Vous n’imaginez tout de même pas qu’on allait s’arrêter là ? Comme promis, « Qualité France » remet le couvert après son premier épisode pour vous servir sur un plateau le meilleur du pire du cinéma français. Enfin, en tout cas au vu des bandes-annonces, parce que oui, deux minutes suffisent souvent à mettre tout le monde d’accord sur les qualités de certains longs-métrages. Ça s’appelle de la mauvaise foi, vu qu’on a pas vu les films dont il est question ici. Et, de fait, on ne les verra sans doute jamais, parce qu’une simple vision de leur trailer a suffi à nous traumatiser.

qualitefrance2_1Loin de nous l’idée d’enfoncer avec méchanceté toute une branche de la production nationale indépendante, qui compense parfois par ses idées et son audace son manque de sous et/ou de représentation médiatique. Mais bon, quand même, parfois, quand on peut pas… il vaut mieux pas. Et ça vaut aussi pour ceux qui en ont, des moyens. Demandez donc à Danielle Thompson.

Deuxième fournée de trailers, donc, allant de la grosse production beaufisante au WTF quasi amateur. En fait, il y avait tellement de choix dans l’agenda des prochaines sorties qu’on a laissé quelques perles de côté. Certaines, comme Pop Redemption, gardent tout juste le bénéfice du doute. N’hésitez pas à nous dire si on s’est trompé, hein. Après tout, Des gens qui s’embrassent a bien réussi à faire 150 000 entrées, alors…

Jamais sans sa mère !

On commence directement avec le haut du panier, l’improbable La fille publique. La réalisatrice, Cheyenne Carron (ça c’est du nom) n’en est pas à ses débuts puisqu’il s’agit de son sixième film, après des titres comme Extase ou Ne nous soumets pas à la tentation. Oui, on connait pas non plus. Bref, La fille publique, après s’être « révélé » avec un foudroyant teaser en plan fixe avec l’héroïne, Yasmeen, face à une assistante sociale, a tout déballé dans un trailer qui remet en cause les fondements même du cinématographe. En gros, ça parle d’une fille qui tombe un jour sur sa vraie mère mais qui veut pas quitter sa famille d’adoption, parce que tu vois, elle connaît que eux, elle a même tatoué leur nom sur son corps, cette folle ! Côté « promotion de l’adoption », c’est donc pas gagné, mais côté cinéma, là c’est carrément l’hallali. Dans La fille publique, même les contre-champs sont pas raccord. Les acteurs bredouillent ou hurlent leurs dialogues comme s’ils étaient en répétition au cours Florent, et la case étalonnage semble avoir été sautée vu que la lumière change toujours d’un plan à l’autre. Après on va nous dire que c’est un style réaliste, mais hey, Ken Loach aussi il est réaliste, ça l’empêche pas d’avoir un directeur photo et un monteur à jeun.

La punchline qui vend du rêve : « Maman maman maman maman MAMAN MAMAN MAMAN ! »

Un gros coup de pédale

La Grande Boucle, c’est ce qu’on peut appeler sans trop de remords, un film de vendus. Pas que le sujet du cyclisme au cinéma ne soit pas cinématographique : regardez, par exemple, Le vélo de Ghislain Lambert. La grande boucle, c’est le genre de production sponsorisée où l’on sent que tout a été calculé pour redorer l’image d’un sport pollué par le fric et la triche. On parle ici ben sûr du Tour de France, cette « compétition » qui n’a pas eu de vainqueurs non dopés depuis quinze ans, mais qui inexplicablement, attire tous les beaufs de France sur le bitume chaque mois de juillet. Pourquoi ne pas financer une comédie sportive populaire qui « rendra hommage aux amateurs » (comprendre : ceux qui sont pas dopés) pour servir de tremplin au 100e Tour des Pharmacies clandestines ? Clovis Cornillac, qui s’y connaît en film promotionnel depuis Les chevaliers du ciel, est chargé de jouer l’olibrius qui court le tour un jour avant les pros (que c’est original… sauf que des centaines d’obsédés le font depuis des décennies) pour que sa famille ne le prenne plus pour un loser. Signe qu’on nous prend vraiment pour des buses, Clovis va finir par jouer la gagne avec de vraies stars (sic) du deux-roues venues faire des caméos, le temps de courses « palpitantes » commentées par le chèque de Nelson Monfort. Seul réconfort, le coach du pauvre Cornillac sera joué par Bouli Lanners, qui vaut bien mieux que ces tristes entreprises de réhabilitation.

