The Trip : les liens sanglants du mariage
Noomi Rapace et Aksel Hennie se haïssent autant qu’ils s’aiment dans The Trip, jeu de massacre énergique et malpoli.
« Jusqu’à ce que la mort nous sépare », se promettent les mariés lorsqu’ils se passent mutuellement la bague au doigt. Lars et Lisa, les héros de The Trip, ont pris cette maxime un peu trop au pied de la lettre. Parce que leur couple bat de l’aile et qu’après quelques années d’un mariage malheureux, ils en sont venus à se détester plus que cordialement, l’apprentie actrice et le réalisateur raté ont tout simplement décidé de se débarrasser de leur conjoint… en même temps, lors d’un week-end prétexte dans le chalet familial. Cependant, leurs motifs ne sont peut-être pas aussi « romantiques » qu’ils le prétendent. Et Lars n’a pas assez envie de se salir les mains. Et surtout, surtout, leur séjour champêtre va être rapidement perturbé par quelques éléments incontrôlables…
Thérapie de couple express
Les histoires de mariages dégénérant en féroce bataille des sexes ont souvent débouché sur des films mémorables, dont fait par exemple partie La guerre des Rose (et dont ne fait pas partie le souvent cité M. et Ms. Smith). Détester sa moitié au point de ne pas seulement vouloir divorcer, mais la voir disparaître pour de bon et pourquoi pas en petits morceaux : une idée excessive que le nouveau film de Tommy Wirkola, revenu du succès public de Seven Sisters, a le bon goût de redynamiser avec l’énergie d’un sale gosse fan de Guy Ritchie dans The Trip. Comme chez le réalisateur de Snatch, l’histoire repose en partie sur un enchaînement de twists nécessitant de faire des allers-retours dans la narration. Le maître-mot du film est l’imprévisible (à ce propos, il est préférable ici de faire l’impasse sur la bande-annonce) et Wirkola et ses coscénaristes s’amusent à garder tout au long de ce jeu de massacre à la campagne leurs cartes en main, pour mieux relancer la machine et justifier les éclats de violence cartoonesque. Au fur et à mesure que des personnages secondaires, aussi bêta que brutaux, se joignent à cette foire d’empoigne, les scènes gore s’accumulent, jusqu’à rappeler que le réalisateur est avant tout connu pour avoir initié la franchise Dead Snow et ses zombies nazis.
« La suédoise Noomi Rapace et le norvégien Aksel Hennie sont de tous les plans et leur alchimie est évidente. »
Restons discrets sur les péripéties (pas si novatrices) qui attendent Lars et Lisa, pour préserver tout le sel de cette série B qui évoque par bribes les thrillers absurdistes des frères Coen, mais en demeure surtout un lointain cousin malpoli, cultivant le mauvais goût et les blagues régressives (à n’en pas douter, The Trip ferait en carton en séance festivalière). Wirkola est en terrain connu et cela se voit un peu : la mise en scène est au mieux fonctionnelle, pas loin d’être télévisuelle, mais ce manque de distinction visuelle est compensé par une générosité jamais prise en défaut dès qu’il s’agit de causer maquillages et hémoglobine. Duo terrible passant par une douloureuse thérapie de couple express, la Suédoise Noomi Rapace (à l’opposé total de son rôle dans le futur Lamb) et le norvégien Aksel Hennie (qu’on n’avait pas vu à telle fête depuis Headhunters) sont de tous les plans et leur alchimie est évidente. Le film étant conçu de manière bicéphale, le thriller cynique se métamorphosant d’une certaine façon en home invasion, leurs personnages passent par tous les stades émotionnels. C’est par la solidité de leur jeu que The Trip peut conserver sa cohérence et nous embarquer jusqu’à sa conclusion méta en diable (avec un dernier gag fabuleux en prime). Attention, par contre, ça tache !