Top 10 : les astronautes au cinéma

par | 18 octobre 2013

Gravity vient rejoindre une longue liste d’œuvres ayant exploré l’espace infini et ses explorateurs. BTW passe en revue ces films où l’astronaute devient un héros de cinéma.

Les artistes n’ont pas attendu l’invention du cinématographe pour être fascinés par l’exploration spatiale. Quand, en 1902, Georges Méliès tourne dans ses studios de Montreuil le révolutionnaire Voyage dans la Lune, il emboîte le pas à un illustre prédécesseur, Jules Verne, l’un des premiers à avoir captivé l’imagination de ses lecteurs en prédisant la possible conquête de l’espace par l’homme. Jusqu’au début des années 60, cette possibilité restera du domaine de la science-fiction, voire de la fantaisie pure. Cinquante ans plus tard, l’orbite terrestre est devenue paradoxalement surpeuplée en satellites et stations spatiales, comme l’apprennent à leurs dépens les astronautes de Gravity. Plus de 500 pilotes de toutes origines (surtout américaine, russe, français et bientôt chinois) ont eu le privilège d’observer notre planète vu d’en haut, et si depuis Neil Armstrong, l’idée a perdu une partie de sa magie initiale, les astronautes n’ont eux cessé de fasciner le monde du cinéma.

Top 10 : les astronautes au cinéma

Aussi, pour célébrer comme il se doit la sortie du film d’Alfonso Cuaron, nous faisons un voyage chronologique dans l’histoire du 7e art à la découverte des films les plus marquants mettant en scène ceux qui sont autant des aventuriers et explorateurs au courage invraisemblable (rappelons que plusieurs d’entre eux ont péri dès le décollage raté de leur navette) que des fonctionnaires de l’espace surqualifiés. Bien sûr, les portraits qui ont été faits des astronautes ne sont pas toujours hyperréalistes, mais nous avons malgré tout privilégié les titres ne relevant pas essentiellement de la science-fiction. Pas de Star Wars ou d’Alien ci-dessous : les vrai astronautes ont conquis pour l’instant une seule galaxie, et l’exploit est déjà en soi… astronomique.

DESTINATION LUNE (1950)

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Tourné à une époque où les voyages lunaires était avant tout l’affaire de la bande dessinée et de la littérature (Objectif Lune, l’album de Hergé, commence à être publié la même année), Destination Lune anticipe avec un luxe étonnant de détails les challenges et les difficultés auxquelles la Nasa serait confrontée quelques années plus tard, dans son objectif de faire atterrir l’Homme sur la Lune. Georges Pal, futur producteur de La guerre des mondes, a en effet eu le nez creux en embauchant l’écrivain de SF Robert A. Heinlein (Starship Troopers) pour donner à son scénario une patine plus réalistes que les Buck Rogers et Flash Gordon qui faisaient alors le bonheur des ados. Bien sûr, 63 ans après sa sortie, le film paraît monstrueusement kitsch, tout comme les drôles de tenues spatiales de notre valeureux équipage. Détail intéressant, dans ce film du prolifique Irvin Pichel, ce n’est pas la Nasa (qui s’appelait alors NACA) et donc le gouvernement qui finance le voyage, mais un conglomérat d’industriels patriotiques voulant damer le pion à l’ennemi soviétique. De ce côté-là, Destination Lune n’aura pas été très visionnaire…

2001 : L’ODYSSÉE DE L’ESPACE (1968)

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Est-il encore nécessaire de présenter le classique intemporel de Stanley Kubrick, sorti un an avant que le premier Homme ne foule le sol lunaire ? Bien qu’il appartienne fermement au domaine de la science-fiction, 2001 : l’odyssée de l’espace ne fait qu’extrapoler, dans sa partie centrale, sur l’avenir de la conquête spatiale, alors au centre de toutes les attentions. Ce n’est pas un hasard si le réalisateur et Arthur C. Clarke (autre pilier de la littérature SF) choisissent de faire apparaître le monolithe noir sur la Lune, où les Hommes ont dans l’histoire déjà construit une base avancée. Alors qu’une nouvelle frontière va bientôt être franchie, Kubrick transporte lui le spectateur vers l’étape suivante de notre évolution, qui mènera l’astronaute Dave Bowman, au terme de son voyage vers Jupiter, vers un autre niveau de conscience. S’il est loin de provoquer le même ressenti, car plus classique dans son approche, l’audacieuse (car incomparable) séquelle réalisée par Peter Hyams, 2010, vaut également le coup d’œil, notamment pour sa suffocante séquence de sortie extravéhiculaire.