La punchline qui vend du rêve : « C’est pas des épisodes que j’ai raté, moi, c’est des saisons entières »

La boudeuse attitude

Alors, Jeunesse, comment dire ? C’est le genre de film qui risque typiquement d’énerver beaucoup de monde. Déjà parce que c’est réalisé par une fille de, Justine Malle. Ensuite parce qu’elle s’est dit que ça serait cool pour son premier long-métrage de parler de la fin de vie de son père, et de faire jouer son rôle par une autre fille de, encore plus énervante : Esther Garrel, la sœur de cette tête-à-claques de Louis. Jeunesse est donc une sorte d’autobiographie un brin pathétique de ces jeunes années si difficile où l’on étudie la littérature, on flirte avec des garçons aux coiffures improbables, et où on boude face caméra parce que, quand même, la mort d’un père, c’est pas drôle. Comme souvent dans les trailers français (le suivant est pas mal aussi dans ce genre), des riffs de guitares déglingués à la Sonic Youth servent de bande-son, et le montage fait tout pour rendre anti-palpitante la vie morose de la jeune Justine, pardon, Juliette, qui devrait me signale-t-on dans l’oreillette bientôt enchaîner avec la suite de sa trilogie, Adulte et Vieillesse.

La punchline qui vend du rêve : « – Il faut que tu lui dises au revoir – Je veux pas lui dire au revoir »

Un babysitter kidnappeur tu n’engageras pas

Tu seras un homme constitue une étrange surprise. Pas que le nouveau film de Benoît Cohen s’annonce bien, non au contraire. Ça s’annonce merveilleusement mauvais, ce qui est plutôt inhabituel qui avait su imposer une patte particulière avec son film-suivi-d’une-série Nos enfants chéris ou Les acteurs anonymes. Ici, il bidouille avec apparemment une énergie en berne une histoire de famille recluse dans sa maison, avec papa qui n’est jamais content, fiston qui broie du noir et maman qui vit dans le grenier. C’est la fête, donc, et ça s’arrange pas avec l’arrivée du héros, Théodore, babysitter ressemblant plus à un étudiant en lettres ayant loupé son Bafta, qui gagne l’affection du petit gamin-qui-sait-pas-jouer-devant-une-caméra avec un ballon et des costumes ridicules, avant de carrément le kidnapper, parce que quand même, papa est un petit peu con, et qu’ils ont envie de voir la plage. C’est tragiquement mou et idiot, et après la piteuse tentative de faire du Desperate Housewives à la française avec Tiger Lily, on a le droit de se dire que Benoît Cohen file un mauvais coton.

La punchline qui vend du rêve : « Bonjour, c’est Théodore, le babysitter » (avec un penchant pour les costumes de femme et le kidnapping !)

Passion Ardant

Ah, Fanny Ardant. Grande actrice française, révélée par Truffaut et Resnais, qui fêtera bientôt ses 40 ans de carrière. Fanny, ça fait bien longtemps qu’elle n’a pas eu un grand rôle, qui plus est dans un grand film. Et à vrai dire, on est pas mécontent de ne plus entendre aussi souvent sa voix empruntée et ses tirades soupirées avec une telle conscience d’elle-même qu’on se demande parfois si elle ne donne pas la réplique à un miroir en hors-champ. Fanny a donc décidé de s’octroyer un vrai grand rôle, sous la direction de Marion Vernoux (Reines d’un jour). Dans Les beaux jours, elle joue une retraitée qui se trouve un peu dépourvue d’activités marrantes (elle fait de la poterie, youpi) et qui en plus habite à Dunkerque. Du coup, quand elle tombe sur un mec plus jeune qui lui « fait du gringue », forcément, elle fait cocu son Patrick Chesnais de mari. Autant ce dernier semble trouver le bon registre pour jouer ce rôle ô combien original, autant Ardant et son débit déshumanisé semblent totalement aux fraises dans ce mélo nordiste ayant trente ans de retard. Un point de malus également pour « Laurent Laffitte DE LA COMÉDIE FRANÇAISE ». Sérieusement, arrêtez ça, quoi. On est plus en 1788, et on se fout de l’endroit où a étudié un acteur. Vous imaginez, vous, devoir vous présenter comme « Gaston Robert, de l’Université Rennes 2 » pendant toute votre vie ?

La punchline qui vend du rêve : « Du temps j’en ai. J’ai que ça même »