Enola Holmes : derrière un grand Holmes, il y a une sœur

par | 1 octobre 2020 | À LA UNE, Critiques, NETFLIX

Enola Holmes : derrière un grand Holmes, il y a une sœur

Et si Sherlock Holmes avait une sœur aussi maline que lui ? Millie Bobby Brown résout des crimes sur Netflix, sous le regard affable de son frangin et cela vaut le coup d’œil.

Sir Arthur Conan Doyle a créé un héros tellement charismatique qu’il est difficile de l’imaginer s’effaçant derrière un autre personnage. Pourtant, la romancière Nancy Springer a relevé le défi dans le premier tome de sa saga Enola Holmes, adapté également sous la forme de bande dessinée, La Double Disparition. Cette aventure épique à destination des adolescents devait sortir au cinéma grâce aux bons soins de la Warner Bros. Mais, pandémie oblige, Netflix a récupéré le long-métrage et vient de le sortir en grande pompe sur sa plateforme.

Disparition rébellion

Enola Holmes : derrière un grand Holmes, il y a une sœur

À première vue, il y a beaucoup d’éléments à redouter autour de ce film. Méconnu en France, Harry Bradbeer, vainqueur d’un Emmy Award pour une série comique (en l’occurrence Fleabag), adapte ainsi une histoire peu mature qui surfe allégrement sur la vague féministe qui déferle sur la planète. En outre, l’univers de Sherlock Homes nous a récemment habitué au pire (les bouillies de pixels signées Guy Ritchie) comme aux meilleures versions (la géniale série BBC avec Benedict Cumberbatch) du célèbre détective. Dans le cas d’Enola Holmes, il ne faut pas se fier aux apparences : ce surprenant long-métrage présente, certes des défauts, mais n’a rien d’une bluette adolescente.

« Complots, courses-poursuites et meurtres de sang-froid s’enchaînent sur fond de lutte pour les droits des femmes. »

Enola Holmes vit avec mère à la campagne après le départ de ses deux frères, les brillants Mycroft et Sherlock, pour Londres. Dans l’Angleterre victorienne, elle reçoit une éducation peu orthodoxe entre logique de déduction et karaté. Loin de d’apprendre à sa fille à devenir la femme au foyer modèle, Eudoria Holmes la transforme en détective hors pair… avant de disparaître mystérieusement le jour de ses 16 ans. Livrée à elle-même Enola croit compter, un temps, sur l’aide ses frères. Elle partage avec eux les « indices » laissés par Eudoria à son intention pour visiblement être retrouvée. Mais Mycroft décide de l’envoyer en pension pour jeune fille. Fuyant cette destinée qui ne lui convient pas, Enola croise le chemin d’un jeune marquis traqué par un mystérieux tueur. Elle décide de l’aider et ainsi débute sa carrière de détective en travaillant à la fois sur la recherche de sa mère et le sauvetage de son nouvel ami.

Petite détective devient grande

Enola Holmes s’avère être une bonne surprise. Cette aventure rondement menée met en valeur l’émancipation de son personnage atypique et sympathique. Elle traite à sa façon des ressorts de l’enquête policière et dépoussière grandement le genre. Complots, courses-poursuites et meurtres de sang-froid s’enchaînent sur fond de lutte pour les droits des femmes. À l’image de son héroïne, le film est résolument féministe, sans toutefois en faire des caisses. Enola se permet même une petite amourette, entre deux énigmes. Il se dégage de l’intrigue, une grande fraîcheur et une indépendance d’esprit, à l’image du très bon Le secret de la pyramide, qui remettait le mythe, lui aussi au goût du jour adolescent. Toutefois, il est à regretter l’adaptation trop fidèle, voire même paresseuse du roman, qui se traduit par une voix off omniprésente et des brisures de quatrième mur appuyés. Il est clair que Enola Holmes manque d’effets cinématographiques qui font échos aux capacités de déductions de son héroïne et se montre malheureusement plus déclamatoire que visuel, malgré quelques animations amusantes.

Pour finir, saluons le remarquable casting qui s’implique particulièrement dans le jeu. Millie Bobby Brown (Stranger Things) est excellente, jouant à la perfection la pétillante enquêtrice. L’alchimie entre son personnage et celui de sa mère, incarné par Helena Bonham Carter et surtout son frère, joué par un Henry Cavill un peu trop bodybuildé pour le rôle, demeure évidente. Plus ouvert d’esprit que Mycroft, le célèbre détective apprécie visiblement l’intelligence et l’indépendance de sa jeune sœur qu’il va aider sans parrainer, en se plaçant dans la position inédite d’un spectateur bienveillant. Super-frangin !