Parfois l’imagination des créateurs de science-fiction est rattrapée par l’ambition des designers industriels. L’équipe de production du film Zero Theorem en a fait l’heureuse expérience, pour le plus grand plaisir de Renault qui a prêté son véhicule le plus étrange, la Twizy, pour les besoins du tournage du film de Terry Gilliam. Quoi de plus naturel, dès lors, pour le réalisateur que de venir se glisser avec un plaisir enfantin à l’intérieur de ce modèle qui tient une place importante dans le décor de son film. Accompagné de Mélanie Thierry, l’estimé membre des Monty Python a tenu une conférence de presse au sein de l’atelier Renault des Champs-Élysées, le 10 juin dernier. Le réalisateur est revenu, promotion oblige, sur le choix du véhicule, mais également et surtout sur le tournage de son dernier film, le premier depuis L’imaginarium du docteur Parnassius.

Lire aussi : la critique de Zero Theorem.

Un pur film d’anticipation

Terry Gilliam, Mélanie Thierry et une petite Renault en promo pour Zero Theorem

Prévu pour une sortie française le 25 juin, Zero Theorem complète la boucle narrative entreprise, il y a 30 ans par Terry Gilliam avec Brazil et l’Armée des 12 singes. Dans un Londres anticipé, mais proche de la réalité, Qohen vit reclus dans une ancienne chapelle en attendant le coup de fil qui donnera un sens à sa vie. Pour le compte d’une autorité puissante baptisée Management, qui le surveille en permanence, il cherche sur son ordinateur à percer l’indicible grâce à son don pour l’informatique.

[quote_center] »Zero Theorem est à la fois simple et complexe. Mais il a également une dimension incroyablement drôle, de bonnes performances d’acteurs qui évoluent dans un monde spectaculairement beau. » [/quote_center]

Le projet est né en 1999, à partir d’un scénario de Pat Rushin. Après avoir donné son accord pour la réalisation en 2008, Terry Gilliam laisse son projet en stand by durant six ans. Le légendaire échec de son Don Quichotte en 2000 a, semble-t-il, bouleversé ses plans d’origine. Le projet reprend en 2009. « La première personne impliquée a été Christoph Waltz », raconte Terry Gilliam. L’acteur autrichien récemment oscarisé pour Django Unchained campe un original vivant en marge de la société. « Une fois qu’il a accepté de jouer dans le film, la machine s’est mise en route très rapidement. »

La Française inattendue

Terry Gilliam, Mélanie Thierry et une petite Renault en promo pour Zero Theorem

Pour la suite du casting, Gilliam ajoute : « Avec l’équipe de production, nous nous sommes dit qu’il serait bien d’avoir une actrice française pour lui donner la réplique. J’ai appelé mon ami Albert Dupontel, le grand réalisateur et interprète -dixit toujours Terry Gilliam-, et il m’a conseillé cette merveilleuse actrice qu’est Mélanie Thierry. Il m’a vanté ses qualités artistiques. » Le réalisateur ne connaissait pas la comédienne à l’époque. Il a donc visionné quelques-uns de ses films et l’a trouvé « belle et sérieuse ». Il a surtout appelé Bertrand Tavernier, qui l’a dirigé dans La Princesse de Montpensier. « Bertrand Tavernier m’a dit que Mélanie Thierry était comme un stradivarius : elle peut tout jouer à condition d’être bien dirigée. » La jeune actrice a reçu pour consigne de s’inspirer de Marilyn Monroe pour ce rôle. « Elle était charmante, pétillante et belle et dans ce film, dès qu’elle est à l’écran, elle explose », complimente Terry Gilliam avec un large sourire, visiblement satisfait de son choix de casting. À ses côtés, la principale intéressée reçoit ses compliments avec timidité. « Ce type de projet me paraissait inaccessible, commente-t-elle. Je ne m’attendais pas du tout à pouvoir y prendre part. J’adore mon personnage, cet univers baroque, loufoque et torturé est très plaisant à explorer. »

Pour compléter cette distribution audacieuse, Terry Gilliam a appelé Matt Damon, pour lui proposer un petit rôle. « Il a accepté sans même lire le script ! » s’étonne encore le réalisateur de Las Vegas Parano.

