Balle Perdue 2 : une suite qui mise tout sur l’action
En adepte des séquelles qui passent la surmultipliée, Guillaume Pierret livre avec Balle Perdue 2 un shoot d’adrénaline réjouissant.
Qu’on se le dise : si les films d’action made in France n’ont plus trop droit de citer sur grand écran depuis qu’Europacorp a baissé le drapeau, leur avenir est au moins assuré par les plateformes de streaming étrangères. Le fait qu’un Julien Leclercq ait coup sur coup sorti sur Netflix La terre et le sang puis Sentinelle, ou que le réalisateur Guillaume Pierret y ait produit Balle Perdue n’a rien d’un hasard. Ce dernier cas a tout d’une success story, puisque les chiffres mondiaux de visionnage de ce polar musclé, confectionné avec soin et sincérité, ont convaincu la plateforme de donner immédiatement le feu vert à une séquelle. Balle Perdue 2 déboule donc à peine deux ans plus tard, armé d’un budget plus généreux, d’un arsenal de marketing revu lui aussi à la hausse et d’une ambition toute trouvée : reprendre tous les ingrédients de l’original et pousser dans chaque compartiment les potards à 11. Des bagarres plus brutales, des poursuites plus amples et destructrices, des cascades encore plus folles : Balle Perdue 2 promet autant qu’il délivre. Et cette générosité risque bien de remporter à nouveau tous les suffrages.
Décomplexé du volant
Signe que la complexité du script n’est pas de nature à vous frire le cerveau, l’action de cette séquelle démarre peu de temps après la fin de Balle Perdue et il ne faut pas longtemps pour recoller les morceaux de l’histoire en cours. Areski, le chef des ripoux incarné par Nicolas Duvauchelle a pris la fuite après la course-poursuite finale qui a envoyé Lino (Alban Lenoir) à l’hôpital. Le pilote tête brûlée n’a pas digéré le meurtre de son petit frère et ne sait pas que le coupable, Marco (Sébastien Lalanne) a bien été arrêté. Décidé à obtenir justice, il s’engage dans la police aux côtés de Julia (Stefi Celma) pour former une brigade anti-gang de choc, au volant de son antique Renault 21 retapée à la main. Quand il apprend que Marco est détenu par ses supérieurs pour servir de témoin assisté, Lino devient enragé et décide de prendre lui-même les choses en main…
« Sous l’étiquette grossière de Fast & Furious à la française, se cache un film d’action comme on en voit finalement peu en Europe.«
Tourné dans la région de Montpellier avec une débauche de moyens immédiatement perceptible à l’image, Balle Perdue 2 est de l’aveu même de son réalisateur, co-scénariste et coproducteur, un rêve de gosse devenu réalité. Sous l’étiquette grossière de Fast & Furious à la française, se cache en effet un film d’action comme on en voit finalement peu en Europe. Dégraissé jusqu’à l’os, construit comme une unique énorme fuite en avant (une fois l’enjeu dramatique de cette suite établi et Lino lancé à la poursuite de son objectif, l’histoire n’est pas si éloignée sur ce point d’un Fury Road), le film fuit le réalisme – sauf dans ses effets fièrement réalisés « en dur » – et concrétise des pulsions de cinéma certes infantiles (du western dans tous les coins, des voitures propulsées en plein air sous une pluie d’étincelles et de feux d’artifice, un héros qui décanille des dizaines d’adversaires à la manière d’un Jackie Chan vintage) mais qui conservent par une sorte d’heureux miracle une vraie cohérence.
Une saga en devenir qui dépayse
Débarrassé de l’abondance de personnages du premier opus, au point il est vrai de manquer de substance, Balle Perdue 2 tient du shoot d’adrénaline à partir du moment où Lino embarque le précieux Marco dans sa R21 et met tous les truands et autorités à ses trousses. Montpellier et les communes environnantes sont explorées dans toute leur rafraîchissante diversité, d’un lit de rivière assché à des voies sur berges étroites en passant par des quartiers résidentiels témoins de crashs en série dignes des Blues Brothers, ou de routes frontalières à l’hypnotique horizontalité. C’est l’une des forces de cette jeune saga, plus évidente dans sa première suite : déplacer l’action dans un Sud-Ouest trop peu exploité au cinéma sous cette forme est une idée dépaysante et gagnante.
Presque autant que celle d’offrir au râblé Alban Lenoir le rôle d’action star auquel il rêvait lui aussi depuis tant d’années. Charismatique et accessible, l’acteur marie un physique presque intimidant à une crédibilité de tous les instants dans l’action, qu’il soit agrippé à son volant ou distribue des pains comme aux soldes d’été. Convaincant dès le premier opus, le comédien gagne encore en confiance dans cette nouvelle salve et peut envisager l’avenir avec le sourire dans ce créneau qu’il est l’un des seuls à occuper avec succès aujourd’hui (au point de refuser un rôle, paraît-il, dans Fast X, tiens donc). Grâce à lui et à l’évident savoir-faire de l’équipe aux commandes (Pierret s’est entouré de spécialistes comme Manu Lanzi pour les combats et le petit-fils de Rémi Julienne pour les poursuites motorisées), étalé sur une petite heure et demi sans superflu – si l’on excepte cette volonté transparente de préparer le terrain pour l’inévitable troisième opus – Balle Perdue 2 réussit, dans les limites de ses ambitions, son pari de revitaliser un genre tombé sérieusement en désuétude dans nos contrées.