Unicorn Store : un ego-trip dégoulinant
Tourné avant Captain Marvel, Unicorn Store ressemble plus à un film-guimauve un peu gênant qu’à une révélation pour l’actrice devenue réalisatrice Brie Larson.
Bien que Brie Larson se soit construite une filmographie solide (couronnée d’un Oscar mérité pour Room) avant d’intégrer l’écurie Marvel pour les succès milliardaires Captain Marvel et Avengers : Endgame, il est évident que pour le grand public, Unicorn Storeest devenu le « nouveau film avec l’actrice qui joue Carol Danvers ». Bien que tourné avant ces deux blockbusters super-héroïques (le film avait été présenté au festival de Toronto en 2017), Unicorn Store présente l’avantage, de compter à l’affiche l’un des grands amis de l’actrice, Samuel L. Jackson – les deux acteurs ne se quittent plus puisqu’ils étaient déjà sur le plateau de Kong : Skull Island avant cela. Bref, Netflix, qui a acquis les droits du long-métrage, a judicieusement attendu que la tornade médiatique qui entoure Brie Larson soit arrivée à son pic pour distribuer Unicorn Store. Et cette attention est plutôt bienvenue pour un tel film, première réalisation de l’actrice percluse de clichés et de tics énervants typiques du cinéma indépendant yankee.
Jusqu’au bout de ses rêves
Dans Unicorn Store, Brie Larson incarne Kit, une adulescente selon nos critères modernes, qui à bientôt 30 ans, n’a pas réussi à transformer ses années d’études artistiques en véritable carrière professionnelle. Vivant toujours chez ses parents, d’éternels optimistes un peu envahissants, Kit est entourée des totems de son enfance, de peluches et de paillettes. Cette rêveuse invétérée décide malgré tout d’intégrer une agence de pub en tant qu’intérimaire. Un boulot grisâtre au possible, où elle reçoit bientôt une invitation de la part d’un magasin éphémère, tenu par un homme étrange (Jackson perruqué et fidèle à lui-même), qui lui annonce qu’il élève et vend l’animal qui a obsédé Kit toute sa vie : une licorne. Pardon, une licorne ?
"Unicorn Store tient davantage de l’ego-trip sans filet que de la révélation surréaliste à la Michel Gondry."
Loin de nous l’idée de préjuger de la sincérité de Larson, actrice engagée qui semble avoir mis beaucoup d’elle-même dans ce premier long-métrage s’ouvrant sur des images bien réelles de sa propre enfance. Kit, jeune femme déçue de réaliser que le monde des adultes ne voit pas la vie avec les mêmes couleurs d’arc-en-ciel perpétuel qu’elle, représente l’épitomé de l’artiste excentrique en butte à la normalisation galopante, courant après les souvenirs mirifiques d’une enfance jamais vraiment terminée. Cette image nous est à vrai dire martelée de la première à la dernière seconde d’Unicorn Store. Un film qui se veut une chronique tendre d’une femme poursuivant ses rêves même quand ils sont déraisonnables aux yeux des autres, mais qui semble surtout étirer jusqu’à l’impossible une idée de scénario justifiant à peine un moyen-métrage. Trouvant plus le ridicule que le poétique dans toutes ses intrigues (Kit imagine une campagne pour vendre des aspirateurs, Kit flirte avec un employé de magasin au flegme désarmant – excellent Mamoudou Athie -, Kit construit une étable colorée dans son jardin…), Unicorn Store tient davantage de l’ego-trip sans filet que de la révélation surréaliste à la Michel Gondry. Le film tient debout essentiellement grâce au métier de ses acteurs, malgré le fait qu’ils semblent peu convaincus par l’écriture de leurs personnages, et par la vacuité de cette ode aux rêveurs en panne, paradoxe ultime, d’idées folles