Si l’annonce des nominations pour les prochains Oscars est encore loin de nous (et nul doute que la traditionnelle course aux statuettes sera largement commentée d’ici 2015), une première catégorie retient chaque année l’attention en amont de la cérémonie. L’Oscar du meilleur film étranger est en effet une sélection de prestige pour le reste du monde : voir une production locale sélectionnée, ou mieux encore, gagner la précieuse récompense est un véritable facteur de rayonnement culturel, en plus d’indiquer la bonne santé d’une cinématographie assez riche pour impressionner les votants de l’Académie.

[quote_center] »Qui succédera à Paolo Sorrentino en 2015 ? 83 pays sont candidats »[/quote_center]

Dans les faits, la représentativité est pourtant assez limitée, puisqu’en 58 ans, seule une vingtaine de pays a remporté l’Oscar, avec deux pays dominant largement les débats : la France et l’Italie (plus de la moitié des récompenses à eux deux). Si nous n’avons pas remporté de prix depuis l’Indochine de Régis Wargnier, l’Italie est en revanche sortie vainqueur de l’édition 2014 grâce à La grande bellezza. Qui succédera à Paolo Sorrentino en février prochain ? Parmi les 83 pays candidats, les favoris sont cette année à chercher, comme souvent, du côté des derniers sélectionnés cannois : Winter Sleep, Mommy, Saint-Laurent pour la France, Deux jours une nuit, Leviathan, Les nouveaux sauvages… Moins mis en avant, Timbuktu (Mauritanie), le récent Tuer un homme (Chili), ou Ida (Pologne) ont aussi des chances de rejoindre la shortlist des nominés, qui seront connus en janvier.

Nous avons pour notre part choisi de mettre en lumière cinq purs outsiders, des films moins « étincelants » en terme de prestige international. Auront-ils la chance de concourir pour la statuette ? Impossible de le savoir, mais en attendant, petite présentation des cinq films assortie de leurs bandes-annonces !


The Liberator

Pays : Vénézuela

Genre : biopic épique

Oscar du film étranger : cinq outsiders pour 2015

Pour un pays sud-américain de moyenne importance (cinématographiquement s’entend !) comme le Vénézuéla, The Liberator est une production spéciale à plus d’un titre. D’une part, c’est un énorme budget au regard des critères locaux, le film, réalisé par Alberto Arvelo, s’étant monté notamment avec des capitaux espagnols – ce qui explique la présence de nombreux techniciens familiers des plateaux de Balaguero, par exemple. De l’autre, c’est un biopic chroniquant la vie et les batailles du mythique général Simon Bolivar, qui amena les colonies d’Amérique du Sud à s’émanciper du joug espagnol, et qui donna même son nom à un pays, la Bolivie. Bref, The Liberator, ou Libertador, c’est un peu l’équivalent d’un Alexandre ou d’un Napoléon sud-américain, l’ambition du projet s’exprimant déjà bien dans un trailer épique. Dans le rôle-titre, l’enfant du pays Edgar Ramirez (Carlos, Zero dark thirty)  fait une tête d’affiche crédible et charismatique. Après avoir été présenté à Toronto, le film est en attente de sortie chez nous, et son côté superproduction pourrait bien séduire Hollywood. Pourquoi pas ?

La bande-annonce :


Force Majeure

Pays : Suède

Genre : psychodrame enneigé

Oscar du film étranger : cinq outsiders pour 2015

Certes, Force majeure (en français dans le texte) n’est pas un titre sorti de nulle part pour qui a suivi l’actualité du dernier Festival de Cannes. Présenté non pas en compétition officielle, mais à Un certain regard, et lauréat du prix du jury dans cette section, le film de Ruben Östlund s’apparente à une expérience douloureuse et satirique à la fois, autour de la spectaculaire déconstruction d’une famille suédoise modèle. Une avalanche imprévue dans une station alpine déclenche un psychodrame douloureux en haute altitude, dont est principalement victime Tomas, le père de famille, qui a fait une erreur fatale durant cette quasi-catastrophe. Le contraste entre cette histoire provocatrice et le décor en apparence idyllique, mais en réalité très significatif, de la haute montagne, est l’une des grandes forces de ce film scandinave d’ores et déjà acclamé par la critique, et prévu pour en sortie en 2015 chez nous (sous le titre anglicisé (sic) absurde de Snow therapy).

