Kate : une tueuse pour cible

par | 16 novembre 2021 | À LA UNE, Critiques, NETFLIX

Kate : une tueuse pour cible

Avatar tokyoïte de John Wick et Hyper Tension, Kate marque les esprits grâce au charisme de sa vedette.

Une tueuse à gages surqualifiée piégée par ses ennemis et qui n’a plus que 24 heures à vivre pour trouver le coupable et se venger. Voilà résumé en une phrase même pas balzacienne l’histoire et les enjeux de Kate, film d’action au féminin disponible sur Netflix qui vient rejoindre en 2021 une liste bigarrée notamment composée de Jolt (sur Prime Video) et Bloody Milkshake (sorti fugacement au cinéma). L’intrigue de ce film mis en boîte par le Français Cédric Nicolas-Troyan – qui s’était coltiné la séquelle de Blanche-Neige et le chasseur en 2016 – a si peu d’importance que ses premières minutes installent le décor sans tarder.

Kate est donc une professionnelle de l’assassinat, en mission au Japon, dont le boulot dérape quand un élément perturbateur (une enfant, comme dans Scarface) s’immisce dans sa lunette au moment fatidique. Pour qui travaille-t-elle, qui sont ces cibles de la mafia nipponne ? Peu importe : quelque temps après, Kate, toujours à Tokyo, est empoisonnée à son insu. Les médecins sont clairs : elle sera morte le lendemain soir. Forcément, cela lui donne envie de mettre quelques balles en pleine tête et de tailler dans le lard des yakuzas pour soulager sa peine et mettre un nom sur son martyre.

Néons, vous avez dit néons ?

Kate : une tueuse pour cible

De cette fusion visible entre les pitchs de John Wick et Hyper Tension, Kate tire en moins de deux heures rondement menées un divertissement évidemment pas taillé pour la postérité, mais à l’ambiance nocturne tokyoïte soignée et tape-à-l’œil. Nous nageons en plein exotisme de carnaval (Kate massacre des gangsters dans un restaurant traditionnel tout droit sorti d’une simulation de Matrix, le « boss final » règle ses comptes au katana, la BO regorge de pop et de hip-hop locaux), et l’ensemble baigne dans une photo saturée de néons, de reflets miroitants et de couleurs vives qui, tel un Michael Mann en surchauffe, feront briller votre écran de télé dans la nuit. Sans être hystérique (excepté lors d’une courte course-poursuite incongrue à la Speed Racer bardée d’effets numériques de mauvais goût), le film s’avère très dynamique, Nicolas-Troyan laissant à sa maussade héroïne le temps d’exister entre deux tueries, en apprenant notamment à connaître la fille d’une ancienne victime qu’elle prend en otage.

« Kate gagne des points grâce au charisme de sa vedette. »

D’une violence inhabituelle pour une production Netflix (il fallait bien ça pour titiller la barbare trilogie des John Wick sur son terrain), Kate gagne des points grâce au charisme de sa vedette, Mary Elizabeth Winstead. L’actrice américaine, longue tige brune aux grands yeux angéliques et à la coupe garçonne, n’est pas étrangère aux rôles physiques et durs au mal (de Death Proof à Birds à Prey en passant par Fargo, c’est même surtout pour ça qu’on la connaît). Affublée d’une tenue à la Ripley dans Aliens, le corps progressivement marqué et décomposé par les blessures et la maladie, la comédienne exploite aussi bien son potentiel lorsqu’elle doit transmettre la colère, les regrets et la lassitude de son personnage, que lorsqu’elle brise des coudes ou oblitère les crânes adverses d’un tir éclair. Le film se pare grâce à elle d’une dimension féministe émancipatrice (ce n’est pas un hasard si tous les ennemis qu’elle élimine sont des hommes et sa seule alliée une jeune fille aussi perdue qu’elle), qui permet in extremis à Kate de dépasser sa condition de petit film d’action stylisé dans l’air du temps.