Admettons-le : il a beau avoir abandonné la franchise robo-partouzeuse de Michael Bay en cours de route et s’être mis à jouer l’acteur sérieux, notamment dans Des hommes sans loi et Sous surveillance, Shia LaBeouf reste encore loin d’être un premier rôle charismatique. Comme Zac Efron, son image d’idole teenage au visage poupin empêche pour l’instant le public de se projeter dans les personnages sérieux et limite borderline qu’il cherche désormais à interpréter. L’acteur au nom le plus imprononçable d’Hollywood persiste tout de même dans l’originalité avec The necessary death of Charlie Countryman, qui a été renommé, de manière moins pompeuse il faut dire, Charlie Countryman chez nous. S’il n’a pas encore de date de sortie annoncée en France, ce premier film du clippeur Fredrik Bond (le « Bodyrock » de Moby, c’était lui) s’est déjà taillé, malgré des critiques mitigées, une solide réputation cette année en étant sélectionné successivement à Sundance, Berlin et Deauville.
Romance et suspense à Bucarest
La première bande-annonce donne le ton d’un film qui rappelle volontiers l’énergie volatile et contagieuse de Danny Boyle (musique techno, intrigue épisodique et imprévisible, décors urbains tentaculaires, substance prohibées), Charlie Countryman raconte l’histoire d’un jeune homme désemparé après la disparition de sa mère, et qui semble avoir la capacité de converser avec les morts. Après s’être assis à côté d’un homme décédé pendant le vol qui le mène à Bucarest et rencontré des compères de soirée, Charlie rencontre l’énigmatique Gabi, dont il tombe éperdument amoureux. Malheureusement pour lui, la belle musicienne est l’ex d’un criminel suave et brutal nommé Nigel. C’est le début des ennuis et de la cavale pour Charlie, qui n’est pas prêt à renoncer à ce bonheur tombé sur lui par le plus pur des hasards.
Le fait que le scénario soit signé par Matt Drake (Projet X), qui s’est basé sur sa propre expérience de voyage en Roumanie, donne un indice sur la direction que pourrait prendre ce Charlie Countryman, dont le trailer enivrant et volontiers grandiloquent pulse au rythme de groupes aussi branchés que M83. Ni romance traditionnelle, ni thriller à proprement parler, le film semble s’intéresser avant tout aux sacrifices que chacun est prêt à faire pour trouver l’amour, tout en jouant la carte toujours efficace du décalage culturel. Des sacrifices, LaBeouf semble en avoir fait au nom de l’authenticité, puisque pour les scènes de party nocturne, l’acteur a testé pour de vrai le LSD. On n’ose déjà imaginer jusqu’où l’ex-poulain de Spielberg a souhaité aller pour le dyptique XXX de Lars Von Trier, Nymphomania. On lui souhaite malgré tout bonne chance pour espérer marquer ici les esprits puisque le script l’oppose à une pointure du genre, et un chouchou de BTW, qui n’est autre que Mads Mikkelsen. Dans le rôle de Nigel, le Danois le plus célèbre de la planète exhale le même parfum de menace et la même classe que dans les succès qui l’ont fait connaître (Casino Royale, Hannibal, pour ne citer qu’eux). Le reste du casting n’est pas mal non plus : Evan Rachel Wood (Les marches du pouvoir), Melissa Leo (Prisoners), Rupert Grint (Harry Potter), Til Schweiger (Inglourious Basterds), Vincent d’Onofrio et John Hurt, qui occupe le poste de narrateur, entourent ce duo totalement déséquilibré. Verdict bientôt dans les salles.