London parano

Terry Gilliam, Mélanie Thierry et une petite Renault en promo pour Zero Theorem

Afin de raconter l’histoire d’un homme qui chercher un sens à sa vie, Terry Gilliam a dessiné un monde similaire au notre, plein de couleurs, où les gens passent leur temps à tweeter les uns avec les autres. « Comme dans le film, nous sommes de plus happés par les nouvelles technologies, estime le réalisateur. Peut-être que ce monde imaginaire deviendra réalité dans un futur proche. Mes sources d’inspiration ne viennent pas de loin. J’ai puisé dans les choses qui nous entourent, les objets, les machines, existent pour la plupart déjà. En tant qu’ancien dessinateur de bandes dessinées, j’aime détourner des choses, les tordre un peu. » À cette dimension d’anticipation viennent s’ajouter de multiples couches superposées. « Zero Theorem est à la fois simple et complexe, ajoute Terry Gilliam. Mais il a également une dimension incroyablement drôle, de bonnes performances d’acteurs qui évoluent dans un monde spectaculairement beau. »

L’aspect parano du scénario vient renforcer le portrait de la société actuelle. « Dans le film, nous voyons bien qu’il devient impossible de vivre isolé et coupé du monde, explique Gilliam. Nous sommes tous surveillés en permanence et d’ailleurs, pour la plupart d’entre nous, ce n’est pas du tout un problème. Les gens ne veulent plus de leur vie privée, ils veulent être célèbres, avoir leur quart d’heure de gloire. Cela dénote une peur d’être seul avec soi-même. » Pour donner une résonance actuelle à Descartes, le réalisateur ajoute avec malice : «nous pouvons dire : « Je tweete donc je suis » ».

Brazil, si loin, mais pourtant si proche

Terry Gilliam, Mélanie Thierry et une petite Renault en promo pour Zero Theorem

Le film a reçu un accueil mitigé. Comme souvent chez Gilliam, les critiques sont radicalement opposées, un peu comme le sujet de la réintroduction de l’ours des Pyrénées. Le réalisateur semble s’en réjouir. « Je sais que mon film fait débat, des gens aiment d’autres détestent. J’aime quand les choses font débat, quand les opinons soient partagées. » Pour répondre à tout ceux qui l’accusent de recopier Brazil, il assure : « J’ai beaucoup essayé de m’éloigner de Brazil. C’est peut-être similaire, mais il décrit le monde tel que je le trouvais dans les années 80 de manière très sombre. Alors que mon monde de Zero Theorem est particulièrement gai, plein de couleurs (rires). Il représente la deuxième décennie des années 2000. »


[text title= »Twizy, l’autre vedette française de Zero Theorem »]Terry Gilliam, Mélanie Thierry et une petite Renault en promo pour Zero TheoremInvité dans le showroom de Renault, Terry Gilliam a expliqué pourquoi il a choisi de mettre avant cette voiture dans son film.  Twizy est une minuscule citadine électrique à deux places. « Mon objectif initial était de dépeindre le futur, mais je réalise maintenant que j’ai décrit la société d’aujourd’hui. Lorsque j’ai vu cette petite voiture, je me suis dit c’est la voiture du futur. Puis, je l’ai vu garée près de ma maison à Londres et j’ai compris qu’elle faisait déjà partie de notre époque. Pour le tournage à Bucarest, nous avons pu emprunter quarante Twizy. Comme ce véhicule se déplace très vite, nous  pouvons croire qu’il y en avait beaucoup plus. La majorité de l’action se passe dans une chapelle désaffectée, mais lorsque les personnages sortent, ils doivent composer avec les Twizy qui accaparent l’espace aux humains ! »

Lire aussi : la critique de Zero Theorem.