LES NAUFRAGÉS DE L’ESPACE (1969)

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Tombé dans un relatif oubli (et dans le domaine public puisque Colombia Pictures en avait cédé les droits), Les naufragés de l’espace, alias Marooned, tient pourtant une place importante dans le genre « exploration spatiale crédible ». Un casting viril et classieux (Gregory Peck, Gene Hackman, Richard Crenna et David Janssen), un réalisateur prestigieux (un John Sturges en fin de carrière), des effets spéciaux convaincants (Oscarisés à l’époque, d’ailleurs) et des décors particulièrement soignés, répliques authentiques des salles d’opération de Cap Canaveral et du Centre spatial de Houston, participent de la réussite de cette chronique à suspense d’une mission spatiale qui tourne au vinaigre. Alors que trois astronautes dérivent dans l’orbite de la Terre suite à une panne de leur navette, la Nasa doit trouver un moyen de les ramener sur Terre avant qu’ils ne manquent d’oxygène. Coïncidence incroyable, un an après la sortie du film, l’équipage de la mission Apollo 13 connaîtra un sort similaire sur le chemin du retour, les deux événements entraînant la création de nouveaux protocoles de sauvetage dans les années 70. Pas mal pour un film oublié, non ?

CAPRICORN ONE (1977)

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Capricorn One est le genre de petit classique que les amateurs de conspiration doivent secrètement vénérer. Tout comme certains internautes continuent à clamer que les images de l’alunissage d’Apollo 11 auraient en fait été tournées en studio par Stanley Kubrick (sic), le film britannique de Peter Hyams imagine que dans un futur proche, l’envoi d’astronautes sur Mars soit fabriqué de A à Z, la capsule envoyée en orbite autour de la planète rouge étant en fait vide. Mais lorsque celle-ci brûle lors de son retour dans l’atmosphère, l’équipage d’astronautes qui a accepté de jouer le jeu du mensonge se retrouve poursuivi impitoyablement façon Trois jours du Condor. Très étonnamment, ce thriller original, très seventies dans l’esprit, qui questionne le pouvoir de la fiction et des images dans la fabrication de notre Histoire officielle, a reçu le soutien logistique de la Nasa, pourtant décrite ici comme un organisme gouvernemental ne reculant devant aucun « sacrifice » pour protéger ses secrets. On s’éloigne certes (un peu) du sujet, mais Capricorn One vaut indéniablement le détour.

L’ÉTOFFE DES HÉROS (1983)

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Évoqué dans notre récent dossier consacré à Ed Harris (qui va faire bientôt une autre apparition dans cette sélection), L’étoffe des héros prend en 1983 la forme d’un récit épique, brassant une multitude de personnages, de lieux et d’anecdotes, pour retracer de la manière la plus complète qui soit la conquête de l’espace du côté américain, avec le programme d’exploration Mercury (1958-1963), prélude aux missions Apollo. Là encore, la source littéraire du scénario (le livre The Mercury Seven est signé Tom Wolfe) explique le côté foisonnant et ultra documenté du film de Philip Kaufman, qui parvient durant trois heures à maintenir au milieu d’un environnement technologique presque déroutant le souffle d’une aventure humaine à nulle autre pareille. L’excellence du casting convoqué pour incarner ces pionniers de l’espace contribue également beaucoup à la qualité de ce jalon essentiel du genre, qui prend garde à ne jamais glorifier inutilement ces astronautes en herbe, qui devenus des héros pour leur patrie, n’en restaient pas moins terriblement humains.

APOLLO 13 (1995)

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Avec le recul, il ne fait aucun doute que les deux passions qui animent Tom Hanks en dehors des tournages portent sur deux époques-clés de l’Histoire de son pays : la Seconde Guerre Mondiale et la conquête spatiale. Avec Apollo 13, l’un des meilleurs films réalisés par Ron Howard, il réussissait à transformer l’un des plus sérieux échecs de la Nasa, qui faillit perdre en 1970 trois astronautes en mission à cause d’une série d’avaries techniques, en succès populaire célébrant le prosaïsme technologique, l’esprit combatif et le courage inébranlable du personnel de l’agence spatiale américaine. Bien que l’issue de cette histoire soit connue de tous, Apollo 13 reste un film adoré du public pour son réalisme (612 vols à bord de l’avion KC-135, utilisé pour simuler les conditions de gravité zéro, auront été nécessaires pour filmer les séquences de Hanks, Kevin Bacon et Bill Paxton dans leur navette !) et son côté entertainment assumé qui permet de rendre compréhensible et acceptable un jargon incroyablement technique. En mettant en lumière les redoutables défis techniques auxquels chaque mission spatiale doit faire face (en gros, il suffit d’un boulon défectueux pour envoyer tous les participants à la mort), Apollo 13 soulignait paradoxalement la réussite miraculeuse que représentait le travail de la Nasa. Un joyeux paradoxe.

