Si tu me venges : la vengeance aux deux jeunes visages

par | 19 septembre 2022

Si tu me venges : la vengeance aux deux jeunes visages

Maya Hawke et Camila Mendes complotent gentiment dans Si tu me venges, un teen movie acidulé et inoffensif.

Beaucoup d’entre vous sont peut-être trop jeunes pour se souvenir de Sexcrimes (quoique le film est régulièrement rediffusé à la télévision), le thriller invraisemblable et polisson de John McNaughton avec Denise Richards et Neve Campbell. L’histoire se concentre sur deux filles du lycée diamétralement opposées, l’une populaire, girly et condescendante, l’autre timide, marginalisée et garçonne, qui se retrouvent dans un même lycée pour ultra-riches de Floride. Feignant de ne pas se connaître, les deux jeunes femmes ont en fait mis sur pied une machination diabolique… Le scénario de ce gros plaisir coupable est contre toute attente remis au goût du jour dans Si tu me venges, le long-métrage de Jennifer Kaytin Robinson, à la petite différence près que l’on n’y voit ni sexe… ni véritables crimes.

Deux vengeuses amies-amies

Si tu me venges : la vengeance aux deux jeunes visages

Il n’y a en effet ni procès, ni meurtres dans cette production rose bonbon baignant sous le soleil floridien. Et pour cause : la cible de ce film est la même qui celle qui fait les beaux jours de Netflix, à savoir les ados fans de Riverdale, Stranger Things ou Pretty Little Liars. Des séries feuilletonnantes et inoffensives dans lesquelles, par un heureux hasard, les créateurs de Do Revenge (titre original) ont été piocher une partie de leur casting. Impossible de s’étonner donc à la découverte de cette comédie vaguement satirique et gentiment queer, qui se voudrait acide mais s’obstine tout autant à ne froisser personne, au risque de faire dérailler sa propre logique narrative. Ces derniers s’inspirent ouvertement (dans le sens « l’un des personnages lit littéralement le roman à l’écran ») de L’inconnu du Nord-Express et son adaptation par Alfred Hitchcock : les deux héros y échangent leurs crimes pour brouiller les pistes. C’est ce que décident de faire ici Drea Torres (Camila Mendes) et Eleanor (Maya Hawke). La première veut se venger de son populaire ex-petit ami (Austin Abrams) qui a ruiné sa réputation en diffusant sa sextape, la deuxième a une revanche à prendre sur Carissa (Ava Capri) qui l’a fait passer pour une prédatrice lesbienne quand elles étaient plus jeunes. Déterminées, les deux nouvelles amies échafaudent alors des plans à base de champignons hallucinogènes et de vols de textos…

« Un monde où les adultes sont absents (ou iconiques, comme Sarah Michelle Gellar). »

Pas de doute là-dessus : les enjeux de Do Revenge ne sont pas d’une grande intensité dramatique. Comme souvent (toujours ?) dans les teen movies américains, la description de la vie au lycée tient de l’univers parallèle : un monde où les adultes sont absents (ou iconiques, comme Sarah Michelle Gellar qui joue la directrice du lycée recevant les élèves dans des salons cosy), où l’argent, l’alcool, la drogue, les villas démentes et les voitures de sport sont aux mains de jeunots de 17 ans, mais où malgré tout cet étalage de richesses, rien n’est plus crucial que la réputation d’une personne ou son épanouissement émotionnel. Bref, un monde de pure fantaisie, inconséquent et superficiel, mais qui a le bon goût, l’époque aidant, d’être inclusif. Les pétillantes Camila Mendes et Maya Hawke ont l’aisance et le charme nécessaires pour tenir la baraque, certains gags, comme le caméo de Sophie Turner, font mouche par leur incongruité, la BO est adéquatement pop et branchée, le production design se décline en couleurs pastel et électriques (on jurerait parfois être dans le Miami de GTA Vice City)… Tout ce savoir-faire permet de ne pas s’ennuyer, malgré l’abondance de dialogues explicatifs qui veulent verbaliser à tout prix les sentiments de chaque personnage (une dernière fois : stop les voix-off !), comme dans une série télé à rallonge. Et malgré aussi, on y revient, cette volonté décevante de ne jamais tirer l’ensemble vers quelque chose de plus abrasif ou tordu, même lorsqu’un twist « diabolique », finalement sans conséquence, fait son apparition au début du dernier acte.