Créature mythique du cinéma (plus que de la littérature) au même titre que le vampire, le loup-garou a toutefois été moins bien desservi au fil des décennies. Faites donc le test : les connaisseurs vous citeront toujours les mêmes classiques (Le loup-garou de Londres, Hurlements, La nuit du loup-garou, à la rigueur Ginger Snaps, et bien sûr la version originelle avec Lon Chaney), tandis que les moins avertis auront du mal à se rappeler d’autre chose que Jack Nicholson avec des lentilles grises ou l’étron de Stephen Sommers. Car c’est un fait, les films de gros poilus sont bien (trop) souvent synonymes de nanars plus ou moins fauchés : un acteur recouvert de fourrure qui grogne à la pleine lune, c’est tout de même moins facile à rendre cool qu’un suceur de sang au regard ténébreux. Pas pour rien que les héros d’Underworld sont des noctambules néo-goth et pas ces pouilleux de lycanthropes.

Malédiction en Galicie

Un trio de bras cassés… prêt contre un assaut de loups-garous en règle!

Mais tout de même, lorsqu’on y met un peu de bonne volonté, le loup-garou peut devenir un sous-genre épatant, jouant sur la dualité monstrueuse de personnages le plus souvent affligés d’une malédiction. Dans Game of werewolves, de l’espagnol Juan Martinez Moreno, le ton est volontairement comique et détendu, le réalisateur ayant de son propre aveu souhaiter rendre hommage aux classiques de Landis et Dante, qui ont bercé son enfance, tout en trouvant sa propre voie pour plaire au public d’aujourd’hui.

L’histoire du film est donc placée sous le signe de l’aventure rocambolesque et de l’humour noir, dans la lignée des premiers films d’Alex de la Iglesia. Le héros, Tomas, est un écrivaillon raté revenant dans le village de Galice de son enfance, Arga, soi-disant pour se voir remettre une récompense pour sa « carrière ». Un peu naïf, il ne se rend pas compte que les habitant veulent en fait le sacrifier pour mettre fin à la malédiction séculaire qui les fait se transformer les soirs de pleine lune en loups-garous très énervés. Avec son agent et son ancien meilleur ami d’enfance, Calisto, Tomas va devoir se battre avec les moyens du bord pour échapper à la horde de poilus.

Peur bleue ou rire gras ?

La bourgade lycanthrope d’Arga, en mode « sur les nerfs »…

Moreno n’a pas à rougir en citant les incunables des années 80 auxquels il fait, inconsciemment ou non, référence. Game of werewolves est l’un des représentants du genre les plus énergiques et attachants qu’on ait vu depuis longtemps. Il choisit de cadrer plein pot, et pendant la moitié du film, une bonne douzaine de lycanthropes visuellement très réussis, plus impressionnants que réellement efficaces (on peut les rosser avec un simple candélabre et même, sacrilège, avec des pieux !), qu’il cadre amoureusement en prenant toujours soin d’introduire un décalage comique dans chaque séquence. Le film prend son temps pour mettre en place une mythologie à la fois mystérieuse et absurde (les personnages eux-mêmes ne comprennent pas grand-chose à la fameuse malédiction), et brosser une galerie de personnages à l’outrance typique de la comédie ibérique, parmi laquelle se distingue l’impayable Carlos Areces, remarqué dernièrement dans Balade Triste et Extraterrestre.

Certains gags à la limite du burlesque (la séquence du doigt coupé, les interventions régulières d’un fox terrier cousin de la star de The Artist, le policier d’apparence simplet qui s’avère être un tireur d’élite), nous rappellent que Game of werewolves est avant tout un divertissement sans autre ambition que de s’amuser avec les clichés du genre, en mettant de côté la symbolique bestiale et le tragique romantique qui pouvaient alourdir des tentatives du genre Wolfman. À choisir entre les deux, il vaut mieux se poiler en Galice que se morfondre à Londres.


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Trois sur cinq
Game of werewolves (Lobos de Arga)
De Juan Martinez Moreno
2011 / Espagne / 102 minutes
Avec Gorka Otxoa, Carlos Areces, Mabel Rivera
Sortie prochainement
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