Finch : seul au monde… ou presque

par | 7 décembre 2021 | À LA UNE, Critiques, VOD/SVOD

Finch : seul au monde… ou presque

Simple et poignant, Finch nous embarque dans une aventure où Tom Hanks et un robot se disputent la vedette.

Tom Hanks n’a décidément pas de chance avec l’humanité. L’acteur américain était naufragé sur une île déserte il y a vingt ans dans Seul au monde. Le voici tout aussi isolé, avec à peine à qui parler autour de lui, dans Finch, grosse production s’ouvrant fièrement (c’est assez rare, hormis pour les films de Steven Spielberg, pour en être heureux) avec le logo caractéristique d’Amblin Entertainment. Et il est vrai qu’il n’y a pas mal de l’esprit du studio mythique des années 80 dans ce deuxième long-métrage signé de Miguel Sapochnik, passé à la postérité côté TV après avoir signé certains des épisodes les plus spectaculaires de Game of Thrones. Rien d’aussi barbare dans Finch, malgré un contexte futuriste sombre au possible.

La catastrophe, ici, est déjà arrivée depuis longtemps : une éruption solaire a transformé la surface de la Terre en micro-ondes à ciel ouvert. La couche d’ozone « transformée en gruyère » (l’expression est importante), survivre devient un exercice ardu pour ceux qui n’ont pas les ressources technologiques et l’intelligence de Finch Weinberg (Tom Hanks, bien sûr). Un ingénieur assez malin pour avoir conçu dans les locaux de son usine d’éoliennes un petit chez-lui protégé des tornades et tempêtes de sable qui balaient le pays, où ses seuls compagnons sont un robot aux allures de Rover martien, Wiley, et surtout son chien fidèle, Goodyear. Mais les radiations empirent, aggravant la santé du survivant, qui se résout à préparer son départ vers la Californie, tout en accélérant la fabrication de son ultime bijou : un robot humanoïde doué de parole et de la capacité d’apprendre. Une création un peu maladroite, mais efficace (jouée en mo-cap par l’invisible Caleb Landry Jones), que Finch charge d’une mission prioritaire par rapport aux autres : s’occuper de Goodyear à sa place, quand il ne sera plus là pour le faire…

Un voyage entre rires et larmes

Finch : seul au monde… ou presque

Même s’il n’est logiquement jamais, sur le fond, très réjouissant, le genre post-apocalyptique fonctionne grâce à un lot de conventions qui débouchent souvent sur des films « confortables ». Quelle que soit la menace, la catastrophe, le principe de l’après-fin de la civilisation s’illustre un peu toujours de la même manière : inutile donc de prétendre que les premières minutes de Finch brillent par leur originalité – à part celle de masquer un temps le visage de sa star. Elles servent toutefois à planter le décor, intimiste, protecteur et pourtant en voie de disparition, de ce cocon où Finch Weinberg s’est retranché. Un génie de la mécanique qui tendait vers la solitude avant même que tout s’écroule autour de lui, et qui a reporté toute son attention, toute sa raison de vivre, sur un animal fidèle et deux robots. L’originalité réelle du film se niche là : dans ce choix de s’agripper tout au long de leur fuite vers l’Ouest, loin du déchaînement solaire qui engloutit le pays, à ce microcosme de fortune, comme un ensemble de symboles qui se passerait subtilement le flambeau. Un homme fatigué et malade, sur le déclin, un animal fragile, un robot intelligent et taillé pour survivre à cette nouvelle ère déshumanisée.

« Votre degré d’appréciation du film dépend grandement de votre amour pour l’unique humain présent à l’écran. »

Minimaliste au niveau dramatique (excepté lors d’un fugace flash-back, le reste de l’humanité est complètement invisible à l’écran), Finch est d’autant plus prenant qu’il confronte cette petite troupe à de vastes environnements désertiques quand ils ne sont pas lunaires, et à un enchaînement de péripéties climatiques plutôt spectaculaires. Loin de reprendre l’ambiance de Twister, toutefois, Sapochnik choisit surtout de tirer le meilleur de l’humanisme de son acteur principal, passé maître dans l’art de rendre les bons sentiments sincères et les phases de désespoir déchirantes. C’est du Tom Hanks dans toute sa splendeur, en presque one-man show, et comme Will Smith dans Je suis une légende, votre degré d’appréciation du film dépend grandement de votre amour pour l’unique humain présent à l’écran. Reste que le côté initiatique et fondamentalement triste de cette histoire cohabite parfois bizarrement avec le ton comique et désarmant induit par le robot « Jeff ». Une création semi-numérique à la Chappie bluffante de réalisme, dont l’intelligence artificielle passe progressivement du statut de grand enfant à adulte responsable, et qui autorise donc plusieurs gags visuels plus ou moins finauds. Faire rire et divertir pour mieux nous tirer des larmes dans la dernière ligne droite, après un voyage dans des paysages américains mythiques, mais éteints : là réside sans doute la vraie note d’intention de ce film de science-fiction « à l’ancienne », guère original, mais soigné, poignant et incarné.