MISSION TO MARS (2000)

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Marchant inconsciemment (ou pas) dans les traces de Kubrick, Brian de Palma tentait avec le mal-aimé Mission to Mars sa première incursion dans le domaine de la science-fiction. Production étrange semblant parfois vouloir s’aventurer en territoire spielbergien (l’entité extraterrestre que rencontrent les Hommes sur Mars leur communique un savoir infini, et s’avère globalement source de vie et de connaissance) pour mieux faire ressortir le côté menaçant de cette mission à haut risque – on y meurt très graphiquement dans des tornades martiennes ou le visage exposé au vide spatial, Mission to Mars s’élève toutefois à plusieurs reprises dans d’autres sphères. Lorsque De Palma orchestre un ballet impromptu en gravité zéro entre Tim Robbins et Connie Nielsen, par exemple, ou lorsque, à l’opposé extrême, il transforme le sauvetage de Robbins en morceau de bravoure d’une cruauté sans nom envers le spectateur. Là encore, les astronautes du film sont vus comme d’indécrottables rêveurs la tête fermement tournée vers les étoiles, confrontés in fine à un univers trop vaste et mystérieux pour qu’ils puissent le dompter.

SPACE COWBOYS (2000)

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Lorsque Clint Eastwood annonce son projet d’envoyer « quatre papys dans l’espace », Space Cowboys apparaît comme une évidence : s’il y a bien une chose que la star oscarisée n’avait pas encore conquis sur grand écran, c’était bien ça. Eastwood, 70 ans à l’époque, convoque alors son vieil ami Donald Sutherland (65 ans), James Garner (72 ans) et Tommy Lee Jones (54 ans, une bleusaille, donc) pour un faux baroud d’honneur amusé où quatre laissés pour compte de la conquête spatiale se voient offrir une chance inespérée de partir enfin tout là-haut, tout en donnant une leçon aux « blancs-becs » qui leur ont succédé. Divertissement haut de gamme tourné dans les locaux même de la Nasa (trop heureuse sans doute de voir une vedette de ce calibre enfiler leur iconique combinaison), Space Cowboys troque l’angoisse du vide et la mélancolie de l’homme face à l’infini, contre une bonne dose d’humour et d’ironie, fidèle en cela aux promesses de son très « serialesque » titre original.

MOON (2009)

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Que le fils de David Bowie choisisse pour ses débuts cinématographiques de filmer un personnage isolé sur la Lune paraît si évident qu’on s’attendrait presque à ce que le personnage de Sam Rockwell s’appelle Major Tom. Avec Moon, sensation indé tournée pour 5 malheureux millions de dollars, Duncan Jones explore finalement les mêmes thèmes et sentiments que son androgyne géniteur. Être le seul occupant d’une base spatiale finit forcément par vous porter sur le système, surtout si vous vous retrouvez loin des objets de votre affection. Il y a bien d’autres richesses à découvrir dans cette pépite du genre, où un Rockwell bluffant d’aisance trimbale sa tristesse existentielle dans d’évocateurs décors et maquettes lunaires. Comme de nombreux récits de science-fiction, Moon questionne le vertige identitaire à travers le thème du double, et met l’humanité de son héros à nu en l’isolant, loin de sa Terre natale, dans un décorum technologique d’une froideur révélatrice. Un classique en devenir, dont l’ambition poétique n’est pas la moindre des qualités.

APOLLO 18 (2011)

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Ok, dans le cas présent, il ne s’agit pas d’un chef d’œuvre oublié ou d’une date dans l’histoire du cinéma. Apollo 18, première incursion du cinéaste espagnol Gonzalo Lopez-Gallego (Les Proies) à Hollywood, est une série B criblée de défauts, dont le plus gênant reste sans doute sa facture visuelle redoutablement laide, format found footage quasi monochrome (le film se déroule quasi uniquement sur la face cachée de la Lune) oblige. Le postulat de départ est pourtant malin à défaut d’être bien exploité : en imaginant le destin funeste d’une mission spatiale confrontée, une fois alunie, au mystère de la disparition d’un équipage russe et à un possible parasite extraterrestre, Apollo 18 injecte une dose d’horreur dans un univers généralement composé de données froidement scientifiques et de paysages désertiques. Un nombre réduit de personnages, des dialogues irritants et un rythme en dents de scie handicapent pourtant cette excitante proposition, jusqu’à une révélation finale aussi timbrée dans l’idée que ridicule dans l’exécution. Bonus point en tout cas pour avoir exploité, dans un cadre en apparence réaliste, le côté angoissant de l’exploration spatiale, et pour avoir pondu cette brillante tagline : « Il y a une raison pour laquelle nous ne sommes jamais retournés sur la Lune ».

Bonus : Un petit pas pour l’Homme