2012, ça n’est pas qu’une année électorale de plus. Pas besoin de vous le rappeler, c’est aussi l’année où vous allez bouffer, plus que jamais, du super-héros dans les salles. Production quasi-indépendante tournée dans un anonymat bienvenu, Chronicle et ses teenagers jackassiens héritant de grands pouvoirs mais sans les responsabilités d’usage, ainsi que le retour du Ghost Rider dans une production colorée et nawakesque pilotée par le duo Neveldine/Taylor (Hyper Tension 1 et 2), ne sont que les premiers coups de semonce d’une année super-héroïque à souhait. Pensez donc : Spider-Man, Batman, Superman, Iron-Man, Hulk, Thor, Captain America, Wolverine, Green Lan… euh non, pas lui. Les autres seront tous de retour d’ici l’été sur les écrans, têtes de gondoles d’un sous-genre devenu synonyme de billets verts depuis l’explosion des X-Men.

L’Internet aidant, la figure du super-héros est devenue partie prenante de la « geek culture », si tant est qu’on puisse la globaliser sous ce nom. Hommages et détournements sont aussi courus que les fan fiction, les one-shot en BD tels que la préquelle des Watchmen faisant même la une de sites d’actualité consacrés au cinéma. Tout le monde veut s’évader, se projeter dans ces univers presque trop réels où un talent particulier (et souvent paranormal) permet de se distinguer de la masse, de triompher du destin et d’emballer LA fille. Cela inspire toutes les cultures à travers le monde, sans exception. La preuve : les dix films de ce top correspondent à autant de destinations différentes, d’où émergent des super-héros parfois désespérément normaux, mais qui gagnent à être connus. We don’t need another hero ? Bien sûr que si !


Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu de Thaïlande :
Red Eagle

Particularité : n’a sûrement pas son permis moto

Increvable, bourrin et quelque peu psychotique, Red Eagle est un justicier masqué dont le look rappelle le Kato du Frelon Vert, laissé pour mort après avoir pris plusieurs balles dans le buffet, et qui ne laisse aucun blessé derrière lui dans sa quête de justice et de vengeance. Il est loin d’être connu dans nos contrées, mais Red Eagle est un trésor national en Thaïlande. Héros de BD, de série TV et même de cinéma : cette version datée de 2010 est de fait un remake, dans lequel beaucoup de moyens ont été investis. Choix étonnant, c’est le talentueux mais iconoclaste Wisit Sasanatieng (Les larmes du tigre noir) qui a été mis aux commandes de ce blockbuster thaï qui n’a au final rien d’un spectacle familial, même si le script sacrifie à un manichéisme simpliste (le héros combat de méchants pollueurs). Assez noir, au point que les tentatives de comédie – via le personnage d’un flic au langage châtié – passent inaperçues, le film touche au but lors des affrontements entre l’aigle rouge et Black Devil, un ancien frère d’armes devenu une nemesis ultra badass. Leur duel sur le toit d’un grand magasin est LE morceau de bravoure d’une production assez bancale, qui a le mauvais goût de se terminer sur un cliffhanger alors que la suite n’est toujours pas d’actualité.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu du Canada :
Defendor

Particularité : sait déverrouiller des portes avec du chewing-gum

Arthur est Canadien, très gentil, mais si vous êtes un méchant proxénète qui ne fait rien qu’à taper sur les filles ou un flic pourri, attention à vous ! Car son alter ego Defendor (et pas Défendeur, il n’aime pas qu’on fasse l’erreur) veille sur les rues de sa ville, armé de la matraque de feu son père, de centaines de billes (sic) et de divers gadgets aussi farfelus qu’efficients. Interprété par un Woody Harrelson des grands jours, Defendor est un exemple récent et marquant de la vague des « super-héros sans pouvoirs », moins populaire que Kick-Ass ou Super, mais pas moins riche. Grand enfant un peu lent, naïf mais pourtant lucide, Arthur se bâtit un personnage de justicier avec les moyens du bord (du gros scotch pour dessiner un D sur son torse, par exemple) et s’attache, malgré les coups et les dangers qu’il encourt face à des truands réellement menaçants, à défendre littéralement sa propre conception de la justice. Grâce à sa grande variété de tons, sa galerie de personnages qui force l’empathie, Defendor et son héros aussi pur que maladroit se révèlent très attachants.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu de Chine :
Sunny (Blast)

