Pour son deuxième long-métrage, le réalisateur de Ghosted, Craig Viveiros s’offre un casting en or massif. En 1984, Tim Roth incarnait un apprenti criminel face à John Hurt dans The Hit. Aujourd’hui, c’est à lui d’enseigner l’art du crime à un jeune premier. Trente ans plus tard, le grand Tim Roth campe un tueur professionnel qui aspire à la retraite. La relève est assurée par l’excellent Jack O’Connell, véritable étoile montante du cinéma british (This Is England, Eden Lake, Harry Brown et, plus récemment le très bon Tower Block). Talulah Riley incarne La Fille, après avoir interprété La Blonde dans Inception. Décidément… Pour couronner le tout, Peter Mullan (Tyrannosaur, Cheval de Guerre) joue le tyrannique beau-père de Jack O’Connell.

[quote_left] »La mise en scène honnête et élégante promet un bon moment, mais ne s’éloigne jamais de sa zone de confort. »[/quote_left]Pour rembourser la voiture de son beau-père qu’il a bousillé, Adam, 19 ans, accepte de servir de chauffeur à un mystérieux « installateur de cuisine », qui se révèle un tueur à gages vieillissant. Roy doit remplir une dernière mission, avant d’aller marier sa fille. Rondement menée, l’histoire oscille entre la tragi-comédie de boulevard et le polar existentialiste et social à l’anglaise. Dans ce polar à petit budget qui s’attache à rester cool et branché, les mafieux sont idiots, les assassins émotifs, les femmes fatales tellement flippantes qu’elles en deviennent drôles. Il prend pour décor la région de Northumbrie, au nord de l’Angleterre. Pour servir son histoire, il filme ces beaux paysages de littoral de manière morne et terne, qui n’est pas sans rappeler Berck, un jour de mauvais temps.

Le crime était presque parfait

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Dans cette ambiance tragi-comique, Tim Roth lâche, d’un air innocent, des répliques tarantinesques du genre « Je n’ai pas tué une femme depuis 1993″. Face à lui, le jeunot bêta enchaîne les bourdes sous l’œil laconique mi-excédé, mi-indifférent de son mentor. Pour parachever son éducation au crime, il supplie son instructeur de le laisser démembrer un cadavre, naïvement persuadé que ce savoir lui ouvrira les portes de la réussite.

The Liability mélange allègrement les références, à commencer par Bons baisers de Bruges agrémenté d’une touche de Tarantino et de Stephen Frears. Craig Viveiros (ancien chef opérateur) et sa caméra enveloppante qui n’est pas sans rappeler l’univers des frères Coen, entraînent le spectateur sur une route semée de cadavres, de trahisons, un parcours bien connu des amateurs de série noire. La mise en scène honnête et élégante promet un bon moment, mais ne s’éloigne jamais de sa zone de confort. La sauce prend de manière originale, bien qu’elle se heurte fatalement à une impression de déjà-vu. Concentré sur sa comédie noire, Craig Viveiros oublie de justifier l’incroyable absence de la police, chaque décor traversé par le duo semblant être aussi désert que les côtes d’Écosse. Le film tient aussi, en partie, grâce à la prestation parfaite et complémentaire des deux héros. Tim Roth, dans un registre familier, déroule une technique impeccable et sans cabotinage. Jack O’Connell, loin d’être impressionné face à cette légende vivante, se donne à fond dans un rôle de chien-fou qu’il commence lui aussi à bien connaître, lad gentiment énervant et crédible de A à Z. Leur duo, aussi simple qu’il soit, fonctionne au-delà de nos espérances. The Liability, littéralement, « le boulet » ou « le handicap », se révèle être une des perles rares de la sélection thriller de ce Bifff 2013.


[styled_box title= »Note Born To Watch » class= » »]
Quatresurcinq
Last Hitman (The Liability)
De Craig Viveiros
2013 / Grande-Bretagne / 95 minutes
Avec Tim Roth, Jack O’Connell, Talulah Riley
Sortie le 1er octobre 2014
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