La bande-annonce :


Vivir es facil con los ojos cerrados

Pays : Espagne

Genre : road movie sixties

Oscar du film étranger : cinq outsiders pour 2015

C’est le grand triomphateur de 2014 aux Goya, les Césars espagnols : meilleur film, réalisateur, acteur, actrice, scénario et musique. Qui dit mieux, franchement ? Et pourtant, Vivir es facil con los ojos cerrados (littéralement « Vivre est plus facile avec les yeux fermés », on attend de pied ferme le titre français, donc) est toujours inédit dans nos contrées, allez comprendre. Le film de David Trueba, fils du célèbre Fernando Trueba (Belle époque, Chico et Rita), nous plonge dans les années 60, en pleine Espagne franquiste, pour un road-movie solaire sur fond de Beatles, mené par l’excellent Javier Camara (Parle avec elle). Il y joue un fan transi de John Lennon qui saute dans sa Fiat lorsqu’il apprend que la star tourne dans son pays. Il embarque dans son voyage deux jeunes représentant l’avenir du pays. Il n’est pas besoin de creuser bien loin pour comprendre le succès de ce feel good movie plus pertinent et original que la moyenne, qui peut avec un peu de chance créer la surprise aux Oscars au milieu de favoris un poil trop sérieux. En attendant une date de sortie chez nous…

La bande-annonce :


Sea Fog (Haemoo)

Pays : Corée du Sud

Genre : drame en haute mer

Oscar du film étranger : cinq outsiders pour 2015

Aussi incroyable que cela puisse paraître, malgré le boom cinématographique incroyable qu’a connu le cinéma sud-coréen au tournant des années 90, aucune production locale n’a été nominée à l’Oscar du film étranger. Une statuette pour Memories of Murder, entre autres, n’aurait pas été volée, mais bon : l’important c’est de participer, et cette année encore, le pays envoie un candidat ayant fière allure. Sea Fog, ou Haemoo en VO locale, est un drame maritime adapté d’une pièce elle-même inspirée d’une tragique histoire vraie… et c’est réalisé par le scénariste de… Memories of Murder ! Haemoo se passe intégralement à bord d’un chalutier, dans une sorte de variation des Dents de la mer, sans les requins, mais avec des garde-côtes : l’équipage du bateau cache en effet à son bord des immigrés clandestins, qu’il transporte pour arrondir les fins de mois. Traîtrise et météo calamiteuse vont aller de pair pour transformer la traversée en désastre. Gros carton dans son pays, Sea Fog fera l’ouverture du prochain Festival du film coréen, avant d’accoster dans nos salles en mars prochain.

La bande-annonce :


The Gambler

Pays : Lituanie

Genre : film noir

Oscar du film étranger : cinq outsiders pour 2015

C’est l’un des grands plaisirs qu’apporte le décorticage des films soumis à l’Académie des Oscars par les pays étrangers : il se glisse toujours dans le lot quelques comédies déjantées, bizarreries et films de genre assumés, qui ont peu de chance de séduire les votants, mais tentent crânement leur chance. La Hongrie a ainsi proposé le film d’invasion canine White God, l’Autriche un western (The dark valley) et la Lituanie The Gambler, un film plus noir que noir, dont le trailer suggère une ambiance à la fois cafardeuse et pleine d’adrénaline. Ce curieux thriller a comme héros un secouriste ayant des problèmes d’addiction au jeu, Vincentas, qui propose bientôt à ses collègues des paris funestes sur les victimes qu’ils partent secourir. Forcément, avec une idée de sagouin pareille, les embrouilles ne tardent pas à arriver au galop, d’autant que Vincentas a la mauvaise idée de tomber amoureux au même moment. Ça va bien finir ? Logiquement, non. Sortie frenchy prévue quelque part entre maintenant et 2017, si tout va bien.

La bande-annonce :