Joe Johnston a mine de rien réalisé un bel exploit en 2011 : son Captain America, dernière pièce de la « Phase Un » de Marvel avant le lancement des Avengers, réussissait à rendre attachant et crédible le plus ridiculement patriotique des super-héros yankees. Film d’aventures spectaculaire et généreux (quoique étonnamment avare en scènes d’action), au parfum rétro tranchant agréablement avec le décorum techno-coloré habituel des productions de la firme, Captain America offrait surtout à son héros-titre, Steve Rogers, un arc dramatique à sa mesure, culminant dans un dénouement osé et mélancolique véritablement inattendu dans cet univers. Chris Evans, tout comme Chris Hemsworth, s’est révélé être un choix idéal pour incarner cette espèce d’ultime boyscout devant la caméra d’un réalisateur chevronné qui confirmait, vingt ans après le mésestimé Rocketeer, sa passion pour le serial et les codes du steampunk.
Que Johnston ne soit pas de retour aux commandes de Captain America : le soldat de l’hiver, suite attendue des aventures de l’Avenger, a de quoi étonner. Poursuivant sa démarche d’embaucher pour chaque nouveau film Marvel des noms inattendus, le producteur Kevin Feige a cette fois jeté son dévolu sur… les frères Anthony et Joe Russo, connus des sériphiles pour avoir chapeauté la série Community, mais coupables d’avoir enfanté au cinéma des comédies comme Toi, moi… et Dupree ou l’oubliable Bienvenue à Collinwood. Un pedigree mitigé, et surtout, un casting étrange pour une séquelle présentée comme un techno-thriller paranoïaque, ponctué bien entendu de gargantuesques scènes d’action. Contrairement à un Shane Black (Iron Man 3) ou même un Alan Taylor (Thor : le monde des ténèbres), on voit mal quelle plus-value thématique ce duo pourra apporter à ce qui s’annonce comme une pure commande reprenant une bonne partie des recettes qui ont fait le succès des Avengers.
Les trois jours du Capitaine ?
Rempli de moments iconiques (Rogers élimine une douzaine d’hommes de main dans un ascenseur façon Die Hard 3, Le Faucon saute d’un « helicarrier » tout en tirant à vue sur un avion de chasse, Barnes arrête le bouclier du Captain sans sourciller) et de scènes de destruction toujours plus impressionnantes (les producteurs promettent qu’ils n’en ont révélé qu’une infime partie…), ce premier trailer de Captain America : le soldat de l’hiver promet un divertissement solide à défaut d’être personnel, qui devrait exploiter avec zèle le principal atout de la franchise : son personnage principal, idéaliste ultime devant trouver sa voie dans un monde moderne où règnent la traîtrise, la paranoïa et la peur. Un vaste combat qui débutera dans les salles le 2 avril 2014. [quote_right] »Un pedigree mitigé, et surtout, un casting étrange pour une séquelle présentée comme un techno-thriller paranoïaque, ponctué bien entendu de gargantuesques scènes d’action. » [/quote_right]
Ce Captain America 2 en dévoilera plus, comme Iron Man 2 avant lui, sur les arcanes du SHIELD, qui après « la bataille de New York », a désormais les mains libres pour construire en masse des porte-avions aériens et imposer sa politique d’agression proactive à Washington. Si la nature de la menace n’est pas encore clairement exprimée dans le premier trailer révélé par Marvel, on peut avancer sans trop se tromper qu’il y aura de la traîtrise dans l’air au sein du SHIELD, que le Cap’ intègre non sans une certaine méfiance (la preuve, il change de costume pour passer au noir, comme le nouveau Robocop). Le fait que l’action se déroule à Washington n’est que l’un des indices renvoyant aux Trois jours du Condor, influence déclarée des scénaristes du film, qui se sont carrément adjoints les services de Robert Redford, dans le rôle d’un ponte ambigu de l’agence, pour bien souligner leur clin d’œil. La star septuagénaire constitue l’apport le plus important au casting, où reviennent, outre Evans, Samuel Jackson, Scarlet Johansson, Cobie Smulders et Sebastian Stan, qui après avoir joué Bucky Barnes dans le premier opus, réapparaît sous les traits (masqués) du Soldat de l’hiver, un ennemi redoutable pour le Cap’. À noter aussi que le Faucon, le premier héros afro-américain de l’histoire des comics, fait aussi son entrée dans l’univers Marvel sous les traits d’Anthony Mackie.