaque (dont on voit venir le dénouement depuis l’horizon), rien n’y fait : The Old Guard, sans ennuyer, reste dans l’impasse. Un film moins désagréable qu’inutile, constamment en deçà des promesses induites par son concept. L’impériale Charlize Theron mérite définitivement mieux…