Tower Block : expropriation fatale

par | 1 octobre 2012

Sur un pitch qui évoque La Cible, Tower Block, modeste mais brutale production british, marque des points grâce à des acteurs et un rythme solides.

Mais que se passe-t-il cette année avec les HLM ? L’image de la barre de béton renfermant mille dangers semble être au goût du jour dans le film de genre, comme si l’architecture verticale et imposante de ces cités-dortoirs semblait inspirer les scénaristes en mal de high concept. La Horde, Attack the block, The Raid, Dredd, Citadel et maintenant Tower Block : autant de films se déroulant entre les quatre murs d’immeubles en perdition, qu’une poignée de personnages essaie d’investir ou de quitter malgré les dangers qui l’entoure. Au choix : des trafiquants de drogues, des zombies, des aliens, des mutants ou en ce qui concerne Tower Block, un sniper fou. Celui-ci s’en prend aux derniers habitants de la tour 31, un « block » miteux en voie de démolition, des irréductibles refusant d’être délogés (on ne sait pas trop pourquoi), et que les années passées à être témoins de la violence des gangs ont rendus insensibles ou très prudents.

Le prétexte est minime, tout comme le décor : une fois que chaque appartement commence à être visé par le tireur, l’action se déplace dans le couloir de l’unique étage encore habité, un simple corridor où va se dérouler l’essentiel de l’action. Qui est le tireur ? Pourquoi abat-il des familles entières sans sommation, piégeant toutes les issues et empêchant tout témoin d’entrer vivant dans la tour ? La pureté d’un tel postulat fait immanquablement penser à des classiques comme Assaut, sauf qu’ici, la poignée de survivants est totalement désarmée face à cette violence foudroyante et impitoyable, et ne peut que se résoudre à trouver des moyens d’évasions tous plus précaires les uns que les autres.

Stuck in the block

James Nunn et Ronnie Thompson, respectivement réalisateur de seconde équipe et scénariste, endossent ici pour la première fois le costume de réalisateur, après s’être croisés sur une production déjà bien virile, le film de prison Carcéral. Avec un budget qu’on devine serré (hello les fausses fumées, la photo terreuse et les transparences approximatives), et des acteurs convaincants (la jolie et, hum, virile Sheridan Smith, ainsi que Jack O’Connell, qui a grandi depuis son rôle de petite frappe psychotique d’Eden Lake, et qui joue ici… une petite frappe avec un bon fond), le duo parvient à maintenir pendant 90 petites minutes une tension constante, au prix de quelques incohérences, dans la gestion de l’espace notamment, et plusieurs facilités de scénario.

« L’efficacité de la menace, pour l’essentielle invisible, vient de cette redoutable économie de moyens. »

L’efficacité de la menace, pour l’essentielle invisible, vient de cette redoutable économie de moyens : une balle sanctionne la moindre imprudence des personnages, qui, rendu fous par l’injustice sadique de cette situation, en sont parfois rendus à avoir des réactions que l’on pourra juger farfelues – après tout, dans cette situation, qu’est-ce qui empêche ces locataires de rester à l’abri jusqu’à l’arrivée des autorités ? De même, l’obligatoire dénouement « spectaculaire », s’il reste logique, déçoit un peu par son explication psychologique tirée par les cheveux, en même temps qu’il donne un aspect totalement surréaliste à la violence de l’attaque qui a précédé.

Ces quelques réelles réserves n’empêchent pas de louer une fois de plus l’efficacité dont fait preuve cette nerveuse production britannique, qui a pour unique but d’aller directement dans le vif du sujet sans fioritures (un mal pour un bien, en tout cas pour les pinailleurs), et de clouer à intervalles régulières le spectateur dans son fauteuil. Noble ambition, n’est-il pas ?