Au fond des bois : petit mystère du samedi soir
La disparition d’un enfant dans un village alpin fournit au film italien Au fond des bois le prétexte à un suspense digne d’un feuilleton régional du samedi soir. Ni plus, ni moins.
Saviez-vous que dans les Alpes italiennes, on célébrait depuis des siècles une fête des démons, semblable à celle d’Halloween, mais avec des costumes de Krampus (le Père Noël version mangeur d’enfants) ? Cette tradition, qui sert surtout de prétexte à de bonnes grosses cuites en haute montagne, sert de décor à l’ouverture d’Au fond des bois, production logiquement italienne qui débute donc la disparition du petit Tommy. Bourré, son père Manuel refuse de ramener l’enfant apeuré à la maison, et ce qui devait arriver arrive : Tommy disparaît dans les bois en rentrant seul… pour ne plus jamais être retrouvé.
Cinq plus tard, un garçonnet tétanisé et hirsute est retrouvé en ville, et le test ADN le prouve : il s’agit bien de Tommy. Bien que séparés, Manuel et Linda, sa fragile et dépressive maman, sont bouleversés de ces retrouvailles inespérées. Mais l’évidence pointe le bout hideux de son nez : agressif, malpoli, et à l’évidence pas très ami des animaux, Tommy n’est plus l’enfant qu’il était. Tandis que le papa tente de rattraper ses erreurs et le temps perdu, coûte que coûte, Linda et son père sont persuadés que ce garçon n’est pas de la famille…
Un enfant pour les diviser tous
Une petite communauté isolée taraudée par un secret inavouable, une famille qui s’entredéchire, un décor propice à l’évasion, un mystère insoluble qui ne peut trouver sa résolution que via des rebondissements tarabiscotés : indéniablement, Au fond des bois cumule les ingrédients nécessaires pour broder un petit feuilleton dominical, du genre que l’on croiserait un soir sans projet sur France 3 Rhône-Alpes. C’est le principal souci de ce film sans grande ambition et pourtant pas honteux : sa facture télévisuelle, sans risque et sans panache, qui empêche le scénario, aux sabots aussi gros que ceux des bergers transalpins, de prétendre être autre chose qu’un roman de gare à siroter distraitement entre le saucisson et le fromage.
L’interprétation est all over the place comme on dit chez les Américains, entre des comédiens qui en font trop peu et d’autres qui se lâchent un poil trop pour être crédibles. Et l’histoire, qui peut faire penser sur le papier à L’échange de Clint Eastwood, vise un peu trop le choc facile en choisissant de placer un petit garçon innocent au centre d’une morbide tragédie. Pas de quoi redorer le blason du polar italien, donc – Stefano Sollima s’en est déjà chargé, de toute façon.