Parce que le talent cinématographique des Scandinaves ne se limite pas au polar, le film catastrophe The Wave (Bølgen) mérite amplement que l’on s’y attarde. Aussi lourd de sens que The Impossible, bien plus inquiétant que 2012, le film n’échappe cependant pas aux clichés de ce genre plus ou moins inventé par les Américains, avant d’être décliné entre autres chez les Coréens et Japonais. Les Norvégiens sont confrontés eux aussi à des risques sismiques alarmants et ont décidé de faire passer le message de manière spectaculaire.

Accessible uniquement par bateau, la petite ville touristique de Geiranger est niché au cœur du fjord éponyme. Un environnement paradisiaque, désigné « plus belle destination de Norvège » par le Lonely Planet. Sur ses hauteurs, une magnifique montagne enneigée domine un plan d’eau en apparence paisible, confluent de la mer de Norvège et de l’océan Atlantique. Mais des géologues repèrent une faille sismique qui menace de fissurer la roche, provoquant un important tsunami qui ravagerait la région. Le problème est qu’il est impossible de prévoir une telle catastrophe. L’alerte peut survenir à n’importe quel moment. Pour les habitants, particulièrement attachés à leur fjord, et qui n’ont aucune envie de rejoindre une vie citadine, une question se pose : faut-il partir, même si la menace semble irréelle, ou rester et faire courir un risque à toute sa famille ? Cet intéressant et universel dilemme, qui trouve écho chez nous avec les récentes catastrophes côtières en Vendée, explique le succès faramineux du film dans son pays.

Les amateurs y trouveront leur compte…

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Présenté au Festival des Arcs et plus récemment au BIFFF, le film est réalisé par Roar Uthaug, qui se cache derrière la saga horrifique Cold Prey. Au scénario, nous retrouvons John Kåre Raake, auteur du film d’aventure familial Le Secret du Ragnarok mais aussi Harald Rosenløw-Eeg, qui a travaillé quant à lui sur L’Épreuve. Le moustachu Kristoffer Joner (pionnier dans The Revenant et mari violent dans Babycall) incarne un scientifique qui voit arriver avant tout le monde la catastrophe imminente. Il côtoie aussi Thomas Bo Larsen (vu récemment dans A second chance et dans La Chasse, et plus anciennement dans Festen et Pusher). En s’appuyant sur ce casting solide et un scénario crédible, puisque malheureusement inspiré de faits réels, Roar Uthaug bâtit un film catastrophe dans la veine de ses prédécesseurs, à la limite de l’hommage appuyé.

[quote_center] »Faut-il faire durer le suspens à ce point ? »[/quote_center]

Tel un bon vieux Pic de Dante version scandinave, The Wave installe petit à petit ses enjeux et fait monter doucement la sauce jusqu’à l’irruption de la fameuse vague qui va engloutir tout sur son passage. Force est de constater que pour son budget limité de 6 millions d’euros, les effets spéciaux de ce morceau de bravoure ne sont pas du tout honteux. Au contraire, ils feraient plutôt rougir certaines grosses productions de Roland Emmerich, parrain par défaut du genre ces dernières annés. Le déchaînement des éléments remplit pleinement son office et impressionne par sa maîtrise et son réalisme. Mais évidemment, après une si patiente introduction, cette scène méritait d’en donner pour leur argent aux spectateurs friands de destruction massive. Mais les bonnes choses ont une fin (sic), et passé ce désastre, The Wave est encore loin d’être arrivé à bon port.

… mais pas seulement !

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C’est justement au niveau des intrigues personnelles et des enjeux intimes que le bât blesse parfois dans The Wave. Le scénario adopte tellement bien la structure du film catastrophe qu’il ressemble parfois à sa propre caricature. L’histoire prend des raccourcis faciles (un géologue qui sait conduire un hélicoptère ?), des rebondissements cousus de fils blancs (faut-il étirer à chaque fois le suspens à ce point ?), des aberrations assumées (abandonner deux enfants dans une voiture pendant des heures, est-ce bien raisonnable ?) et des personnages secondaires construits pour préparer leurs inévitables décès (les touristes de l’hôtel tout droit sortis des Bidochons). Si cette facilité d’écriture multiplie les lieux communs, elle ne manque pas pourtant de mettre le doigt sur le véritable sujet du film : l’exode et le déracinement des populations en raison des menaces naturelles. Sur ce point, The Wave tape dans le mille et saura titiller la fibre paranoïaque qui sommeille en chaque spectateur.

Malgré ses innombrables clichés et un sérieux manque de rythme dans sa dernière ligne droite, The Wave est un divertissement crédible et bien construit. Pour faire pencher la balance dans ce bilan mitigé, ajoutons qu’il a été tourné dans un cadre grandiose, avec une photographie inspirée qui rend justice à la beauté de cette nature norvégienne, mais aussi à son imprévisible domination sur les hommes qui l’ont conquise…

[toggle_content title= »Bonus » class= »toggle box box_#ff8a00″]Une vue à 360° du fjord de Geiranger.[/toggle_content]


[styled_box title= »Note Born To Watch » class= » »]
Quatresurcinq

The Wave (Bølgen)
De Roar Uthaug
2016 / Norvège / 110 minutes
Avec Kristoffer Joner, Thomas Bo Larsen, Ane Dahl Torp
Sortie le 17 juillet 2016
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