Ce n’est désormais un mystère pour personne : face à la réussite commerciale (et certains diront artistique) insolente des productions Marvel, un seul studio a pour l’instant les épaules, et le catalogue adéquat, pour dupliquer ce succès qui ne se dément pas. Et il s’agit de Warner Bros, partenaire exclusif de DC Comics pour porter à l’écran les aventures de Superman et consorts. La botte secrète de Marvel Studios, et de son boss / gourou Kevin Feige, a toujours été le concept de l’univers étendu : le fameux Marvelverse, au centre duquel gravitent les Avengers. Construire une série de films interconnectés, comme des comic books, c’est l’assurance de retrouver des personnages familiers, un ton, une intrigue feuilletonnante, sans jamais avoir l’impression que l’histoire générale est terminée. Marvel a créé l’addiction, et tous ses concurrents essaient depuis de dupliquer la formule (même sans super-héros, comme le prouve Universal et son projet autour des « Famous Monsters », type Dracula et La Momie).
[quote_center] »Universal aussi duplique la formule Marvel autour des Famous Monsters, type Dracula et La Momie. »[/quote_center]
Warner a débuté sa propre « Phase » en 2013 avec sa tête de gondole, Superman, à l’occasion de Man of Steel. Très vite, il a été clair que sa suite, qui allait s’appeler Batman v Superman : l’aube de la Justice, allait servir de rampe de lancement express à l’équivalent DC des Avengers : la Ligue des Justiciers. Cela nous a valu un drôle de moment dans le film de Zack Snyder, où Wonder Woman s’asseyait derrière un ordinateur pour, basiquement, regarder les teasers des futures productions Warner / DC, à savoir Cyborg, The Flash et Aquaman. Un procédé étrange et ridicule à l’écran, d’autant plus que le personnage de Wonder Woman était lui-même inclus sans véritable raison dans l’intrigue.
Wonder Woman : l’Amazone part au front
La princesse guerrière, justement, était au centre de l’attention lors du panel Warner du Comic Con 2016. Introduite au forceps chez Zack Snyder, Wonder Woman débarquera sur les écrans au printemps 2017, et une première vraie bande-annonce a permis de voir enfin à l’écran se déployer l’univers, promesse de grande aventure, de Diana Prince, incarnée par la charismatique top model israélienne Gal Gadot.
Ce trailer s’ouvre logiquement sur des images de son île natale, Themyscira, uniquement peuplé de femmes guerrières comme elle, et sur laquelle s’échoue le soldat Steve Trevor (Chris Pine, Star Trek). À son contact, elle apprend que le monde est secoué par la Première Guerre Mondiale, et décide de s’engager aux côtés des Américains pour combattre… avec ses propres armes ! Car oui, le lasso électrique, le bouclier immaculé et le glaive tranchant de la septuagénaire super-héroïne (elle fête ses 75 ans d’existence cette année) sont bien au rendez-vous de cette bande-annonce épique à souhait – la patte visuelle de Zack Snyder, producteur et co-scénariste, est visible à plusieurs reprises, notamment dans certains plans très inspirés de Sucker Punch – et attendue à plus d’un titre.
Bien sûr, la dimension rafraîchissante du projet n’est pas négligeable : contrairement à Bat’ et Sup’, Wonder Woman n’a pas de réel passé cinématographique, et les souvenirs de la naïve série télé sont désormais lointains. C’est un personnage iconique, casse-gueule sur le papier, et le choix d’en faire une sorte de version « 14-18 » de Captain America assortie d’éléments fantasy peut s’avérer, aussi étrange que cela paraisse, payant.
Mais Wonder Woman est surtout attendue au tournant comme la première figure de femme forte à assumer seule le poids d’un film de super-héros. Réalisé par une femme, Patty Jenkins (Monster, et ironiquement partie de chez Marvel où elle devait réaliser Thor 2), ce blockbuster peut revendiquer sa dimension féministe, d’ores et déjà visible dans quelques lignes de dialogue, grâce à un personnage qui n’est pas défini par le regard que les hommes portent sur elles (le front de 14-18 était rappelons-le un univers exclusivement masculin), mais par ses propres choix et convictions. Espérons que cette profondeur supplémentaire ne soit pas mise en sourdine (au profit par exemple d’une routinière romance « à l’ancienne » avec Pine) dans ce film d’action attendu chez nous pour le 7 juin prochain.
Bande-annonce
Justice League : la ligue des justiciers (du dimanche)
Warner a enchaîné directement durant son panel sur une annonce plus surprenante : le premier trailer de son mastodonte super-héroïque Justice League, prévu pour l’automne 2017 et surtout… encore en tournage, sous la direction de Zack Snyder ! Autant dire qu’il faut prendre l’expression « bande-annonce » avec des pincettes, le terme « footage » (littéralement « séquences ») rappelant qu’il s’agit avant tout d’un bout-à-bout spécifiquement conçu pour les fans.
Seul problème, Justice League n’est pas n’importe quel film hollywoodien. C’est la concrétisation, tout comme Avengers, d’un vieux serpent de mer, qui aurait pu voir le jour dans les années 2000 sous la direction de George Miller, et qui rassemble à l’écran les plus célèbres héros de DC Comics, qui joue clairement son va-tout. Autant le dire, ces premières images, cadrées en 1.85 et parfois sous-éclairées, ressemblent plus à une douche froide qu’à un fantasme devenu réalité. Introduits avec la lourdeur que l’on sait dans Batman v Superman (qui a réussi à résumer le choc entre deux héros costumés à une blague involontaire sur le nom de leurs mères), les nouveaux alliés de Bruce Wayne, Diana et Clark Kent – pas encore montré ici, logiquement – prennent vie pour la première fois.
On a donc droit, dans une suite de saynètes supposément drôles avec Ben Affleck en proto-Tony Stark, à une rencontre avec un Aquaman (Jason Momoa) au look de surfeur, puis avec Flash (Ezra Miller), décalque visible du nouveau Peter Parker – ou du Quicksilver des X-Men, au choix -, avant d’apercevoir Cyborg (Ray Fisher), qui ressemble à un concept abandonné de méchant Borg pour Star Trek. Sans pour autant se tirer une balle dans le pied (il reste quinze mois avant la sortie), Warner a pris un risque en révélant sans gloire le cœur battant de son projet d’univers étendu, qui semble courir docilement après la recette gagnante de Marvel. Conçu dans la précipitation autour de trois figures diversement bien servies par Snyder, et de trois autres qui attendent encore d’être véritablement présentées au grand public, Justice League part avec un handicap certain. Warner pourrait tirer quelques leçons de l’échec de Sony, qui avait voulu tirer plus vite que son ombre en truffant son Amazing Spider-Man 2 de teasers pour de futurs spin-off (Sinister Six, Venom) avant de les annuler suite au désastre critique du film.
Beaucoup de mauvaise foi dans votre article.
J’appellerais plutôt ça une opinion. Comme celle de penser que Justice League aurait été un projet plus excitant sous la houlette de George Miller que de Zack Snyder.