Avec ses deux derniers films, Alex de la Iglesia a effectué un grand écart aussi inattendu que virtuose. Alors qu’on se remettait à peine de son foutraque, bancal, et baroque Balada Triste de Trompeta, retour au bercail fracassant après l’expérience anglo-saxonne Crimes à Oxford, le réalisateur espagnol livrait en 2012 avec Un jour de chance son film le plus amer, mais aussi le plus posé et émouvant. Conte cruel renvoyant la société ibérique à ses propres contradictions, le film servait manifestement d’exutoire à son très engagé auteur, qui démissionnait quelque mois plus tôt de son poste de président de l’Académie du Cinéma Espagnol, en signe de protestation contre la loi Sinde (équivalent d’Hadopi). Le vilain garnement de Bilbao se montrait sous son visage le moins connu, celui de l’activiste culturel n’ayant pas peur d’affirmer sans ambages ses positions personnelles, comme l’aura prouvé son épique discours lors des Goya 2011.

 

Les sorcières de Zugarramurdi : le sabbat de La Iglesia !Mais comme dirait Tarantino, le plus important, ça reste au final le cinéma. Et De la Iglesia est donc de retour cette année, et son aparté « sérieux » semble déjà loin, très loin. Avec Les sorcières de Zugarramurdi, le cinéaste va faire hurler de bonheur les nostalgiques du Jour de la bête et de Mes chers voisins. Le film, prévu pour sortir le 27 septembre dans son pays natal et le 30 octobre chez nous, s’annonce comme une comédie cintrée et puissamment incorrecte, prenant place dans le village bien réel de Zugarramurdi, situé en Navarre, et connu en Espagne pour être une sorte de version basque de Salem, avec réunions sataniques dans des grottes et Inquisition sanglante. C’est là que vont devoir se réfugier trois braqueurs madrilènes et un petit garçon, en route pour EuroDisney (sic) après un hold-up spectaculaire. Pas très finaud mais dur à cuire, le gang va devoir faire face à une horde de sorcières aussi séduisantes que diaboliques, mené par la terrifiante Graciana Barrenetxea…

 

Le premier teaser du film annonçait déjà la couleur, s’ouvrant sur un braquage perpétré shotgun à la main par nos loustics déguisés en Jésus doré, en Action Man ou en homme invisible (!). Le nouveau trailer, qui se passe très bien de sous-titres, enclenche dès le départ la quatrième, au son du New Noise remixé par les Bloody Beetroots. [quote_right] »Le film s’annonce comme une comédie cintrée et puissamment incorrecte. »[/quote_right]Ça va très vite, c’est gore, c’est blindé d’humour noir et c’est prodigieusement réalisé (guettez ce fulgurant travelling avant à la Sam Raimi). Une nouvelle fois associé à son comparse Jorge Guerricaechevarria pour le scénario, Alex de la Iglesia se repose pour agrémenter le voyage sur des valeurs sûres, qu’il s’agisse de ses héros (Hugo Silva et Mario Casas, respectivement découverts dans The Body et Groupe d’élite), ou de ses méchantes, campées avec ce qu’il faut de démesure par Carmen Maura et sa muse Carolina Bang. Cerises sur le bûcher, l’omniprésent Carlos Aréces, qui enchaîne avec son douzième film en trois ans, et l’obligatoire Santiago Segura figurent aussi au générique de ce qui s’annonce comme un grand moment de chaos et de folie furieuse !