De la série Oz à La Grande Évasion, en passant par Un Prophète, le huis clos carcéral suit des chemins clairement balisés. Il devient délicat pour un réalisateur de sortir de ces sentiers longuement rabattus. Le britannique David MacKenzie s’est risqué sur ce terrain en ayant à sa disposition un scénario original parfaitement maîtrisé et un jeune acteur particulièrement intense. Grâce à ces atouts indéniables, Starred up, qui porte bien son (long) nom français, récompensé par le prix du Jury à Beaune, mérite amplement le détour dans ses geôles irlandaises.

D’excellentes cartes en jeu

Les poings contre les murs : a history of violence

Le scénario s’inspire d’un roman de Brian Morton (Une Fenêtre sur l’Hudson, Des Liens trop fragiles). Le romancier a passé plusieurs années à animer un groupe de parole en prison pour prouver que celle-ci n’engendre pas forcément la violence. Pour mettre en image son récit, l’un des meilleurs réalisateurs anglais actuels, David Mackenzie (Perfect Sense) et sa productrice Gillian Berrie (Citadel) ont fait leurs débuts dans le film de (sous-)genre.

En effet, Sigma Films a produit les derniers longs-métrages du metteur en scène, du drame avec My Name Is Hallam Foe à la comédie romantique expérimentale dans Rock’N’Love. Ayant mûri sa carrière Skins et This is England, Jack O’Connell crève depuis littéralement l’écran dans The Liability, Tower Block ou encore Harry Brown aux côtés de Michael Caine. Un seul essai a suffi à ce jeune acteur typiquement british pour convaincre Mackenzie de lui confier le rôle-titre.

Tu iras en prison, mon fils

Les poings contre les murs : a history of violence

Éric est une petite frappe qui à tendance à devenir très agressif. Emprisonné pour meurtre, il entre, à peine majeur, dans un univers carcéral adulte. Dans cette prison se trouve son père, condamné à perpétuité et qu’il n’a pas revu depuis quinze ans. Refusant d’être pris sous son aile, il tente de s’adapter seul, mais commet des erreurs dramatiques.

[quote_center] »David Mackenzie choisit de dépendre la vie en prison de manière ultra-réaliste, sans chercher à glorifier la violence, bien au contraire. »[/quote_center]

Le film raconte sa longue descente aux enfers dans un monde aliénant et violent. En perte de repères, le garçon de 19 ans cherche une figure paternelle. Dans sa quête, il se rapproche de plusieurs personnes, notamment de son père, cet homme brisé qui finira par le guider dans la bonne direction.

Entre les coups

Les poings contre les murs : a history of violence

David Mackenzie braque à chaque seconde sa caméra sur le corps bestial et martyrisé de Jack O’Connell. L’acteur laisse éclater les instincts contradictoires de son personnage, tourmenté entre l’amour et la haine. Du sang et des larmes d’un enfant qui a grandi trop vite naîtront à l’écran, un adulte affranchi de la rédemption paternelle. D’ailleurs le père, incarné par Ben Mendelsohn (The Place Beyond the Pines), parcourt également un long chemin avant de pouvoir accepter son rôle de guide.

S’appuyant sur l’expérience de Brian Morton, David Mackenzie choisit de dépendre la vie en prison de manière ultra-réaliste, sans chercher à glorifier la violence, bien au contraire. Le racisme, les injures verbales et les trafics en tout genre n’épargnent personne derrière les barreaux. Pour lutter contre les excès de colère des prisonniers, un groupe de parole s’organise autour d’un psy joué par Rupert Friend (Homeland). Le héros tente d’y canaliser sa haine. Des scènes tantôt drôles, tantôt inquiétantes ou dérangeantes en découlent.

Sans devenir indispensable, Les poings contre les murs propose un traitement intéressant du film de prison tout en dénonçant les aberrations et les dangers universels qui s’y accumulent. Au-delà du sous-texte politique, le drame familial et sentimental qui se joue derrière les barreaux apporte une note inédite dans un genre parfois éculé, sur un mode qui rappelle notamment le puissant Au nom du père de Jim Sheridan. Starred up restera surtout dans les mémoires grâce à la prestation extrême de Jack O’Connell, complètement impliqué dans son rôle.


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Quatresurcinq
Les poings contre les murs (Starred up)
De David Mackenzie
2014 / Angleterre / 106 minutes
Jack O’Connell (II), Ben Mendelsohn, Rupert Friend
Sortie le 4 juin 2014
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