Villains : bandits contre psychopathes

par | 13 février 2020

Un couple de braqueurs écervelés tombe sur un duo de vrais méchants dans ce prévisible Villains, sauvé par son quatuor d’acteurs motivés.

Dans la longue liste des amants braqueurs plus doués pour se déclarer leur flamme que pour faire parler la poudre, Mickey (Bill Skarsgard) et Jules (Maika Monroe) sont deux jeunes et beaux spécimens. Villains débute avec leur pathétique, mais au final concluante tentative de hold-up dans une station-service de rase campagne. Le duo jubile après ce coup de maître (qui a consisté entre autres à trouver la solution pour ouvrir le tiroir-caisse) à l’idée d’aller vendre des coquillages en Floride, mais l’émotion retombe quand Mickey s’aperçoit qu’il a oublié de faire le plein d’essence. Les amoureux se retrouvent en panne en pleine forêt , et à l’affut  d’une solution de sauvetage, qui prend la forme d’une maison cossue dont les occupants semblent absents. Surprise : il y a malgré tout une petite fille enchaînée dans la cave, et les propriétaires des lieux, George (Jeffrey Donovan) et Gloria (Kyra Sedgwick) sont de retour avant que le couple n’ait pu décider quoi faire. Mickey et Jules sont tombés sur un couple bien plus dingo et dangereux qu’ils ne pensaient l’être eux-mêmes…

Le crime, c’est mieux à deux

Une histoire de cambrioleurs tombant sur bien plus vicieux qu’eux, c’est une idée malicieuse que le cinéma a déjà plusieurs fois exploitée, de manière souvent mémorable comme avec Le sous-sol de la peur de Wes Craven et Don’t Breathe de Fede Alvarez. Les réalisateurs Dan Berk et Robert Olsen (qui se sont notamment fait les dents sur une séquelle restée inédite de Stake Land) poursuivent avec Villains dans cette même veine en créant un couple de personnages mystérieux prenant par surprise des héros aussi clairement en dehors des lois qu’ils sont attachants. Révélés respectivement par Ça et It Follows, les excellents Skarsgard et Monroe ont de l’alchimie à revendre et une expressivité qui cadre bien avec la dimension cartoonesque de ce huis-clos plein d’humour noir et d’excentricité. Face à eux, les vieux routiers (du cinéma comme de la télé) que sont Donovan et Sedgwick semblent avoir eu carte blanche pour camper un couple dont les frustrations communes et les valeurs datées les ont fait basculer d’un commun accord dans la folie. On échappe pas ici au cliché de la quinqua sexuellement et émotionnellement givrée, comme à celui du dandy à moustache sudiste (ressemblant drôlement à John Waters) cachant derrière ses manières surannées une mentalité de gros sadique dominant. Et pourquoi pas ? Villains paraît de toute façon peu intéressé par les notions de moralité, de fossé générationnel ou par les deux visions ambivalentes de l’amour fou qu’il propose. Ce qui compte, c’est de proposer un jeu de massacre divertissant à la hauteur de l’investissement des acteurs.

« Villains est un film qui manque paradoxalement de la folie nécessaire pour être mémorable. »

S’il peut sans souci compter sur son quatuor d’acteurs, dont le plaisir de se renvoyer la balle pour élire le plus idiot/cruel/cintré des quatre est évident à l’écran, Villains est un film qui manque paradoxalement de la folie nécessaire pour être mémorable. Exploité du grenier au sous-sol, le décor de la maison où s’enferme Mickey et Jules est à l’image du scénario : plein de possibilités et pourtant sans surprise. Jusqu’au bout, Berk et Olsen enquillent les situations prévisibles et l’on sent que les personnages eux-mêmes mériteraient de devenir plus flamboyants, d’être plus fouillés et surprenants, pour casser la mécanique narrative familière dans laquelle l’intrigue nous entraîne (il s’agit en gros pour nos tendres braqueurs de trouver le chemin de la sortie, quoiqu’il leur en coûte). Timide dans son propos et chiche en inventions, Villains conserve jusqu’au bout ce parfum d’inachevé même s’il demeure assez court pour ne jamais ennuyer, et s’achève sur un générique en animation à l’esprit punk de toute beauté.