Particularité : lance des couteaux comme personne

Sunny n’a rien d’exceptionnel : il est même plutôt irritant à rire tout le temps comme un bêta et à essayer d’être pote avec ses collègues qui le traite comme un larbin dans le cirque où ils travaillent. Sauf qu’un jour, en découvrant une caverne secrète où se propage un gaz mystérieux, tous développent des super-pouvoirs et voient leur corps muter monstrueusement. Forcément, Sunny, qui est gentil, va devoir stopper ses anciens « amis » devenus des mutants incontrôlables. Voilà pour le pitch, inversant à peine celui des 4 Fantastiques pour offrir à Hong-Kong sa première vraie grosse production super-héroïque après quelques tentatives kitsch dans les années 90 (Heroic Trio et sa suite). Le yes man Benny Chan se charge de mettre en scène les affrontements câblés entre nos super-kickeurs, qui consistent à réduire en miettes chaque décor en s’envoyant des super-avoinées dans le pif. Totalement idiot, nourrir à l’humour mo lei tau indigeste, rempli de prestations calamiteuses et d’idées saugrenues (aaaah, ce lancer de couteau final…), Blast amuse malgré tout et on lui pardonne beaucoup. Tout simplement parce qu’il était temps que la péninsule s’essaie à un genre qui lui a tout piqué en Occident, en particulier ses combats en apesanteur.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu des USA :
Superheroes

Particularité : ils sont tous un peu fous

Ils ont chacun un surnom, un costume (ou une absence de costume qui fait, hem, office de costume), une mission et une lubie : être un super-héros. Eux, ce sont les justiciers qui sont suivis par les caméras du documentaire Superheroes. Regroupés sous une appellation commune (RLSH, soit « Real life super heroes »), ces drôles de justiciers, parfois un peu inconscients des dangers qu’ils peuvent courir, peuplent les grandes villes des Etats-Unis, seul pays où pouvait naître une telle idée. Dénuée de tous pouvoirs, sauf pour la bande de New-yorkais (qui se surnomme la New-York Initiative) pratiquant en freestyle toutes sortes d’arts martiaux, dénuée parfois de toute aptitude physique (à l’image du californien Mister Extreme et son surpoids, qui se fait rétamer dans des concours de lutte), cette ligue officieuse et officiellement dingo est presque trop belle pour être vraie. Et pourtant, le réalisateur Michael Burnett, qui iconise avec panache ses sujets au moyen de BD animées servant de transitions, réussit petit à petit à montrer la véritable utilité de ces doux illuminés répondant au nom de Master Legend, Zetaman ou encore Dark Guardian : recréer un semblant de lien social et d’attachement à sa communauté en faisant la promotion de la solidarité, de l’entraide et de l’engagement actif contre les trafics qui gangrènent leurs rues. Un combat utile dans une Amérique des suburbs qui se serait résignée face à la crise économique et à la violence de ses délinquants.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu d’Australie :
Griff the Invisible

Particularité : possède une cape d’invisibilité (si, si)

Gentil au point d’être vraiment effacé, Griff est un employé lunaire et solitaire, chaperonné par son grand frère et reclus dans son appartement… hi-tech, batcave dernier cri d’où notre héros s’échappe la nuit pour faire régner la justice à la force des poings. Sa vie change le jour où il tombe malgré lui amoureux… de la copine de son frère. Griff the invisible, toujours inédit en France, est une production australienne qui fait le pari osé de marier comédie romantique et film de super-héros, sans que l’on sache, pendant une bonne partie du film, si l’histoire finira par pencher d’un côté ou de l’autre. On pense parfois à Benny and Joon, et cette façon de créer un couple d’amoureux qui se sentent à l’écart du monde et préfèrent cultiver leur différence ensemble. Dans le rôle-titre, Ryan Kwanten prend le contre-pied total de son personnage d’Apollon ahuri de True Blood : raie sur le côté, tics en rafale et moue gênée, il compose un personnage pas si facile à apprécier, guère disposé à mettre de côté sa douce folie ou son rutilant costume en cuir. Sa love story est aussi complexe et surprenante que son parcours de justicier invisible. Malgré des décors étriqués et un dernier acte qui ne plaira peut-être pas à tout le monde, Griff the invisible est une curiosité plutôt rafraîchissante à découvrir.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu de Russie :
Dima (L’éclair noir)

Particularité : doit souvent faire le plein

Dima est jeune et gentil, mais n’a pas de pouvoir : étudiant moscovite sans le sou, il gagne sa vie en vendant des fleurs, et ses parents lui foutent la honte en lui achetant la 2CV locale, une Volga 21. Mais la voiture n’a rien d’une épave. C’est en fait un prototype carburant à un nano-catalysateur très rare (ou quelques chose approchant), qui va faire de lui un héros en bonne et due forme, et forcément, lui occasionner quelques problèmes… Derrière L’éclair Noir, on trouve Timur Betamtemktov, le Michael Bay local, passé à l’Ouest avec Wanted et le prochain Abraham Lincoln Vampire Hunter. Il produit ce Black Lightning mixant Christine et Spider-Man, auquel il emprunte autant la structure scénaristique que les idées visuelles (la voiture volante évoque plus d’une fois Spidey virevoltant entre les buildings new-yorkais). Un poil avare en scènes d’action et destiné à un public adolescent, L’éclair noir est un divertissement sans conséquence, mais qui montre pour la première fois l’intérêt de la patrie de Tolstoï pour le genre super-héroïque. Qui l’eut crû ?

