Bad Samaritan : ne jamais cambrioler un serial-killer

par | 12 octobre 2018

Jamais loin du ridicule, et pourtant divertissant, Bad Samaritan est un thriller ludique qui doit son salut à la performance haute en couleur de David Tennant.

Sean (Robert Sheehan, découvert dans Misfits et recroisé dans Mortal Engines) n’est pas un mauvais bougre. Jeune photographe sans le sou, il gagne sa vie modestement comme voiturier pour un restaurant chic, avec son pote Derek (Carlito Olivero). Seulement, les deux amis cachent bien leur jeu : ils profitent de leur situation pour cambrioler discrètement le domicile des clients qui leur laissent leurs clés de voiture, en se basant sur l’historique du GPS du véhicule. La combine marche plus ou moins bien, jusqu’au jour où Sean s’occupe de la Maserati de l’arrogant Cale (David Tennant, Doctor Who, Broadchurch). Un type suffisant et assez inquiétant, mais visiblement richissime. Sean s’introduit chez lui mais manque de s’étouffer quand il découvre dans l’obscurité une jeune femme (Kerry Condon) enchaînée, bâillonnée et rouée de coups. Cale n’est pas qu’un sale type mais aussi un tueur en série ! Et lorsqu’il découvre le pot aux roses de retour dans sa maison, il se met en tête de pourrir la vie de Sean et son entourage…

Le nom de Dean Devlin vous est peut-être familier, et pour cause : le réalisateur de Bad Samaritan est avant tout connu pour le co-auteur des, hem, plus grands films de son ami Roland Emmerich, de Stargate à Godzilla en passant par Independance Day. Et ce collaborateur de l’ombre a longtemps rongé son frein avant de passer derrière la caméra seul comme un grand. Le baptême du feu sera corsé, puisque Devlin a livré l’an passé le splendide navet catastrophe Geostorm avec Gerard « maxilliaires » Butler. A-t-il été pris de remords ? Toujours est-il que Devlin a décidé de se la jouer modeste en prenant les commandes de ce Bad Samaritan dont il devait juste être le producteur initialement. Le film, qui évoque dans sa première partie une variation sur le même thème que Don’t Breathe, possède surtout le parfum iconoclaste et absurde des thrillers des années 90. Le genre de films où le méchant psychopathe devient la véritable attraction du film, possède trois coups d’avance sur les héros et ne doit sa chute qu’à de flagrantes facilités de scénario.

Héros falot contre psycho flamboyant

Autant dire que Bad Samaritan relève avant tout du plaisir coupable, à s’enfiler un samedi soir de disette si l’on est fan de suspense ludique et de performances d’acteur en roue libre. Une expression que l’on croirait sur le coup inventée pour le so british Tennant, à nouveau casté en savoureux méchant américain après la saison 1 de Jessica Jones. Un serial killer traumatisé par un souvenir d’enfance croquignolesque à base de cheval mal débourré (les flash-backs en CGI et le profilage express du FBI valent leur pesant de cacahuètes), et fan de nouvelles technologies. Dans la première heure, la meilleure, Cale fait vivre un enfer au « bon samaritain » Sean, qui s’en veut ne pas avoir libéré la prisonnière, à l’aide de sa maison bourrée de domotique, d’un téléphone multi-fonctions et d’idées particulièrement vachardes (il poste en ligne sous son nom les photos osées de sa copine, avant de l’expédier à l’hosto).

Heureusement pour lui, le cambrioleur-pas-si-méchant a de la ressource, plus en tout cas que Devlin lui-même, qui faute de savoir se dépatouiller d’un script nageant au fil des minutes dans les incohérences et le flou artistique, boucle tant bien que mal son jeu du chat et de la souris en se reposant entièrement sur son joker artistique : un Tennant aux yeux exorbités prenant un plaisir maniaque à incarner ce maléfique héritier, misogyne et en tout point détestable. Un méchant qui ne passe pas inaperçu, donc.