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu du Brésil :
Besouro

Particularité : adore les grenouilles

Brésilien persécuté par la junte militaire pour ses origines africaines, Besouro est un combattant légendaire, défenseur des opprimés dans les tumultueuses années 20. Motivé par la vengeance après l’assassinat de son maître, le plus grand des capoeiristes acquiert la protection des dieux pour mener à bien son combat pour la liberté. En portugais, « besouro » signifie scarabée. On ne sait si cela désigne les mouvements de jambe de cette figure légendaire de l’histoire du Brésil, mais c’est en tout cas un surnom plutôt cool pour un super-héros très exotique. Besouro peut être vu comme une version quelque peu fantastique (avec visions hallucinogènes du monde par les yeux d’une grenouille, lévitation et bonds prodigieux) d’Ong Bak. Les combats y sont moins brutaux qu’artistiques : c’est toute une philosophie qui s’exprime à travers la quête de Besouro, le « maîtres des maîtres » comme il est appelé là-bas.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu des USA :
Les (Special)

Particularité : aime bien les costumes de cosmonautes

Les (oui, son prénom est Les, même pas le diminutif de Leslie) a des petits soucis de santé : soumis à des tests de médicaments expérimentaux pour gagner un peu mieux sa vie, il est maintenant et viscéralement persuadé qu’il a des super-pouvoirs. Qu’il peut traverser les murs, et planer au-dessus du sol. Il est spécial, et « personne ne pourra l’arrêter ». Précurseur de la vague des « supers zéros », ce Special réalisé en 2006 et distribué tardivement chez nous met en vedette Michael Rapaport, grand roux tchatcheur né à New York, éternel second rôle qui prouve ici qu’il peut tenir des films sur ses épaules. Dans le rôle de Les, qui rappelle Defendor, il montre une vraie sensibilité, malgré son comportement suicidaire (il faut le voir s’éclater contre un mur à pleine allure, avant de dire « vous voyez, je ne suis pas comme tout le monde »). Il est la principale attraction de ce film à petit budget, précurseur d’un sous-genre qui n’a pas fini de faire des émules.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu d’Inde :
G.one (Ra.One)

Particularité : a toujours un flacon de gel coiffant sur lui

G.One est plus qu’un super-héros : c’est un programme virtuel blindé de capacités surnaturelles, engoncé dans une combinaison luminescente bleue et une coupe de cheveux indécoiffable, qui va devoir se propulser dans notre monde (le monde réel, quoi, enfin celui du cinéma… donc pas tout à fait le monde réel… raaah, sémantique, quand tu nous tiens !) pour venger son créateur et alter ego, Shekhar, et combattre son ennemi juré, « Random access 1 », aka Ra.One. À l’échelle du cinéma indien, Ra.One est plus qu’une grosse production : c’est le Titanic local (ou l’Avatar, comme vous voulez), mastodonte marketing annoncé à grands renforts de teasers et d’affiches pendant plus de deux ans et converti en 3D à l’arrache. Sorti en octobre 2011 dans son pays, le film tente, sans grande surprise, l’écart entre blockbuster bling bling multipliant scènes de danse et d’action assez sages – on est loin du redoutable Endhiran sorti l’année d’avant – et manifeste mégalomaniaque à la gloire de sa star/producteur, Shah Rukh Khan. Cependant, Ra.One vaut le coup d’œil : il serait temps qu’on puisse découvrir ici en salles ces grands spectacles totalement décomplexés, mélangeant bonne humeur, grand spectacle et romance, tout entier voués au plaisir du spectateur. Et tant pis si c’est pour admirer le one man show d’une idole en plein délire super-héroïque.

Top 10 : Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vuVenu de Paris : Vendôme

Particularité : devrait mettre du parfum

Ultra rapide, ultra agile, vêtu de noir avec un masque évoquant à la fois Batman et un Playmobil adepte du cuir, Vendôme est un super-héros comme la France devrait en avoir. Car s’il n’a pas encore passé les portes du cinéma, Vendôme a toutefois créé le buzz à sa sortie sur le Net en 2007. Ce court-métrage réalisé par un petit génie des effets digitaux, David Tomaszewski, a pris la forme d’une pub (non diffusée) pour Axe pour pouvoir être produit. Et la compromission en valait la peine : propulsé à toute allure à travers la capitale, ce super-héros qui sent sous les bras (sic) court sur la Seine, s’agrippe à Notre-Dame pour y déloger des gargouilles, fait des bonds à la John Carter… On rêve depuis de le voir en action, le projet de long-métrage ne s’étant pas concrétisé. Ni aucun autre du même genre, d’ailleurs. Alors, la France, on attend quoi, là ?

Dix film de super-héros que vous n’avez (probablement) pas vu sur Amazon